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L'Insoumise du Roi-Soleil

L'Insoumise du Roi-Soleil

Titel: L'Insoumise du Roi-Soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Riou
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ce que vous ferez de votre victoire. Il s’est rendu à vous, soumis, conquis et amoureux. Vous, qu’en pensez-vous ? Manifesterez-vous cet esprit de pardon et de tolérance qui nous fait défaut à Versailles et dont vous prétendez être le héraut ? À l’inverse, resterez-vous sur vos gardes, refusant de rendre son honneur à un homme qui le désire sincèrement et le mérite autant ? En somme, laisserez-vous passer votre bonheur ?
    Ses yeux montraient de la douceur. De toutes ses forces, il voulait que la conclusion soit bonne. Pour une fois que l’enquête s’achève heureusement. Moi, je pensais aux prédictions de la sorcière. Il me faudrait prendre un peu de malheur et donner un peu de mon bonheur.
    — Au revoir, monsieur La Reynie, lui dis-je simplement.
    — Adieu, sans doute, me répondit-il, car nous avons peu de chances de nous revoir.
    — Il faudra faire le déplacement à Saint Albert. Je ne crois pas rester longtemps à Paris. Et encore moins à Versailles. Ce monde n’est décidément pas pour moi.
    — Quand votre père se rendra à Paris, j’aurai plaisir à saluer. Dites-lui, s’il vous plaît...
    — Je lui ferai part de tout ce que nous vous devons.
    Il roula ses yeux énormes.
    — Mais, ajoutai-je, je garderai pour moi nos conversations et nos secrets.
    — Songez surtout à ce que je vous ai dit à propos de la tolérance et du pardon. Le reste, oubliez-le. Vous êtes trop jeune pour vous encombrer de ces souvenirs que je porterai seul. Car n’est-ce pas la mission du serviteur de l’État ?
    Il sourit et s’inclina en claquant des talons :
    — Transmettez mon souvenir à la marquise de Sévigné.
    Déjà, il remontait dans son carrosse. Et je crus à un adieu. Mais chaque jour, jusqu’au dernier, je me souvins des paroles de La Reynie.
    SINGULIERS, DIFFÉRENTS... MAIS UNIS.
    1 - La Chaise ou La Chaize. Les deux orthographes s’emploient. Le célèbre cimetière parisien du Père-Lachaise lui doit son nom. Il fut créé sur l’emplacement d’un jardin qu’il possédait.

Épilogue
    J’avais choisi ce symbole – deux hommes se soutenant – pour illustrer mon aventure. Et je ne le regrette pas. Le juste équilibre est une combinaison adroite. Un être en vaut un autre. Il s’agit de défendre la tolérance en reconnaissant les mérites de chacun. Car l’alchimie qui cimente une société est un art délicat à manier. Et l’on doit affronter un long chemin pour apprendre à vivre ensemble, singuliers et différents, mais unis par des valeurs communes.
    Les paroles du lieutenant de police sonnaient dans ma tête et j’y réfléchis longtemps, et même douloureusement avant de me décider à retrouver François pour ce qui débutait peut-être comme un adieu. Mais en le revoyant, je me suis abandonnée au bonheur qu’il suppliait et rêvait de m’offrir. Et je lui ai ainsi apporté la preuve qu’il pouvait croire en moi. En retour, il s’est résolu, mêlant les larmes et les caresses à sa confession. Plus tard, en nous éveillant, nos regards avaient choisi pour nous.
    Depuis, quand le jour finit, je me souviens de La Reynie qui parlait juste. La tolérance fait route à mes côtés et s’accorde à ma fortune. Sans doute est-ce pourquoi nous n’avons, François et moi, jamais connu le malheur. Hélas, ce n’est pas vrai pour tant d’autres. Car nous venons d’un temps où la peur empêcha la fusion des hommes et des femmes dans un même corps.

    Nous rentrâmes à Saint Albert dans les jours qui suivirent les événements que je viens de décrire. Si Jean-Baptiste était seul, la chambrière de la marquise de Sévigné n’ayant pas succombé aux charmes de notre héros, j’allais en compagnie de François de Saint Val. Nous parlions d’un simple séjour pour rencontrer mon père et François le comprenait. Pour finir, nous restâmes trois années en Anjou. L’Éden de mon enfance l’avait séduit. Dedans s’y mêlaient mon père, Berthe, notre curé et tous les gens de Saint Albert qui furent conviés à notre mariage. Nous eûmes un premier fils qui réconcilia mon père avec l’envie d’exister. Puis une fille qui combla la tendresse de Berthe. Et nous aurions pu vivre ainsi, baignant dans la félicité à laquelle nous nous accrochions, en tentant de ne pas entendre que notre liberté s’épuisait.
    Mon père ne retourna pas à Versailles. Ce fut sa noble façon de montrer notre insoumission. Le roi lui en voulut. Mais notre cas comptait-il ?

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