L'Impératrice indomptée
Élisabeth, future souveraine de Belgique. Max-Emmanuel, le plus jeune, épousera la princesse Amélie de Saxe-Cobourg ; un mariage heureux qui donnera naissance à plusieurs enfants. Hélène, la fille aînée, évidemment condamnée au malheur, épousera le prince héréditaire de Tour et Taxis, une énorme fortune, mais après la naissance de quatre enfants, le prince décédera à l’âge de trente-six ans la laissant accablée de chagrin 2 . Marie, deviendra reine de Naples avant d’être détrônée. Exilée à Rome, mariée à un époux intellectuellement limité, elle eut un enfant illégitime ; Proust s’en inspira pour sa reine de Naples dans À la recherche du temps perdu . Mathilde, surnommée « Spatz », deviendra comtesse de Trani, en épousant le frère du roi de Naples, qui se suicidera. Un mariage chaotique qui donna naissance à une petite fille, Marie-Thérèse. Sophie, la cadette, épousera le second fils du duc de Nemours (de la maison d’Orléans) et deviendra ainsi duchesse d’Alençon, elle trouvera une mort tragique dans l’incendie du Bazar de la Charité. Le destin de cette tribu princière aux fortes personnalités est décidément hors de l’ordinaire.
Mais tous les regards, en cet été 1853, sont tournés vers Sissi. L’enfant, qui a quitté Possenhofen il y a si peu de temps, s’est métamorphosée en une ensorcelante jeune femme, très consciente de sa beauté. L’empereur paraît plus amoureux chaque jour et sa fiancée découvre en lui le plus délicieux et le plus chevaleresque des fiancés. Pour une jeune fille élevée dans une grande famille où personne ne l’a jamais distinguée de ses frères et soeurs, il est enivrant de se trouver soudain l’unique objet de tant d’amour et d’adulation. Tout n’est que prétexte à s’amuser et à fêter les fiançailles. Il y a des parties de chasse, des pique-niques, des fêtes champêtres, un feu d’artifice à Saint-Wolfgang, où le vieil archiduc Louis donne à souper en plein air sur une péniche illuminée, pendant que des fusées et des soleils tournants répandent une pluie d’étoiles sur le lac, et que les initiales enlacées d’Élisabeth et de François-Joseph, surmontées de la couronne impériale, brillent en lettres de feu au flanc de la montagne.
Mais il est temps de regagner Possenhofen. Sissi en est partie gaie, insouciante, s’occupant des chevaux. Elle y revient fiancée à l’homme à qui sa soeur était destinée. Aux relais, elle n’aide plus les cochers et reste songeuse dans son coin. Dès l’arrivée en Bavière, tout change. Les règles prévues pour Hélène lui sont ainsi appliquées. Elle doit apprendre tout ce qui au fond ne l’intéresse pas. Il lui est particulièrement difficile de devoir perfectionner son français. Jusqu’alors, elle a tout au plus parlé un peu anglais avec Hélène, principalement pour ne pas être comprise des autres. Le dialecte bavarois est en usage à Munich et à Possenhofen. C’en est fini à présent de la liberté dorée, car le temps presse et il faut le mettre à profit. Seules les heures pendant lesquelles le comte Majlath lui enseigne l’histoire autrichienne 3 éveillent son intérêt.
L’élève, docile, brillamment douée pour les langues, ne ressemble plus à la petite fille qu’il fallait attacher à sa chaise pendant la classe. Ludovica donne quelques conseils : « Ne te laisse jamais entraîner par ton imagination, mon enfant... Apprends qu’une souveraine doit savoir s’ennuyer avec grâce... » Le 11 octobre, François-Joseph passe dix jours de vacances à Possenhofen. Les fiancés courent le pays, la main dans la main, et font de longues chevauchées ; le temps fuit trop vite. Au cours d’une représentation de gala au théâtre de Munich, ils sont acclamés frénétiquement. L’empereur écrit à sa mère une lettre où il exprime toute sa félicité. Il déclare à un ami : « Je suis aimé comme un lieutenant, heureux comme un dieu... »
Mais il doit rentrer à Vienne et Sissi retourner à ses études. Le mariage est fixé au 24 avril 1854 et, pendant tout l’hiver, la future impératrice réside au palais ducal de la Ludwigstrasse. On prépare, de jour en jour, le trousseau, on voit des couturières, des modistes ; mais toute cette activité l’ennuie prodigieusement. Elle tient à monter quotidiennement à cheval et à se perfectionner au manège. Pendant ce temps, diplomates et fonctionnaires
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