L'Iliade et l'Odyssée
t’arrêter et
t’asseoir dans le bois de peupliers que tu trouveras là. Car je ne
veux pas qu’on nous voie ensemble et qu’on croie que c’est mon
futur époux que j’amène chez mes parents. »
« Puis, quand tu jugeras que nous avons
eu le temps d’arriver au palais, entre dans la ville. Demande la
maison du roi, traverse la cour et entre directement dans la
grand-salle. Tu trouveras ma mère devant l’âtre, tordant la laine
teinte de la pourpre de la mer, à la lumière du feu. Tombe à ses
genoux. Si elle est bien disposée envers toi, elle aura bientôt
fait de persuader mon père de te renvoyer chez toi sain et
sauf. »
Elle toucha les mules du fouet, et elles
eurent vite quitté la rivière. Avant le coucher du soleil ils
atteignirent le bois de peupliers où Ulysse s’assit pour
attendre.
Quand Ulysse jugea qu’assez de temps s’était
écoulé, il alla au palais d’Alcinoos. Et Athéna l’enveloppa d’un
brouillard, si bien que personne ne le vit.
Quand il fut devant le palais, il s’arrêta un
instant pour regarder autour de lui avant de mettre le pied sur le
seuil de bronze. Car le palais brillait comme le soleil ou la
lune.
Dans la grand-salle une rangée de sièges
s’étendait de chaque côté, avec des housses de fin tissu. Et la
lumière pour éclairer les festins venait de torches flamboyantes
tenues par des statues d’or.
Ulysse entra dans la grand-salle. Toujours
protégé par le brouillard d’Athéna, il s’avança jusqu’au trône du
roi et de la reine. Et ce fut seulement quand il embrassa les
genoux de la reine Arété que le brouillard se dissipa. Alors on le
vit et le silence se fit.
« Reine Arété, dit Ulysse, c’est après
avoir souffert bien des maux que je me jette à tes genoux et te
demande asile, à toi et à ton roi. Puissent les dieux vous donner
le bonheur, à vous et aux vôtres, si vous m’aidez à regagner mon
pays, pour que je puisse enfin revoir les miens ! »
Puis il s’assit sur les cendres du foyer. Et
le silence emplissait la pièce. Mais le roi Alcinoos prit Ulysse
par la main et le conduisit à un siège que lui céda son fils
favori. Une servante entra avec de l’eau dans une aiguière d’or et
la versa dans un bassin d’argent, pour qu’il se lave les mains. On
entassa de bonnes choses sur la table à côté de lui, et Ulysse but
et mangea autant qu’il le désirait.
Cependant le roi fit verser du vin pour que
tous puissent faire une libation à Zeus, le dieu des suppliants. Et
seulement après, Arété posa les questions qu’elle avait dans
l’esprit depuis qu’elle avait reconnu les habits qu’il portait, car
c’était elle qui les avait faits.
« Qui es-tu, étranger ? D’où
viens-tu ? Et puis-je demander d’où viennent ces
habits ? »
Ulysse commença aussitôt son récit,
disant : « Je suis Ulysse, fils de Laerte, de la
montagneuse Ithaque. » Et aux Phéaciens, immobiles sous le
charme, il fit un récit complet de ses aventures.
L’Odyssée – Scène 13 : Le retour à
Ithaque
Après qu’il eut entendu l’histoire de ses
longues aventures, il plut au roi Alcinoos de faire partir Ulysse
le lendemain, au coucher du soleil. Le roi ne lui donna pas
seulement un navire et son équipage pour le reconduire chez lui,
mais aussi des vêtements, des ornements d’or et d’autres riches
présents, de quoi remplir un grand coffre de bois.
Le roi plaça lui-même ces présents sous les
bancs du navire. Puis ils eurent un festin d’adieu, et ils
écoutèrent l’aède.
Ulysse fut heureux de voir le soleil se
coucher, car il avait hâte de partir. Il fit ses adieux sur le
rivage, avec une libation aux dieux, et une prière pour son hôte et
son hôtesse.
Lorsqu’Ulysse fut enfin monté à bord, la reine
Arété envoya des servantes, l’une placer une couverture et un drap
sur le pont, l’autre avec une robe et une tunique neuve pour son
retour, une troisième avec du pain et du vin. Ulysse se coucha
tandis que les hommes d’équipage montaient à bord, prenaient leurs
places, larguaient les amarres et poussaient au large. Et au moment
où leurs rames frappèrent l’eau, un doux et profond sommeil lui
ferma les yeux.
Comme un attelage d’étalons bondit sous le
fouet, le navire portant Ulysse franchissait les vagues violettes,
sur la mer grondante. Et quand se leva la brillante étoile du
matin, le navire arriva au port d’Ithaque.
Les Phéaciens connaissaient bien ce port. Et
ils
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