Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
Vom Netzwerk:
à condamner cet homme. Je le condamne. C’est vous qui devez exécuter la sentence. Prenez garde ! Car si cette fois encore vous reculiez, si vous aviez peur encore, je croirais…
    – Louis d’Orléans mourra ! gronda Jean sans Peur transporté.
    – Oui, dit-elle lentement, que Louis d’Orléans tombe puisqu’il s’est mis en travers de votre chemin, puisque vous le haïssez… rien de vivant entre vous et moi ! Mais il ne faut pas que vous soyez soupçonné. Ni vous, ni aucun homme à vous ne doit être accusé… Me comprenez-vous ?
    – J’entends, dit Jean sans Peur. Et tel est aussi mon avis. L’affaire sera promptement menée sans que ni moi ni aucun des miens n’y paraissions.
    – Quelque bravo bien stylé, bien payé… oui : c’est le mieux. Et pour que Paris ne puisse vous soupçonner, pour que nul ne puisse même penser qu’Orléans est tombé sous les coups de Bourgogne…
    Elle s’arrêta, médita plus profondément.
    – Ceci sera plus difficile, dit Jean sans Peur attentif.
    Ils échangeaient ainsi d’une voix basse et calme des paroles de crime. Ils s’étudiaient.
    – Oui, c’est cela ! dit soudain Isabeau : une réconciliation publique, éclatante ; il faut que la mort suive de près cette réconciliation ; de si près que nul n’ait la pensée d’imaginer que Louis d’Orléans est tombé sous les coups de son nouvel ami.
    Le duc de Bourgogne frissonna. Il se penchait, sur cette âme féminine et reculait devant l’abîme de ruse féroce qu’il entrevoyait. Il reculait simplement parce qu’il avait peur pour lui-même. Cependant, si le conseil d’Isabeau lui prouva qu’elle n’avait pas seulement l’énergie d’un chef de guerre, mais aussi toute l’astuce d’un espion, il convint que ce conseil était bon, – et il l’adopta. Isabeau continuait :
    – Ce n’est pas tout. Il faut que Paris s’accoutume à vous considérer comme un sauveur. Vous avez récemment fort bien joué ce rôle. Vous devez vous y tenir. Or, Paris en ce moment est inquiet de mon absence et croit que je prépare quelque bon coup de traîtrise contre lui. Eh bien, vous serez l’homme qui sauve et rassure Paris, l’homme, qui ramène la reine à l’Hôtel Saint-Pol… Je vais me rendre secrètement au château de Beauté. Nous sommes à mardi. Venez vendredi matin à ma rencontre, jusqu’à Vincennes. Vous m’y trouverez avec une faible escorte, et me ramènerez dans Paris.
    Isabeau, alors, de son regard mortellement sérieux, fixa Jean sans Peur.
    – Vous le voyez, dit-elle, je m’abandonne à vous. Un homme se levait entre vous et moi : je le condamne à mort. Mais vous, de votre côté, prenez garde ! Si quelque nouvelle Laurence d’Ambrun…
    Isabeau n’acheva pas. Un geste d’une sauvage énergie traduisit la menace. Et. Jean sans Peur frissonna : l’image d’Odette de Champdivers s’évoquait en lui, et il se criait :
    – Mais je l’aime, moi ! Cette fille qu’elle condamne et qu’il va falloir que je tue, insensé, je l’aime ! Eh bien, périsse Odette, de Champdivers. Je m’arracherai le cœur, mais je serai Roi !
    À la suite de ce traité d’alliance conclu entre Isabeau et Jean sans Peur, un double événement étonna Paris.
    D’abord la réconciliation des ducs d’Orléans et de Bourgogne.
    Et pour comprendre l’étonnement des bourgeois, il faut savoir que, dans la semaine qui venait de s’écouler, l’évêque de Liège, à marches forcées, avait amené trois mille hommes au duc de Bourgogne, que de Savoie et d’Autriche, il lui était venu huit mille mercenaires, ce qui portait à dix-sept mille combattants l’armée dont il disposait.
    Ceci explique peut-être aussi l’attitude d’Isabeau – et aussi la facilité avec laquelle Louis d’Orléans accepta une réconciliation qui lui faisait horreur.
    Bref, tous ces gens d’armes s’en retournèrent brusquement comme ils étaient venus, le camp du Pré-aux-Clercs fut levé ; en présence d’une immense assemblée, après une messe solennelle, le duc de Bourgogne et le duc d’Orléans, sur l’autel de Notre-Dame, se jurèrent « bonne amour et fraternité ».
    Le deuxième événement fut la rentrée de la reine Isabeau en son palais de l’Hôtel Saint-Pol.
    Elle y fut ramenée un beau matin par Jean sans Peur, qui alla la chercher au château de Beauté. Les bourgeois, persuadés que le duc de Bourgogne avait habilement et généreusement évité à Paris les

Weitere Kostenlose Bücher