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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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fourreau leurs colichemardes gigantesques :
    – Les trois vivants ! glapit Bruscaille. C’est faux ! C’est faux !
    – Qui dit que nous sommes les trois vivants ! hurla Bragaille. Horrible mensonge !
    – Qu’on touche aux trois vivants ! tonitrua Brancaillon. Qu’on y touche, foudre et tonnerre !
    Le duc et ses gentilshommes demeurèrent effarés.
    – Or çà ! éclata Jean sans Peur, que signifie ? Ici, drôles, ici !…
    À ces voix qu’ils reconnurent, Bruscaille, Bragaille, Brancaillon, tressaillirent, parurent revenir au sens de la réalité. Bruscaille, le premier, rengaina, puis Bragaille, puis Brancaillon. Ils s’essuyèrent le front, grondant des choses connues d’entre d’eux seuls.
    – Expliquez-vous, marauds ! dit le duc.
    – Jamais ! répondit Brancaillon.
    – Plutôt la mort ! dit Bragaille.
    – Monseigneur, dit Bruscaille, daigne, votre haute magnanimité nous pardonner. Oserai-je vous présenter une supplique, tant en mon nom qu’en celui de mes deux acolytes ?
    – Soit. Parle, dit Jean sans Peur étonné.
    – Eh bien, monseigneur, nous sommes ici bien traités, bien vêtus, bien nourris, bien payés. Et par-dessus le marché, vous nous envoyez parfois en des expéditions qui nous ravissent l’âme. Mais nous aimerions mieux être à jamais privés de l’honneur de vous servir, reprendre le collier de misère, devenir chiens errants, par les rues plutôt, que…
    – Plutôt que quoi ? Parle !
    – Plutôt, dit Bruscaille d’une voix qui s’affaiblissait, plutôt que de nous entendre dire que nous sommes… « les trois vivants ! » C’est faux, monseigneur, je vous le jure.
    – C’est faux ! répétèrent en chœur Bragaille et Brancaillon.
    – Assez ! dit le duc de Bourgogne. Vous avez eu un moment de démence, n’en parlons plus. Seulement, écoutez bien, mes drôles. Il s’agit cette fois d’une mission difficile. Il faut retrouver un homme dont on ne sait ni le nom ni le logis qui l’abrite. Cet homme m’a mortellement offensé. Si vous me l’amenez mort ou vif, il y a cent écus pour vous. Ocquetonville, fais à ces bons garçons une description exacte du truand.
    Ocquetonville dépeignit avec exactitude les traits et le costume du chevalier de Passavant. Le signalement qu’il donna s’enrichit des nombreux détails fournis par Courteheuse, Guines et Scas.
    – Cela suffit, s’écria Bruscaille dont le petit œil étincelait. En chasse, mort diable ! J’ai toujours eu la passion de la chasse, monseigneur. Avant deux jours je veux avoir débusqué la bête.
    – Et moi, alors, je lui mets la main au col ! dit Bragaille.
    – Et moi, alors, je l’assomme avec ceci ! : s’écria Brancaillon en montrant son poing gros comme deux poings d’homme ordinaire.
    – Eh bien, en chasse, donc, mes braves ! s’écria Jean sans Peur.
    Tous trois, ensemble, se courbèrent, se redressèrent et sortirent. Ocquetonville les escorta jusqu’à la porte de la salle. Et comme ils descendaient l’escalier :
    – Holà ! fit-il, je ne vous ai point dit où il faut chercher le truand.
    – Et où faut-il chercher ? cria Bruscaille.
    – Dans la Cité.
    Et Ocquetonville referma la porte.
    Dans l’escalier, les trois sacripants s’étaient arrêtés tout net et se regardaient avec des yeux terribles. Bragaille tremblait sur ses jambes. On entendait Brancaillon souffler comme le bœuf de l’abattoir.
    – Sortons toujours, dit Bruscaille.
    Quelques instants plus tard, ils étaient hors de l’hôtel de Bourgogne. Mais au lieu de se diriger vers la Cité, sans se le dire, d’instinct, ils lui tournèrent le dos et s’en allèrent vers le Temple. Là les maisons se faisaient plus rares. Ils avisèrent un bouchon où venaient se rafraîchir les maraîchers et se réfugièrent dans la salle la plus reculée. Ils dégrafèrent leurs flamberges qu’ils posèrent sur la table. Et lorsqu’ils eurent fait apporter un broc de vin et des dés :
    – Nous aurions dû aller un peu plus loin, fit Bragaille, l’homme prudent de la bande.
    – Puisse la Cité s’engloutir une bonne fois dans le fleuve ! grogna Brancaillon.
    – Mes enfants, dit Bruscaille, nous allons rester ici deux ou trois jours. Laissez faire, j’inventerai une mort convenable de celui que nous cherchons, et notre illustre maître doublera la chose d’écus qui nous est due. Quant à entrer dans la Cité, j’aime mieux qu’on me coupe les deux

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