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Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)

Titel: Lionel Lincoln (Le Siège de Boston) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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de fourrures qui ne laissaient qu’entrevoir une collerette formée de deux rangs de large dentelle, et le major Lincoln prenait son manteau des mains de Meriton quand la porte s’ouvrit pour annoncer le capitaine.
    – Quoi ! déjà prêts ! s’écria Polwarth en les regardant successivement ; tant mieux ! la ponctualité est le vrai levain de la vie. Une bonne montre est aussi nécessaire au convive qu’à son hôte, et à l’hôte qu’à son cuisinier. Miss Agnès, vos yeux sont terriblement meurtriers aujourd’hui. Si Howe veut conserver ses soldats, il ne faut pas qu’il vous permette d’entrer librement dans son camp.
    Les beaux yeux d’Agnès Danforth étincelaient pendant qu’il parlait ainsi ; mais, les ayant arrêtés un moment sur sa jambe de bois, leur expression s’adoucit sur-le-champ, et elle lui répondit en souriant :
    – Que votre général prenne garde à lui ; je ne sors jamais d’ici sans reconnaître sa faiblesse.
    Le capitaine fit un mouvement expressif avec les épaules, et se tournant vers son ami, lui dit à part à demi-voix :
    – Vous l’entendez, major Lincoln ; depuis qu’on m’a relevé du champ de bataille, comme le dindon qui a été desservi hier après mon dîner, c’est-à-dire avec un membre de moins, je n’ai pu obtenir de cette jeune fille une réponse un peu piquante. Elle est devenue si douce qu’elle ressemble à un morceau de viande sans assaisonnement, et moi, je suis comme une fourchette à deux dents qui n’est propre qu’à découper. Eh bien ! peu m’importe qu’elle me plante là tout à fait à présent qu’elle a perdu ce qui la rendait appétissante. Mais allons-nous à l’église ?
    Lionel parut un peu embarrassé. Il tenait un papier à la main, et il hésita un instant avant de le remettre à son ami, le priant de le lire.
    – Qu’avons-nous là ? dit Polwarth. Et il lut ce qui suit : « Deux officiers, blessés dans la dernière bataille, désirent rendre grâces au ciel de leur guérison. »
    – Deux ! s’écria-t-il ; hem ! Vous, sans doute ; et qui est l’autre ?
    – J’avais espéré que ce serait mon ancien compagnon, mon camarade d’études.
    – Ah ! moi ! s’écria Polwarth levant involontairement sa jambe de bois et y jetant un regard de regret ; croyez-vous, Lionel, qu’un homme ait un motif bien particulier pour rendre grâces au ciel d’avoir perdu une jambe ?
    – Un plus grand malheur aurait pu arriver.
    – Je n’en sais rien, dit Polwarth avec un peu d’obstination si elles avaient été emportées toutes les deux, il y aurait eu plus de symétrie, et c’est ce qui flatte d’abord dans un dîner bien ordonné.
    – Vous oubliez votre mère, continua Lionel, comme si son ami n’avait point parlé ; je suis sûr qu’elle rendra grâces au ciel que cette bataille ne vous ait pas coûté plus cher.
    Polwarth toussa deux ou trois fois, porta la main sur son front et sur ses yeux, jeta à la dérobée un autre coup d’œil sur la jambe qui lui restait, et dit d’une voix un peu émue :
    – Oui, oui, je crois que vous avez raison ; une mère aime son enfant quand même il serait haché aussi menu que chair à pâté. Le beau sexe acquiert ce sentiment généreux quand il a passé la quarantaine. C’est à vos jeunes filles qu’il faut des proportions et de la symétrie.
    – Vous consentez donc que Meriton remette la requête comme vous venez de la lire ?
    Polwarth hésita encore un instant, mais il se souvint de sa mère, de sa mère si éloignée de lui, et son cœur s’ouvrit à la sensibilité, car Lionel avait touché juste.
    – Certainement, certainement, dit-il, il aurait pu m’en arriver autant qu’au pauvre Mac. Oui, demandez pour deux ; ce sera bien le diable si je ne trouve pas un genou à plier en cette occasion. D’ailleurs, Lionel, quand une certaine jeune personne verra que je puis faire chanter un Te Deum pour mon aventure, elle cessera peut-être de me regarder comme un objet de pitié.
    Lionel lui fit un signe de tête en silence, et le capitaine se tournant vers miss Danforth, lui présenta la main pour la conduire à son tompung, avec un air de fierté qu’il affectait pour montrer combien son âme était supérieure aux accidents de la guerre. Cécile prit le bras du major Lincoln, et tous quatre furent bientôt placés dans le modeste équipage qui les attendait.
    Jusqu’à ce jour, qui était le second dimanche depuis ce qu’on

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