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L'Ombre du Prince

L'Ombre du Prince

Titel: L'Ombre du Prince Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jocelyne Godard
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compte.
    — Un abri ! Mais où vois-tu cet abri ?
Il n’y a que pierres et racines séchées.
    La jeune fille mit sa main en visière.
    — Le vent a dû l’anéantir. Tu as raison,
Thouty, il vaut peut-être mieux faire demi-tour. L’atmosphère de ce lieu
devient trop étrange. Je n’ai jamais vu ces teintes qui nous entourent.
    Ils observèrent le fleuve. Le soleil dardait
une chaleur intense sur la surface de l’eau devenue noire. Mais ses rayons
semblaient inexistants, le disque d’or devenait bronze à force d’y mêler la
grisaille de cet étouffement. Une lumière jamais vue diffusait une onde
bizarre.
    D’ordinaire, les rayons solaires se
reflétaient dans l’eau, mais cette eau-là paraissait terne, opaque, troublée
par une magie néfaste et inhabituelle. D’ailleurs tout semblait éteint, plombé,
flétri, à l’exception du grand bonheur qui envahissait l’âme de Satiah.
    Les jeunes gens s’arrêtèrent. Une lame de vent
balaya leurs visages et Satiah bascula. Thouty la retint dans ses bras. Oh !
Dieu d’Amon ! Comme elle serait volontiers restée là, des heures entières,
contre le buste puissant de son compagnon.
    Mais, la turbulence des événements se précipitait
et ne lui donnait plus l’occasion de savourer son bonheur.
    L’horizon prenait une couleur jaune intense,
profilant le dessin d’une curieuse ligne d’un bleu violacé qui encerclait les
arbres, le ciel, les champs, les roches et la terre elle-même.
    Un oiseau affolé heurta la tête de Thoutmosis
et vint s’écraser à ses pieds. Cette fois, Satiah prit peur. Elle se baissa et
ramassa de ses doigts tremblants l’oiseau mort.
    — Que se passe-t-il, Thouty ?
Crois-tu vraiment que nous devrions rentrer ?
    Une seconde lame de vent, plus puissante, les
renversa l’un contre l’autre, ouvrant une brèche à leurs pieds et déracinant un
jeune acacia qui tentait de hausser quelques branchages verts que la sécheresse
n’avait pas encore entamés.
    — C’est incroyable, murmura le jeune
homme. Le khamsin souffle à nouveau alors que tout indiquait la fin de son
périple. Et regarde ces bandes d’oiseaux agités tourbillonner dans le vent !
    Thoutmosis et Satiah n’arrivaient plus à se
tenir droit. Ils avançaient de quelques pas et tombaient sur le sol, épuisés,
anéantis.
    — Je crois que ton abri serait le
bienvenu. Où est-il ? Ne peux-tu te souvenir ?
    La jeune fille secoua la tête.
    — Tout est changé, Thouty. Les lieux ne
sont plus les mêmes. Là où il y avait des arbres, il n’y a plus rien et là où
tout était vide, il n’y a qu’amas de pierres, de feuilles et de branches
cassées. Qu’allons-nous faire ? Il faut rentrer au plus vite.
    À présent, le vent soulevait une masse immense
de sable et de poussière qui recouvrait leurs visages. De plus en plus
effrayée, Satiah s’accrochait à la taille robuste de Thoutmosis. Une vague de
tempête saisit une nuée de petits oiseaux gris et rouges qui vint s’enrouler
dans un tourbillon de pluie.
    — Oh ! Thouty, je ne reconnais plus
rien. Cet abri a disparu. Nous ne le retrouverons pas.
    — N’aie pas peur, Satiah. Je suis avec
toi. Rien ne peut t’arriver, rétorqua Thoutmosis d’un ton protecteur.
    Une antilope passa près d’eux, telle une
flèche lancée au hasard par un archer malhabile. Elle frôla la cuisse de
Satiah, ne freina pas pour si peu, fila à toute allure et disparut dans un
tourbillon de vent pour réapparaître plus loin, en direction d’un horizon
incertain.
    — Elle fuit autre chose que le khamsin,
assura Thoutmosis. Ces bêtes du désert ne craignent pas le vent.
    — Redouterait-elle un aigle, un vautour ?
murmura sa compagne en levant les yeux au ciel.
    Un ciel qui, à présent, devenait aussi terne
et obscur que l’eau du Nil. Soudain, une volée d’oiseaux vint en plomber
davantage la surface que le vent frisait avec outrance.
    — Non, fit le jeune homme en hochant la
tête, cette antilope redoute plutôt une hyène ou un chacal.
    Puis, il tâta prudemment sa ceinture. Son couteau
y était toujours accroché. Arme bien dérisoire s’ils étaient attaqués par un de
ces animaux sauvages.
    Thoutmosis soupira. Comment pouvait-il prévoir
cet accident de dernière minute ? Quand il était parti, le ciel était
serein, l’eau du fleuve était bleue et, si la sécheresse désolait les cœurs,
rien ne laissait pour autant présager ce nouveau caprice qu’imposait ce vent
sournois et

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