Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)
vous serez pendu. De par le ciel ! je vous emmènerai avec moi en Irlande ; je vous ferai pendre dans l’île Verte, et vous serez enterré, au cœur de l’hiver, dans un marécage !
– Mais qu’a-t-il donc fait qui puisse donner lieu à de si terribles menaces ? demanda Lionel.
– Ce qu’il a fait ! le coquin, n’est pas resté chez lui.
– N’est pas resté chez lui ?
– Sans doute ! Diable ! ne savez-vous pas que tout le pays était rempli de guêpes qui semblaient chercher un guêpier ? Avez-vous la mémoire assez courte, major Lincoln, pour avoir déjà oublié les promenades que ces coquins vous ont fait faire sur les montagnes et dans les vallées ?
– M. Sage a-t-il donc été trouvé aujourd’hui parmi nos ennemis ?
– Ne l’ai-je pas vu tirer trois fois sur moi et en trois minutes ? Une de ses balles n’a-t-elle pas brisé la poignée de mon sabre, et n’ai-je pas encore dans l’épaule un morceau de plomb qu’il appelle une chevrotine et dont ce brigand m’a fait présent ?
– Il est contre la loi d’appeler un homme un brigand sans pouvoir le prouver, dit Job ; mais il n’est pas contre la loi d’entrer à Boston et d’en sortir aussi souvent qu’on le veut.
– Entendez-vous ces misérables ! ils veulent connaître les lois aussi bien et mieux que moi qui suis fils d’un avocat de Cork. Je garantirais que vous étiez avec eux, et que vous méritez la potence tout aussi bien que votre digne compagnon.
– Que veut dire ceci, monsieur Sage ? s’écria Lionel afin d’empêcher l’idiot de faire une réponse qui aurait pu compromettre sa sûreté ; est-il possible non seulement que vous ayez pris part à cette rébellion, mais que vous ayez même attenté à la vie d’un homme qui peut presque passer pour un habitant de votre maison ?
– Je pense que le mieux est de ne pas trop parler, répondit Seth, attendu que personne ne peut prédire ce qui doit arriver.
– Entendez vous le malin réprouvé ? s’écria Mac-Fuse ; il n’a pas même la bonne foi de convenir de ses péchés comme un homme honnête. Mais je lui épargnerai cet embarras. Il est bon que vous sachiez, major Lincoln, qu’étant las d’avoir reçu, depuis le matin jusqu’au soir, les coups de fusil de cette canaille qui couvrait toutes les hauteurs, sans leur rendre leurs politesses, je saisis une occasion qui se présenta pour tourner un parti de ces démons incivilisés. Ce gaillard que vous voyez me lâcha trois coups de fusil avant que nous eussions pu les joindre, et alors l’arme blanche fit justice de ses camarades ; mais celui-ci m’ayant paru avoir une figure patibulaire, je l’ai amené ici dans l’intention de le faire pendre au premier moment favorable.
– Si ces faits sont exacts, dit le major, je crois que nous devons le livrer entre les mains des autorités compétentes ; car il reste encore à savoir quel parti on prendra à l’égard des prisonniers qu’on a faits dans cette affaire singulière.
– Je n’y penserais seulement pas, répandit Mac-Fuse, si ce réprouvé ne m’avait pas traité comme une bête sauvage en tirant sur moi à chevrotines, et s’il ne m’avait pas ajusté chaque fois comme si j’eusse été un chien enragé. Misérable ! osez-vous vous donner le nom d’homme vous qui ajustez un de vos semblables comme si c’était une brute ?
– Ma foi ! dit Seth d’un air sombre, quand on est décidé à se battre, je crois que le mieux est d’ajuster, afin d’épargner les munitions.
– Vous reconnaissez donc que vous êtes accusé avec raison ? lui demanda Lionel.
– Comme le major est un homme modéré, et qui entendra la raison, répondit Seth, je lui parlerai raisonnablement. Je vous dirai d’abord que j’avais une petite affaire ce matin à Concorde…
– À Concorde ? s’écria Lionel.
– Oui, à Concorde, répondit Seth avec l’air de la plus grande innocence, une place à vingt ou vingt-un milles d’ici.
– Au diable vos milles et votre Concorde ! s’écria Polwarth ; y a-t-il un homme dans l’armée qui puisse oublier cette place si mal nommée ? Continuez votre défense, et ne nous parlez pas de la distance ; je l’ai mesurée pouce par pouce {43} .
– Le capitaine est prompt et impétueux, dit le prisonnier avec beaucoup de sang-froid. Enfin, me trouvant dans cette ville, j’en sortis avec quelques compagnons. Au bout d’un certain temps nous voulûmes y rentrer, et,
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