L'Impératrice indomptée
travaillent à Munich et à Vienne. Les questions financières doivent être réglées ; il faut obtenir l’accord du roi de Bavière et la dispense du pape. Des malles commencent à partir pour Vienne. Sissi peine à ses essayages. On a pitié d’elle quand on lit aujourd’hui le catalogue du trousseau requis pour la nouvelle épousée d’un empereur. Dix-sept robes de grande cérémonie, quatorze robes de soie à col montant, dix-neuf toilettes légères d’été de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, seize chapeaux et quatorze douzaines de sous-vêtements à dentelles ne constituent que quelques-uns des articles. Tous les couvents de Bavière brodent et cousent pour son trousseau. Elle pose aussi pour plusieurs peintres 4 .
D’octobre 1853 à mars 1854, de longues lettres s’échangent entre les fiancés, qui ne s’entrevoient que brièvement, à Munich ou à Possenhofen. L’empereur est surtout à Vienne. Toutes les décisions lui incombent. Car, depuis la suppression du ministère de la Guerre, il est le chef des armées. Il redevient le plus ponctuel des fonctionnaires de son empire ; mais quelque chose, toutefois, est changé : sur sa table de travail, apparaît le portrait d’Élisabeth. Il interrompt même le rapport d’un de ses conseillers pour lui montrer l’image de sa fiancée, une initiative que l’austère ministre de la Police, le baron de Kempen, mentionne avec désapprobation dans son journal. Plus le printemps approche, plus la fièvre gagne la famille de Sissi.
Le choix de la ville où se tiendra la cérémonie – Vienne ou Munich – fait l’objet de longues négociations. « Il n’est pas question d’un mariage par procuration, et l’empereur ne peut malheureusement pas venir ici, écrit Ludovica. Il est bien dommage que les noces ne puissent avoir lieu chez nous, ce qui aurait tout de même été beaucoup plus agréable ! Je le regrette beaucoup, car accompagner Sissi à Vienne sera toute une affaire – une Cour si considérable, le rassemblement d’une famille si nombreuse, la société viennoise, les fêtes, etc. je ne me sens guère prête à tout cela [...]. Je préfère vraiment ne pas y penser et je ne conçois pas encore bien moi-même ce que cela représente. C’est surtout l’idée de l’éloignement de Sissi qui m’affecte, et je voudrais en différer indéfiniment le moment. »
Les soucis de Ludovica ne sont que trop fondés. L’ambassadeur de Belgique écrit ainsi à Bruxelles : « La mère de la future impératrice désirerait même que le mariage fût retardé jusqu’au mois de juin, pour éviter à sa fille les fatigues qui résulteraient pour elle des fêtes qui seront données à cette occasion et dont on pourrait se dispenser si la cérémonie avait lieu dans une saison plus avancée et lorsque la plus grande partie de l’aristocratie aura déjà quitté Vienne. »
Déjà les cadeaux de mariage – bijoux, fourrures, bibelots, pièces d’argenterie – affluent de partout ; l’un d’eux enchante particulièrement Élisabeth : un grand perroquet rose venu de la ménagerie de Schönbrunn. L’archiduchesse Sophie offre le diadème, les diamants, le collier, les boucles d’oreilles qu’elle a portés à son mariage. Il faut aussi rédiger le contrat (ratifié le 20 mars 1854). Elle reçoit « par amour et affection paternels » 50 000 florins en dot de sa famille, plus un trousseau « conforme à son rang ». L’empereur, de son côté, promet de « compenser la dot de sa fiancée avec 100 000 florins ». Il lui assure en outre une Morgengabe de 12 000 ducats, conformément à une ancienne coutume, d’après laquelle le mari devait à sa femme, après la nuit de noces, une compensation pour la virginité perdue. Ensuite, François-Joseph s’engage à faire verser annuellement à son épouse, pour son usage personnel et à sa libre disposition, la somme de 100 000 florins en espèces. Cette somme, appelée épingles, doit servir uniquement à la toilette, aux aumônes et autres menus frais. Toutes les autres dépenses sont à la charge de l’empereur. Ensuite, le cas échéant, on assure à l’impératrice une rente de veuve de 100 000 florins. Le ministre des Finances autrichien reçoit l’ordre, écrit de la main de l’empereur, de tenir prêt, pour le lendemain du mariage, la Morgengabe en nouvelles pièces d’or et d’argent, dans « un coffret présentable, afin de la remettre à la
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