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L’impératrice lève le masque

L’impératrice lève le masque

Titel: L’impératrice lève le masque Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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pour s’adresser à Toggenburg.
    — Et vous, trouvez-vous cette histoire plausible ?
    — Du moins expliquerait-elle pourquoi Pergen vous a aussitôt retiré l’affaire. Le projet d’attentat ne m’a jamais convaincue.
    Elle le regarda avec attention.
    — Vous partez quant à vous de l’idée que Grillparzer a tué son oncle sur l’ordre du colonel ?
    — Oui. Si Pergen était arrivé à temps, il n’aurait rien eu à craindre. Mais le conseiller est parti pour Venise un jour plus tôt que prévu, et au lieu de l’armée, Landrini a fait prévenir la police de Saint-Marc.
    — C’est pourquoi vous êtes arrivé sur les lieux avant le colonel ?
    — Oui, il ne s’y attendait pas. Il a donc armé ses batteries pour se débarrasser de moi.
    — Vous voulez parler de l’attentat ? devina-t-elle. Il a vu le nom de Pellico sur la liste, et comme il était au courant de la procédure entamée contre lui à cause de cette publication scientifique, il a inventé cette histoire de toutes pièces. Ensuite, il a fait arrêter le directeur de l’Institut pour montrer qu’il avait raison et gagner du temps. Il n’avait à coup sûr pas prévu que Pellico se pendrait dans sa cellule, mais pour lui, c’était une aubaine.
    — Et cela aurait pu marcher, enchaîna Tron. Il ne pouvait pas deviner que je vous rencontrerais et que, deux jours plus tard, je tomberais par hasard chez Sivry sur la photographie de Hummelhauser et de Ballani. Grillparzer n’avait pas une raison de tuer son oncle, mais deux . Tout cela s’emboîte à merveille.
    — Vous oubliez toutefois un détail.
    — Que voulez-vous dire, princesse ?
    — Je veux parler de la jeune femme. Un homme qui a l’intention de commettre un crime n’embarque pas avec un témoin.
    — Pourquoi pas ? répliqua-t-il. Grillparzer pourrait très bien l’avoir prise à bord pour se procurer un alibi : « Non, monsieur le juge. Le sous-lieutenant a passé toute la nuit avec moi dans la cabine. »
    La princesse secoua la tête.
    — Personne ne l’aurait crue.
    — Et qu’en déduisez-vous ?
    — Que ce n’est sans doute pas Grillparzer qui a tué la jeune femme.
    — Mais si ce n’est ni l’oncle, ni le neveu – qui était-ce ?
    Son interlocutrice lui jeta un coup d’œil qu’il fut incapable d’interpréter.
    — Quelqu’un d’autre… Un passager qui a payé une fille, l’a brutalisée et l’a ensuite étranglée. Constatant qu’il ne pouvait pas jeter le corps par-dessus bord, il l’a déposé dans la cabine du conseiller.
    — Comment pouvait-il savoir que celui-ci était mort et que sa cabine n’était pas fermée à clé ?
    La princesse haussa les épaules.
    — Je suis bien en peine de vous le dire, commissaire. Mais je suis persuadée que ce n’est pas Grillparzer qui a tué la jeune femme.
    — Cela signifierait, continua Tron en pesant chacun de ses mots, qu’au cours de cette nuit-là, il y a eu deux crimes qui n’avaient au départ rien à voir l’un avec l’autre.
    — Exactement.
    Puis elle demanda sans détour :
    — La jeune femme portait-elle des traces de morsures ?
    Tron ne put cacher sa surprise.
    — Comment le savez-vous ?
    — C’est une pure supposition. Mais il y a six mois, un crime comparable a été commis à la gare de Gloggnitz à Vienne. La jeune fille avait été attachée et étranglée et elle portait des traces de morsures.
    — A-t-on arrêté l’auteur du crime ?
    — Il faut que vous demandiez cela à vos collègues de Vienne. Je suis juste au courant de cet assassinat parce que j’étais dans la capitale au mois d’août. Les journaux ne parlaient que de cela.
    — Les trains pour Trieste partent de la gare de Gloggnitz, remarqua Tron d’un air songeur. Je vais aller m’entretenir avec Moosbrugger. Il doit connaître le nom de cet homme, lui.
    La princesse lui adressa un regard imperturbable.
    — Vous pensez que le chef steward va parler ?
    — J’espère, répondit Tron.
    Mais ils ne pouvaient quand même pas parler tout le temps du crime ! Il posa donc sa main droite sur la balustrade recouverte de velours et constata avec satisfaction que la princesse ne faisait pas mine de retirer la sienne. Il essaierait plus tard de glisser le bout de ses doigts sous les siens ou du moins – si cela était trop audacieux – d’effleurer son auriculaire.
     
    Trois heures plus tard, ils attendaient la gondole de la princesse sur l’embarcadère de La Fenice. Tron essayait de se souvenir de la titillation

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