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L’impératrice lève le masque

L’impératrice lève le masque

Titel: L’impératrice lève le masque Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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est que ce réseau comprend même des serviteurs de l’État.
    — Vous voulez dire que je sais qui a tué le colonel Pergen et que je ne fais rien pour qu’on lève le voile sur cette affaire ?
    — En ce qui me concerne, je ne tire aucune conclusion, monsieur Tron. Je me contente d’établir un rapport préliminaire. Ce rapport ne contiendra ni déduction ni jugement, mais rien que des faits. Il revient aux fonctionnaires chargés de l’enquête d’interpréter ceux-ci.
    — Je pensais que c’était vous qui alliez mener l’enquête.
    Le lieutenant Bruck secoua la tête.
    — M. Da Ponte et vous-même allez être transférés à Vérone. Vous êtes soupçonnés de meurtre. Le général von Toggenburg croit que c’est vous qui avez assassiné le colonel. Vous allez passer la nuit aux Plombs 2 et prendrez demain le premier train.
    1 - Branche d’une calle . ( N.d.T. )

    2 - Célèbre prison vénitienne, située au dernier étage du palais des Doges ; le surnom ( piombi ) vient du métal du toit. ( N.d.T. )

53
    Allongé sur une planche, Tron fixait le plafond de la cellule dans laquelle on l’avait enfermé une demi-heure auparavant. Une lumière blafarde filtrait à travers la lucarne couverte de neige. Près du bat-flanc se trouvaient un tabouret en bois et un seau. Il n’avait pas encore vu de rats, mais il était sûr qu’il y en avait. Enfant, il avait entendu dire que dans les piombi , ils pouvaient devenir aussi grands que des bassets.
    Par chance, ce n’était pas là qu’on l’avait enfermé. Sa cellule se trouvait bien au dernier étage du palais des Doges et, à en juger par le son des cloches du Campanile, elle devait donner sur la place Saint-Marc, mais s’il était vrai que les anciennes prisons n’avaient jamais été modernisées et si la description de Casanova était correcte (une porte blindée de trois pieds de haut avec un trou de huit pouces de diamètre au milieu), alors on avait dû l’incarcérer dans une autre partie du bâtiment. La porte était normale, et au lieu du judas rond, il n’y avait qu’une trappe en bois à hauteur d’yeux.
    Tron supposait qu’on le soumettrait à une isolation totale jusqu’au lendemain matin. Cela faisait partie de la technique d’usure. Le prisonnier devait avoir le temps de méditer sur son crime et sur son impuissance, de rêver d’un verre d’eau et d’une tranche de pain. Un homme qui a faim et soif finit toujours par être reconnaissant du moindre geste de bonté. Et alors, il se montre en général beaucoup plus coopératif.
    Depuis que les deux soldats l’avaient conduit à travers un labyrinthe d’escaliers et de corridors sous le toit du palais des Doges et qu’ils avaient refermé la serrure derrière eux, le commissaire n’avait plus entendu un seul bruit provenant du couloir. Il avait plusieurs fois collé son oreille à la porte, mais un silence de mort régnait de l’autre côté. Il était convaincu que Haslinger était déjà au courant de son arrestation, qu’il travaillait dès à présent à imposer silence à la princesse et qu’il n’allait pas se contenter de la tuer, mais qu’il commencerait par abuser d’elle.
    Aussi bizarre que cela paraisse, Tron s’effondra malgré cette réflexion qui aurait dû le tenir éveillé. Il dormit à peu près trois heures et dès qu’il eut ouvert les yeux, il sut ce qu’il avait à faire.
    Tout d’abord, il posa le tabouret sur la planche. Puis il monta sur le siège et prit sa respiration. Il leva les deux bras, appuya les mains contre le bord en bois de la lucarne et poussa de toutes ses forces. La fenêtre s’ouvrit d’un coup, comme sous l’effet d’une explosion. De la neige s’engouffra à l’intérieur – pas en masses compactes, mais en fine poudre qui se répandit sur le sol.
    À la première tentative d’évasion, Tron faillit tomber par terre car son manteau était resté accroché au bat-flanc. Ce n’est qu’au second essai qu’il parvint à passer le buste à travers l’ouverture afin de poser les deux coudes sur le rebord. Ensuite, il se hissa tout entier et s’allongea sur le pan de comble. Alors, il se retourna et commença à ramper vers le haut. Une fois sur le faîte, deux mètres au-dessus, il s’assit avec prudence et regarda autour de lui.
    Le ciel au-dessus de la ville et du palais des Doges semblait suspendu à hauteur de mât. La neige qui tombait sans interruption formait comme un voile d’épaisse soie grise. Tron

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