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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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plièrent l’échine.
    – Le frère du roi !… Le duc d’Orléans !…
    Déjà Louis d’Orléans, pour ne pas laisser voir son visage aux autres assistants, avait remis son masque. Mais se tournant vers Passavant :
    – M’avez-vous reconnu, monsieur ?
    – Monseigneur, dit le chevalier, j’ai entendu prononcer votre nom par ces messieurs. Je puis donc vous assurer que masqué ou non, en quelque temps et lieu que ce soit, s’il y a danger autour de vous, je saurai vous reconnaître.
    – Eh bien, joignez-vous donc à mes compagnons pour m’escorter jusque hors de la Cité. Quant à vous, ajouta-t-il en fixant les quatre qui se courbaient, prenez garde !
    Et il sortit, suivi de ses gentilshommes et de Passavant. Quant aux quatre molosses de Jean sans Peur, ils disparurent, empressés, par un autre chemin. Dans la rue, le chevalier sentit tout à coup sur son bras une main fine et tremblante. Il se retourna et reconnut la jeune femme qu’il avait arrachée aux violences de d’Ocquetonville. Elle baissait les yeux. Elle murmura :
    – Adieu, mon gentilhomme. J’ai voulu vous dire mon nom. Je m’appelle Ermine Valencienne.
    – Allons, fit doucement le chevalier, ne pensez plus à ces mauvais gentilshommes indignes de porter l’épée. Vous êtes belle. Je vois à vos yeux que vous avez du cœur. Quittez… cette rue, si vous m’en croyez, quittez…
    Il allait dire : « Quittez le triste métier que vous faites. » Il se retint, crainte de chagriner la pauvre fille. La tête baissée, elle considéra un instant la boue de la chaussée, regard terrible qui voulait peut-être dire : Cette boue fut mon berceau. Elle sera ma tombe… Enfin, elle murmura :
    – Adieu, beau capitaine. Dieu vous garde !
    Et elle s’enfuit, tenant dans sa main crispée la pièce d’or que lui avait donnée le chevalier.
    Le chevalier quitta le duc d’Orléans à la porte de son hôtel seulement, refusa encore l’offre qui lui fut faite de prendre du service dans la maison du frère du roi, et s’en alla passer la nuit en l’auberge du fameux Thibaud Le Poingre, sise, sous l’enseigne de la « Truie pendue », dans la rue Saint-Martin, juste en face le logis de Passavant.
    Le lendemain matin, en effet, le chevalier de Passavant, s’étant éveillé frais et dispos, ayant pansé les légères blessures dont il avait été atteint pendant la rixe, compta sa fortune, c’est-à-dire la somme que dans son escarcelle avait glissée Honoré de Champdivers. Et il raisonna ainsi :
    – J’ai besoin d’accoutumer bras et jambes à l’exercice, mon cerveau à penser, mes yeux à faire connaissance avec la lumière du jour, bref il faut réapprendre la vie. Roselys étant morte, rien ne me retient à Paris. Je vais donc prendre la campagne et, dure que dure, mener sur les grands chemins l’existence d’un gentilhomme riche, libre de ses bras, libre de son esprit, libre de son cœur.
    Ayant ainsi parlé, il fit trois parts de sa fortune.
    Une petite pour renouveler à la friperie ses vêtements déchirés.
    Une un peu plus forte pour acheter un bon cheval de route.
    Une troisième plus forte encore pour vivre dure que dure.
    Ayant calculé la nourriture de son cheval, la sienne, le gîte d’étape, et tenu compte des dépenses imprévues qui sont toujours la plus grosse dépense, il estima qu’il pouvait diviser son argent en soixante parts dont chacune était capable de lui assurer pour un jour l’existence d’un grand seigneur qui n’a rien à ménager.
    Il avait donc deux mois devant lui pour refaire connaissance avec l’air, la lumière, le soleil, la pluie, les hommes, les loups, la vie enfin. On était au 18 d’octobre. Il rentrerait donc vers le 18 décembre de la même année 1407 pour prendre ses quartiers d’hiver à Paris.
    Ce jour-là vers midi, monté sur un bon cheval, il quitta Paris pour s’en aller à l’aventure.
    Disons tout de suite qu’en cette pérégrination, s’il trotta, galopa, respira à cœur joie, s’il reprit bonne mine, s’il vécut à sa fantaisie, il n’eut qu’une seule aventure : ce fut de constater que, si bien qu’il eût calculé, si décidé qu’il fût à ne pas dépasser d’un denier la somme journalière qu’il s’était octroyée, cette somme de dépense fut rapidement doublée. Il en résulta qu’au bout d’une vingtaine de jours, il dut songer au retour. Ce retour s’accéléra au fur et à mesure que se dégonflait l’escarcelle, les

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