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Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)

Titel: Lionel Lincoln (Le Siège de Boston) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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précisément où j’en voulais venir. Oui, mon cher, je suis amoureux.
    – Voilà ce qui me surprend.
    – Mais ce qui vous surprendra bien plus encore, c’est que je voudrais bien en venir au mariage.
    – Pour le coup, il faut que ce soit une femme peu ordinaire pour inspirer de semblables désirs au capitaine Polwarth, du 47 e , et de Polwarth-Hall !
    – C’est une femme charmante, major Lincoln, dit l’amant gastronome avec une gravité soudaine, qui contrastait avec son ton habituel. Pour la taille, on peut dire qu’elle est faite au tour. Quand elle est pensive, elle marche avec la gravité d’un coq de bruyère ; quand elle court, c’est avec la légèreté d’une perdrix ; et quand elle est en repos, je ne saurais la comparer qu’à un plat de venaison, plein de goût et de saveur, dont ou ne saurait jamais avoir assez.
    – Vous m’avez fait, pour me servir de vos métaphores, un portrait si appétissant de la personne, que je brûle de connaître aussi son caractère.
    – Mes métaphores ne sont pas toujours très-poétiques, mais ce sont les premières qui se présentent à mon esprit, et du moins elles sont prises dans la nature. Ses qualités surpassent encore de beaucoup ses attraits. D’abord elle a de l’esprit ; ensuite elle est impertinente en diable ; enfin, c’est la petite traîtresse la mieux conditionnée envers le roi George qu’il y ait dans tout Boston.
    – Singulière recommandation auprès d’un officier de Sa Majesté.
    – Sans doute, mon cher, la plus infaillible de toutes. C’est comme une sauce piquante qui réveille l’appétit et donne aux mets plus de saveur. Sa trahison, voyez-vous (car ce n’est rien moins en vérité), est une espèce d’acide qui sert à donner encore plus de force à mon dévouement, et son esprit piquant, se mêlant à la douceur de mon caractère, forme une sorte de combinaison agréable, qui rappelle assez la composition d’un sorbet.
    – Il y aurait folie à moi de vouloir contester les charmes d’une semblable femme, reprit Lionel qui s’amusait beaucoup du ton tout à la fois grave et comique du capitaine ; mais parlons un peu de ses relations avec l’infanterie légère. Ne serait-elle pas aussi des troupes légères de son sexe, Polwarth ?
    – Excusez-moi, major Lincoln, je ne saurais plaisanter sur ce sujet. Miss Danforth est de l’une des meilleures familles de Boston.
    – Miss Danforth ! ce n’est sûrement pas d’Agnès que vous voulez parler ?
    – D’elle-même, s’écria Polwarth avec surprise ; comment diable la connaissez-vous donc ?
    – Oh ! simplement parce qu’elle m’est tant soit peu cousine, et que nous habitons la même maison. Nous sommes parents à un égal degré de Mrs Lechmere, et la bonne dame a voulu que j’acceptasse un logement chez elle dans Tremont-Street.
    – Parbleu ! j’en suis charmé ; pour cette fois nos relations pourront avoir un but un peu plus honorable que de boire et de manger. Mais venons-en à l’objet en question. Il courait certains bruits sur ma corpulence que j’ai cru prudent d’arrêter dès le principe.
    – Pour cela vous n’aviez qu’à paraître plus mince.
    – Et ne trouvez-vous pas que je le parais en effet dans cet uniforme plus convenable ? Mais, pour vous parler sérieusement, Lionel, car je puis m’ouvrir librement à vous, vous savez quels gaillards nous sommes dans le 47 e  ; qu’on vous donne encore un sobriquet ridicule, vous l’emportez au tombeau, quelque fâcheux qu’il puisse vous paraître.
    – Assurément il est un moyen d’imposer silence aux méchantes langues, dit Lionel d’un ton grave.
    – Oui, sans doute ; mais, bah ! un homme n’aime pas à aller se battre pour une livre de graisse de plus ou de moins. Tout dépend au reste des premières impressions, et ce sont celles qu’il faut chercher à détruire. Mais qui croirait, je vous le demande, à moins d’être de force à croire que le grand Caire est un village, et que le grand Turc et le grand Mogol sont des petits garçons, qui croirait, dis-je, sur un simple ouï-dire, que le capitaine Polwarth, de l’infanterie légère, pèse cent quatre-vingts livres !
    – Allons, vous pouvez bien en ajouter encore une vingtaine.
    – Pas une de plus, je vous jure. J’ai été pesé en présence de tous mes camarades, pas plus tard que la semaine dernière, et depuis lors j’ai bien dû perdre encore une once, car tous ces levers de bonne

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