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L'Insoumise du Roi-Soleil

L'Insoumise du Roi-Soleil

Titel: L'Insoumise du Roi-Soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Riou
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Ministres, des Finances ? Chaque matin il est pris par une séance dont celle du vendredi porte sur sa dévotion. Son confesseur y est convoqué. Ce vaste sujet leur prendra la matinée et préparera le monarque à la messe qu’il suit tous les jours. Avant d’entendre le sermon de Bourdaloue ou de Bossuet dans lequel il sera rappelé qu’il est roi, mais aussi pécheur et serviteur de Dieu, il n’aura que le temps de rendre une visite à sa famille ou à l’une de ses marquises. Et ce n’est pas le bon moment pour le déranger. Après la messe, où, seul, face à sa conscience, il aura réfléchi sur les péchés de la chair et de l’orgueil, il s’occupera à un repas cérémonieux où l’intimité se conjuguera avec la compagnie de ses courtisans. Ces derniers l’accompagneront encore pour chasser ou pour pêcher dans le Grand Canal ou pour admirer, selon un parcours invariable, la beauté domestiquée de la flore des jardins du palais. Alors, prenant congé sans demander la permission, il rejoindra au pas une autre réunion consacrée à Versailles, sa première maîtresse, ou visitera une énième marquise. À moins qu’il ne choisisse d’honorer celle du matin. Et voilà que nous arrivons au Grand Couvert, et bientôt au Grand Coucher. Pour ne pas me répéter, prenez ce que j’ai dit, tournez-le à l’envers. Tirez le rideau ! Le roi dort derrière. Et moi aussi !
    — N’y a-t-il pas une occasion pour se glisser dans un trou où une souris...
    — Non, rompit-il. Le roi ne connaît aucun moment de solitude.
    Le carrosse entrait dans Paris. Nous filions chez la marquise de Sévigné. Il me déposerait, me souhaiterait bonne nuit. Tout serait fini ? Je ne pouvais m’y résoudre. Je repassai dans ma tête la journée du roi. N’existait-il donc aucun moyen de briser le bouclier de l’étiquette ? Pauvre Louis XIV ! Jamais seul, mais à jamais solitaire. Pourtant, le marquis de Penhoët avait employé ces mots : être seul . Non, il s’agissait d’autre chose et cela avait un rapport avec...
    — Sa conscience ! criai-je.
    Le marquis faillit tomber de la banquette.
    — Qu’arrive-t-il ? La peste ? Les loups ? Une Fronde ?
    — Il est un moment où le roi est seul !
    — Allez-vous m’apprendre ce que Louvois, Colbert et La Reynie ignorent ?
    — Quand il va à la messe, il se retrouve seul, face à sa conscience. Il n’est qu’un pécheur devant Dieu. Vous l’avez dit. Eh bien ! je saisirai ce moment pour lui parler.
    Le marquis éclata de rire.
    — Vous vous moquez, fis-je tristement et agacée. Mais pourquoi ? La chapelle où se rend le roi est-elle mieux gardée que le tombeau de saint Louis ?
    Il fit non de la tête. Il s’étouffait au point de ne pouvoir rien dire.
    — Il s’y rend en solitaire. C’est bien cela ? Répondez-moi, je vous en prie...
    — Au contraire, Hélène ! fit-il enfin. Et votre innocence est pour moi un plaisir.
    — Au moins, expliquez-moi comment le roi est seul et ne l’est pas !
    — Il est face à lui-même, mais entouré par la cour qui l’accompagne au grand complet.
    — Voulez-vous dire que les courtisans le suivent jusqu’à la messe ?
    — Sa dévotion, encouragée par la marquise de Maintenon, ne cesse de grandir. Pour lui plaire, on se plie à cette règle. Mais croyez-moi, la messe est une obligation dont on se passerait si le roi n’y était pas.
    Je n’en entendais pas assez pour me faire capituler :
    — Vous dites que s’ils n’y étaient pas obligés, les courtisans ne suivraient pas le roi dans sa chapelle ?
    — Au moins, nous voilà en accord sur un point. Je prends tous les paris que la plupart d’entre nous ne vient que pour satisfaire le roi. L’état de grâce n’en taquine que peu.
    Il porta la main au front et, de nouveau, ferma les yeux :
    — Ce qui, par l’action des jésuites, n’est plus le cas du roi, fit-il sombrement.
    — Madame de Sévigné partage votre avis. Elle s’étonne de ce changement.
    — Moi, il m’inquiète. Chaque jour, Louis le Quatorzième s’enfonce plus dans la prière. Sa conscience le ronge et La Chaise, son confesseur, est devenu son premier conseiller.
    Je ne pus m’empêcher de vouloir vérifier les thèses de la marquise :
    — Cette attitude nouvelle remonte à quand ?
    Il réfléchit avant de répondre :
    — L’Affaire des Poisons y est pour beaucoup. Et depuis que la cour est installée à Versailles, l’intolérance gagne. Son parti progresse en force.
    Deux avis valent

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