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L'inconnu de l'Élysée

L'inconnu de l'Élysée

Titel: L'inconnu de l'Élysée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Péan
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processus par lequel le système en place à Bagdad se fissurait ; Saddam Hussein était déjà à genoux et allait tomber tout seul », estime encore aujourd'hui Jacques Chirac.
    À la fin de l'année 2002, l'Élysée est-il épaulé à cent pour cent par les deux administrations les plus concernées, le Quai d'Orsay et la Défense ? Certains, au Quai d'Orsay, sont convaincus qu'un clash avec l'Irak est inévitable et que les troupes françaises se joindront in fine aux GI's pour envahir ce pays. Dans un article de Foreign Affairs , James Rubin raconte que Villepin assure en privé que la France rejoindra la coalition militaire en cas de provocation du gouvernement irakien, même si une seconde résolution est bloquée par la Russie et/ ou la Chine. Quant à l'état-major, il se prépare pour le cas où, malgré tout, la France se joindrait à la coalition. Le général Jean-Patrick Gaviard se rend secrètement à Washington, le 16 décembre, pour préparer avec le Pentagone une éventuelle participation militaire de la France à une intervention en Irak 9 . Au début de l'hiver, les Américains ont déjà déployé 100 000 hommes dans le Golfe, une forte armada composée de deux porte-avions, 51 bâtiments, 600 avions de combat, une centaine d'hélicoptères et 700 chars. Le 24 décembre, un ordre de mobilisation est envoyé à des dizaines de milliers de soldats et de réservistes.

    « En décembre 2002, raconte aujourd'hui le chef de l'État, le déploiement des forces américaines à proximité de l'Irak indiquait bien que les États-Unis étaient en train de préparer la guerre. J'ai envoyé le 13 janvier Maurice Gourdault-Montagne à Washington pour y rencontrer Condoleezza Rice, qui était alors conseillère du président Bush. Elle a déclaré à Gourdault-Montagne que “seul le départ de Saddam Hussein arrangerait les choses, sinon on le ficherait dehors” !
    – Tout était donc plié, à cette époque ?
    – Tout était plié… On a alors tout fait pour expliquer aux Américains que c'était une erreur de se lancer dans cette guerre qui allait provoquer l'éclatement de l'Irak et avoir des conséquences dramatiques pour l'ensemble du Moyen-Orient : “Vous dites que vous voulez la démocratie ? Très bien. La démocratie, c'est les élections. Si vous voulez la démocratie, il faut procéder à des élections, et s'il y a des élections, ce sont les Chiites qui vont gagner, parce qu'ils sont les plus nombreux. Et les Chiites au pouvoir en Irak, ça n'est pas la démocratie : donc votre raisonnement ne tient pas !…” J'ai répété trente-six fois à Bush qu'il commettait une erreur monumentale et qu'il fallait laisser travailler les inspecteurs. Leur travail allait miner le pouvoir de Saddam qui allait finir par se désagréger d'une façon ou d'une autre. Les Américains n'ont pas voulu me croire. Ils n'ont pas résisté à la tentation de dissoudre l'armée régulière irakienne à propos de laquelle j'ai protesté : sur quoi le gouvernement de ce pays allait-il s'appuyer ? L'armée aurait été tout à fait d'accord, elle se serait alignée sur qui on voulait… On a eu de fortes divergences de vues à propos de l'application de la résolution 1441 ! »
    Le président oublie de mentionner que le 7 janvier 2003, en opposant une réponse négative à une requête de l'état-major relative à certains préparatifs visibles, comme des demandes de visas et des autorisations de passage de navires de guerre par le canal de Suez, il rendait impossible un engagement militaire français aux côtés des GI's.
    Le 17 janvier, alors que les responsables américains s'énervent de plus en plus contre Paris, que Donald Rumsfeld, qui a toujours été opposé au retour des inspecteurs en Irak, montre du doigt la « vieille Europe », par opposition aux pays de l'Est européen qui soutiennent les États-Unis, les deux responsables des inspections, Blix et El Baradei, rendent visite à Jacques Chirac et, lors de la conférence de presse qui suit leur rencontre, remercient le président français : « Je crois que le rôle de la France a été essentiel. La France a été au cœur du processus pour s'assurer du désarmement de l'Irak par le passé, et continuera de l'être dans les semaines et les mois qui viennent », explique El Baradei. De quoi exaspérer un peu plus les néocons de Washington qu'agace de surcroît le rapprochement entre Gerhard Schröder et Jacques Chirac. Durant

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