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Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)

Titel: Lionel Lincoln (Le Siège de Boston) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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répondre avec un peu de chaleur, mais l’officier général qui accompagnait Howe ne lui en donna pas le temps.
    – Par les ailes que Mercure porte aux talons, s’écria-t-il en riant, c’est le même paillasse qui a fait le saut périlleux du haut de Copp’s-Hill, et dont je vous ai déjà parlé ! Suis-je dans l’erreur, Lincoln ? N’est-ce pas ce philosophe braillard dont les sentiments étaient si élevés le jour de la bataille de Breeds, qui voulut prendre son vol comme Icare, mais qui, moins heureux que son modèle, tomba sur la terre ferme ?
    – Je crois que votre mémoire est fidèle, Monsieur, répondit Lionel en souriant : son idiotisme le jette souvent dans l’embarras.
    Burgoyne tira légèrement le bras du général, sous lequel le sien était passé, comme s’il eût cru que l’être misérable qu’ils avaient devant les yeux ne méritait pas de les occuper plus longtemps, quoique, dans le fait, ce fût dans l’intention d’empêcher son officier supérieur de donner publiquement le spectacle impolitique du penchant bien connu qu’il avait à pousser à l’extrême ses idées d’autorité militaire. S’apercevant pourtant, à l’air sombre de Howe, qu’il hésitait encore sur ce qu’il avait à faire, il ajouta :
    – Le pauvre diable a été doublement puni par une chute d’une cinquantaine de pieds, et par la mortification qu’il a eue de voir le glorieux triomphe des troupes de Sa Majesté. Je crois que c’en est bien assez pour lui obtenir son pardon.
    Howe céda insensiblement à la pression du bras de Burgoyne, et ses traits durs se relâchèrent au point de laisser paraître un sourire à demi-ironique, quand, se détournant, il dit à Lionel :
    – Faites attention à votre connaissance, major Lincoln, car, quelque fâcheuse que paraisse sa situation, elle pourrait devenir pire. De pareils propos ne peuvent se tolérer dans une place assiégée. Assiégée est le mot, je crois. Les rebelles n’appellent-ils pas cet attroupement de canaille une armée assiégeante ?
    – Ils se sont rassemblés autour de notre quartier d’hiver, dit Lincoln, et je crois qu’ils prétendent…
    – Il faut convenir qu’ils se sont bien conduits sur la hauteur de Breeds. Les misérables coquins se sont battus comme des hommes.
    – Avec courage, et non sans quelque prudence, dit Burgoyne, mais ils ont rencontré des gens qui se battaient encore mieux, et qui avaient plus de science militaire. Entrons-nous dans l’église ?
    Les traits du général anglais reprirent l’expression que la nature leur avait donnée, et il dit avec un ton de complaisance :
    – Allons, Messieurs, nous sommes en retard. Si nous ne nous pressons pas davantage, nous n’arriverons pas à temps pour prier pour le roi, et encore moins pour nous-mêmes.
    Il avait à peine fait deux pas, accompagné de sa suite, quand un nouveau bruit qu’on entendit en arrière annonça l’arrivée d’un autre officier-général. C’était le commandant en second, également accompagné d’un cortège assez nombreux. L’air de satisfaction qu’exprimaient les traits de Howe s’évanouit dès qu’il le vit paraître. Il rendit à Clinton son salut avec une politesse froide, et entra sur-le-champ dans l’église.
    Dès que Burgoyne l’eut vu passer, il s’approcha de Clinton, et, avec la présence d’esprit qu’il conservait toujours, lui fit à l’oreille quelque allusion adroite aux événements de cette même journée qui avait donné naissance à la jalousie du général en chef, et qui l’avait indisposé contre un homme au secours duquel il devait tant.
    Clinton céda à l’influence presque irrésistible de la flatterie, et entra dans l’église avec un contentement intérieur qu’il prit sans doute pour un sentiment plus convenable au lieu et à l’occasion. Tous les groupes d’aides de camp, de secrétaires et d’officiers suivirent l’exemple des deux généraux, et Lionel se trouva encore une fois seul avec l’idiot.
    Depuis le moment de l’arrivée du général en chef jusqu’à celui de son départ, Job était resté dans un état d’immobilité parfaite. Ses yeux étaient fixes, sans être arrêtés sur rien ; sa mâchoire inférieure était abaissée de manière à donner à sa physionomie un air d’aliénation mentale complète. En un mot, on voyait en lui les traits dégradés d’un homme totalement dépourvu du plus faible rayon d’intelligence. Mais quand les

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