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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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désastres d’une guerre civile, cessèrent dès lors de le tenir en suspicion et le considérèrent comme le chef naturel du parti populaire.

XVIII – LE RETOUR DU CHEVALIER DE PASSAVANT
    Ce matin même où Jean sans Peur alla, non pas chercher la reine au château de Beauté-sur-Marne, comme on le crut dans Paris, mais simplement l’attendre près de Vincennes, comme elle le lui avait ordonné, ce matin-là, donc, le chevalier de Passavant s’approchait de la capitale.
    Sa campagne d’un mois à travers les pays d’Île-de-France, de Valois, de Picardie, de Normandie l’avait transformé ; il n’était plus ce maigre et pâle fantôme sorti de cette tombe qu’on appelait la Huidelonne ; l’air et la liberté avaient coloré son fin visage un peu narquois ; les omelettes picardes, les poulardes des auberges normandes, les vins d’Île-de-France lui avaient rendu raisonnable apparence. Voici quelle était à cette époque la situation morale, du chevalier de Passavant :
    Il avait, la veille, au gîte, à peu près vidé le fond de son escarcelle.
    Il n’appartenait à personne.
    Il n’avait ni parents, ni amis.
    Il n’y avait en lui aucun sentiment générateur de tristesse.
    N’ayant donc à redouter ni les voleurs ni la mélancolie, rien ne pesant ni à son cœur ni à sa bourse, libre, seul au monde, sans souci de l’avenir, l’âme ferme, l’esprit sain, le corps alerte, l’imagination vagabonde, trouvant le soleil admirable et la pluie charmante, émerveillé de vivre, émerveillé que la vie fût une si bonne chose, un bon cheval entre les jambes, une bonne rapière au flanc, le manteau et la plume au vent, sur la route du retour, en cette claire matinée, trottait le chevalier de Passavant.
    Il passa la Marne au bac de Nogent, et bientôt, gaîment, salua Paris d’un sourire.
    Gaîment ? Sans doute.
    La nouvelle de la mort de Roselys lui avait porté un rude coup, c’est vrai. L’apparition d’Odette lui avait causé un éblouissement, c’est vrai. Mais l’espace et le temps effacent les images. Roselys était en lui, mais lointaine dans le recul des années, imprécise, à demi chimérique, un rêve d’enfance dont on sourit alors qu’on le chérit encore. Odette à peine entrevue était en lui, mais presque irréelle, improbable, si on peut dire. Roselys était un joli crépuscule de teinte inexistante. Odette était une aube incertaine, encore insaisissable.
    Pour tout dire, s’il y avait des êtres au monde pour hanter la pensée du chevalier, c’était la reine Isabeau, l’ange qui, selon la version de Saïtano, avait recueilli la petite Roselys et adouci ses derniers moments ; c’était le roi Charles qui lui avait, à lui, ouvert la porte de la Huidelonne ; c’était le duc d’Orléans qui, dans la bagarre du Val d’Amour, l’avait généreusement tiré d’un très mauvais pas. À ces trois-là, il se promettait d’offrir, vienne l’occasion, tout ce qu’il possédait, c’est-à-dire sa vie ! Le plus beau chevalier du monde ne peut donner que ce qu’il a.
    Tout en remontant d’un claquement de langue le trot de son cheval, Passavant songeait :
    – Si je réclame les biens du chevalier mon père, je me dénoncerai moi-même aux honnêtes sacripants enragés à mes trousses ; merci ; assez de Huidelonne ; assez de geôlier, bien que ce brave m’ait enseigné plus d’un bon tour d’escrime. Donc, je suis sans sou ni maille, sans logis, sans parents, sans amis. Que ferai-je ? Eh bien, je m’enrôlerai au service de quelque puissant prince, et ce sera bien le diable si je n’arrive, à la pointe de l’épée, à m’assurer le gîte et la pitance.
    Nous avons dit qu’il passa la Marne à Nogent, où il arriva vers les huit heures du matin. Ce ne fut pas sans avoir fait halte à l’auberge du Bac, sise au bord de la rivière, où on lui fit manger de la petite friture qui était la renommée du pays – car, en ce temps, on dînait à neuf heures du matin.
    Il laissa son dernier écu aux mains de l’hôtesse qui, lorsqu’il se fut remis en selle, vint lui offrir poliment le coup de l’étrier. Par-dessus le marché, elle lui donna un bon conseil qui eut d’ailleurs le sort de tous les bons conseils, c’est-à-dire qu’il ne fut pas suivi.
    – Seigneur cavalier, dit-elle, allez-vous donc à Paris ?
    – À Paris, oui, ma belle hôtesse, fit joyeusement le chevalier.
    – Eh bien, reprit-elle, ce serait dommage vraiment, qu’un jeune

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