Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L’impératrice lève le masque

L’impératrice lève le masque

Titel: L’impératrice lève le masque Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
Vom Netzwerk:
garder pour elle-même. Il y a en effet une alternative et elle se demande pourquoi elle n’y a pas songé plus tôt. La seule chose dont elle ait besoin, c’est d’un peu de ouate, une paire de chaussures plates, une robe noire et un châle en laine. Elle doute que cette idée ravisse les Königsegg, mais plus elle y réfléchit, plus ce plan lui plaît.
    Il ne devrait pas être difficile de quitter le palais. Il sera vraisemblablement plus compliqué d’y rentrer, d’autant que sur les instructions de Toggenburg, on a augmenté le nombre des sentinelles. Par chance, Élisabeth sait où Königsegg range les feuilles mi-format en papier ministre sur lesquelles figurent les armoiries de son époux, qui sont aussi les siennes. Elle inscrira le nom d’une de ses cousines mariées et signera elle-même le laissez-passer.
    Le récital auquel les Königsegg assistent ce soir au Malibran commence à huit heures. Sissi estime qu’ils devraient quitter le palais vers sept heures. Donc, elle dispose d’au moins trois heures pendant lesquelles personne ne peut la déranger. C’est suffisant pour la petite répétition qu’elle voudrait entreprendre avant de leur faire part de son projet. Si le temps se maintient, elle mettra un manteau en laine tout simple qu’elle a rapporté de Madère, de vieilles bottines et une méchante toque en fourrure. Elle ne sait pas encore si elle prendra des gants ou un manchon.
    1 - Petit restaurant, auberge. ( N.d.T. )

20
    En chemin vers le presbytère, Tron se demanda ce qui avait pu le pousser à prendre la photographie pour la rendre en personne au père Tommaseo. Parce qu’il n’arrivait pas à se débarrasser du sentiment que quelque chose clochait ? Que c’était une sorte de trompe-l’œil qu’il suffisait d’examiner assez longtemps pour y découvrir un secret qui échappait à première vue ?
    Était-ce un hasard que le conseiller aulique et le prêtre aient emprunté le même bateau la veille ? Ou existait-il entre eux un lien qu’il convenait de tirer au clair ? Tron avait des collègues qui refusaient de croire au hasard. Ce n’était pas son cas. Le fait que Tommaseo et Hummelhauser aient pris le même bateau n’était pas forcément un indice, mais cela ne pouvait pas faire de mal, pensa-t-il, de poser quelques questions au révérend père.
    Le ciel s’était à nouveau couvert quand il atteignit le rio San Trovaso, une demi-heure après être sorti de chez Sivry. Il traversa le petit pont et fit le tour de la modeste église qui se dressait sur l’autre rive avant d’atteindre le presbytère. Il tira sur la tige en métal qui pendait près de la porte et attendit.
    Dès le premier coup de sonnette, une femme sans âge vêtue d’un tablier parfaitement amidonné et d’un bonnet blanc vint lui ouvrir. Son visage était d’une pâleur inquiétante, presque aussi blanc que sa coiffe. On aurait dit qu’elle sortait peu, voire jamais à la lumière du jour. Ses petits yeux rougis dévisagèrent l’inconnu avec méfiance.
    — Vous désirez ?
    — J’aimerais parler au père Tommaseo, répondit Tron qui ne savait que penser de cet accueil.
    — Puis-je vous demander qui vous êtes ?
    — Commissaire Tron. Du quartier de Saint-Marc.
    — Et de quoi s’agit-il ?
    — Je préférerais en parler au père Tommaseo en personne, répliqua-t-il cette fois.
    La femme l’examina de nouveau et en vint manifestement à la conclusion qu’il ne représentait aucun danger.
    — Eh bien, entrez !
    Elle se retourna, partit en lui laissant le soin de fermer et, arrivée au bout d’un long couloir obscur, frappa à une porte.
    — Entrez ! le convia-t-elle sans la moindre ironie. Père Tommaseo ne cesse de répéter que sa porte est ouverte à tout le monde…
    Le prêtre était en train d’écrire à son bureau. Dès que Tron pénétra dans la pièce, il redressa la tête, se leva et vint vers lui. Il tendit en souriant sa grande main poilue, quoique son regard restât impassible. Pour quelqu’un d’aussi grand et aussi large d’épaules, sa poignée de main était d’une étonnante douceur. Il pouvait avoir une petite soixantaine d’années. D’épais cheveux gris lui tombaient dans le cou en vagues élégantes. Il avait un nez grand et charnu qui pointait vers une bouche pleine et sensuelle. Cependant, son visage était empreint d’une expression d’inflexibilité qui rappelait à Tron les traits de Savonarole.
    — Bonjour, dit le prêtre. Que puis-je faire

Weitere Kostenlose Bücher