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Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)

Titel: Lionel Lincoln (Le Siège de Boston) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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autant. Une marche de nuit, point de déjeuner, un soleil brûlant, je ne sais combien de milles, point de halte, et toujours feu  ! feu  ! Croire qu’un homme puisse endurer tant de fatigues, c’est ce qui est contraire à tous les principes de physique et même d’anatomie.
    Lionel tâcha d’encourager son ami à faire de nouveaux efforts ; mais de nouvelles attaques étant survenues en ce moment, il se tourna vers les soldats, leur parla d’un ton martial et encourageant, et ils coururent contre leurs ennemis en poussant de grands cris. Les Américains n’étaient pas encore assez disciplinés pour résister à une charge à la baïonnette, et ils cédèrent toujours, quoique non sans se défendre.
    L’avant-garde s’étant remise en marche, Lionel se détourna pour contempler la scène qu’il laissait derrière lui. Depuis deux heures on marchait en combattant presque sans interruption, et il n’était que trop évident que les forces des Américains augmentaient à chaque instant, et que leur audace croissait comme leur nombre ; des deux côtés de la route, sur les lisières de chaque bois, derrière toutes les haies, toutes les maisons, toutes les granges, des décharges d’armes à feu partaient continuellement, tandis que le découragement se mettait parmi les Anglais, et que leurs efforts devenaient plus faibles de moment en moment. Des nuages de fumée s’élevant sur la vallée dont on venait de sortir, et se mêlant à la poussière occasionnée par la marche, plaçaient un voile impénétrable devant les yeux ; mais lorsque le vent l’entr’ouvrait, on apercevait tantôt des soldats anglais divisés par pelotons et épuisés de fatigues, tantôt repoussant une attaque avec courage, tantôt cherchant à éviter le combat, avec un désir mal dissimulé de changer leur retraite en fuite.
    Le major Lincoln, quelque jeune qu’il fût, connaissait assez sa profession pour voir qu’il ne manquait aux Américains qu’un concert d’opérations et l’unité du commandement, pour effectuer la destruction totale du corps anglais. Les attaques se faisaient avec ardeur ; on combattait quelquefois corps à corps, et le sang coulait des deux côtés ; mais la discipline des troupes anglaises les mettait en état de se défendre encore contre cette guerre d’escarmouches. Enfin ce fut avec un plaisir qu’il ne put cacher que Lionel entendit partir des premiers rangs de l’avant-garde des cris de joie annonçant qu’un nuage de poussière, qu’on voyait en face, était produit par la marche d’une brigade d’élite de l’armée anglaise, qui arrivait fort à temps à leur secours, sous les ordres de l’héritier de la maison de Northumberland. Les Américains se retirèrent quand les deux corps furent sur le point de faire leur jonction, et l’artillerie qu’amenaient les troupes fraîches, tonnant contre les colons dispersés, procura quelques minutes de repos à leurs compagnons. Polwarth s’étendit par terre, tandis que Lionel descendait de cheval près de lui, et son exemple fut suivi par tous ses camarades, qui haletaient de fatigue et de chaleur, comme le daim poursuivi par les chasseurs, et qui a réussi à mettre les chiens en défaut {39} .
    – Major Lincoln, dit le capitaine, aussi vrai que je suis un homme de mœurs simples et innocent de toute cette effusion de sang, je déclare que faire faire une pareille marche à des troupes, c’est abuser des ressources de la nature humaine. J’ai fait au moins cinq lieues depuis ce lieu de discorde, si mal à propos nommé Concorde jusqu’ici, en moins de deux heures, et cela, au milieu de la fumée, de la poussière et de mille cris infernaux qui feraient cabrer le cheval le mieux dressé de toute l’Angleterre, et en respirant un air si brûlant qu’il cuirait un œuf en deux minutes et quinze secondes.
    – Vous exagérez la distance, Polwarth. D’après les pierres milliaires, nous n’avons encore fait que deux lieues.
    – Les pierres ! les pierres mentent. J’ai ici deux jambes qui savent compter les lieues, les milles, les pieds, et même les pouces ; mieux que toutes les pierres du monde.
    – Il est inutile de contester ce point, car je vois que les troupes s’occupent à manger un morceau à la hâte, et nous n’avons pas un moment à perdre pour rentrer à Boston avant la nuit.
    – Manger ! Boston ! la nuit ! répéta lentement Polwarth en s’appuyant sur un coude. Comment ! j’espère qu’il

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