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L'Insoumise du Roi-Soleil

L'Insoumise du Roi-Soleil

Titel: L'Insoumise du Roi-Soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Riou
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foule, mais on l’arrêta.
    — N’allez pas plus loin ! dit un gentilhomme.
    — Qu’y a-t-il ? demanda-t-elle d’une voix forte.
    — Le fantôme a encore frappé ! lança un autre.
    — Mais qui ? hurla la marquise.
    — Le marquis de Penhoët. Voilà une heure, on l’a tué dans le Labyrinthe.
    À cette nouvelle, je sentis mes jambes se dérober. En m’effondrant, ma tête rebondit violemment sur le sol et je sombrai dans le noir.
    La peur avait changé de camp.

    Je voyais deux yeux globuleux et un long nez sortir de l’onde ténébreuse du Grand Canal. L’eau se troublait et m’engloutissait. Je dus effectuer plusieurs allers-retours comme celui-là avant de reconnaître La Reynie. Et tout revint. Je voulus me lever, mais le lieutenant de police me prit fermement aux épaules pour me maintenir allongée. Je hurlais. Je forçais sa poigne. Je crois même qu’il reçut quelques coups de pieds et deux ou trois gifles, mais ce bonhomme cachait une force incroyable. Je dus céder. Et entendre ce qu’il avait à me dire :
    — Calmez-vous. Vous êtes restée longtemps inanimée. Si vous continuez, je vous envoie Félix de Tassy, le chirurgien du roi, pour qu’il vous saigne. Maintenant, je vais vous lâcher et vous garderez votre calme. Peut-on signer ce pacte ?
    Je secouai la tête en signe d’assentiment. Il lâcha sa prise.
    J’étais dans son bureau, allongée sur une paillasse qui empestait la sueur.
    — Votre front, fit La Reynie en touchant le sien.
    En l’imitant, je sentis le linge humide et chaud.
    — Ce n’est rien, murmura-t-il. Vous avez heurté le tranchant d’une pierre en tombant. Le sang ne coule plus.
    — Depuis combien de temps suis-je ici ?
    — Je n’ai pas compté. C’est bientôt l’aube. Il y a peu, vous avez ouvert les yeux. Et vous vous êtes rendormie. J’ai transmis ces nouvelles à ceux qui en demandaient.
    — Madame de Montespan ?
    — La fête est finie, fit-il sombrement. Elle est dans ses appartements. Mais je l’ai rassurée. J’ai cru bon également d’informer la marquise de Sévigné. Elle a voulu rester auprès du corps du marquis de Penhoët.
    Je souffrais encore de la tête, mon cœur se soulevait et l’air manquait. J’ouvris la bouche pour hurler. Il me reprit aux épaules :
    — Vous m’écoutez. Nous avons arrêté l’assassin. Nous savons pour le fantôme.
    — Pourquoi ! Pourquoi le marquis de Penhoët ? gémis-je en ne pouvant retenir mes larmes.
    — Nous étions d’accord lui et moi. Il devait tendre un piège et connaissait les risques qu’il encourait. Et si vous m’assurez de m’écouter sagement, je vous explique tout.
    En échange d’une promesse que je n’eus aucun mal à tenir tant je me sentais épuisée, il entreprit le récit des terribles événements qui s’étaient déroulés pendant mon aparté avec madame Montespan. Au départ, il y avait l’idée de Jean-Baptiste : avant d’être tué par les coupe-jarrets, le personnage mystérieux de la rue Mouffetard avait parlé et l’on devait le dire haut et fort, surtout à la cour, pour inquiéter celui qui se savait complice ou coupable de ce crime. Ensuite, le marquis de Penhoët avait proposé à La Reynie de faire courir le bruit d’un rendez-vous ayant trait avec ce qu’avait confié cet homme mystérieux avant de trépasser. En agissant ainsi, le marquis espérait attirer une proie, l’idée étant de faire sortir de l’ombre le criminel ou celui qui le dirigeait. Ainsi s’expliquait sa déclaration tonitruante à la table de Hoca.
    — Il n’avait donc personne à rencontrer ? ne puis-je m’empêcher de demander.
    — Non. C’était un leurre pour attirer celui que nous cherchions et qui devait se cacher à la cour, car, pour agir aussi librement, il possédait ses entrées à Versailles ou peut-être même y logeait. Et il convenait de le débusquer.
    Ses paroles me revinrent : j’ai rendez-vous et c’est tout comme un fantôme... Une ombre... Et si je mets la main dessus...
    — Il a joué le rôle de l’appât ! hurlai-je alors que les larmes revenaient.
    — Nous n’avions plus une piste. Le marquis de Penhoët avait sondé les proches de la vicomtesse de Lancquet. Tous baissaient les yeux et faisaient mine de ne pas la connaître. Et plus il interrogeait, plus il avouait que nous errions dans le brouillard... Marinvaud ? L’espoir était minuscule, et c’est encore le marquis de Penhoët qui m’a convaincu de poser cette dernière carte. Il

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