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L'Orient à feu et à sang

L'Orient à feu et à sang

Titel: L'Orient à feu et à sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harry Sidebottom
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grand nombre de ses habitants va souffrir et mourir… Ce qui est arrivé à Romulus et à ces éclaireurs… rien de tout cela n’est ta faute.
    Une expression d’incrédulité se peignit brièvement sur le visage de Ballista, mais ses yeux restaient fixés sur la berge opposée du fleuve.
    — Tu as toujours trop pensé. Depuis que tu es enfant. Je ne dis pas que ce n’est pas bien en soi, mais cela n’aide en rien un homme dans ta position.
    Ballista ne répondit pas.
    — Tout ce que je dis, c’est que si tu laisses tes émotions prendre le dessus, tu n’auras pas l’esprit clair et alors les choses deviendront foutrement pires.
    Ballista hocha la tête et se redressa. En ôtant ses mains du muret, il s’aperçut que ses paumes étaient incrustées de débris de brique. Il les frotta l’une contre l’autre.
    De l’autre côté du fleuve, les Perses avaient encerclé la femme. L’un d’entre eux était sur elle. Ballista détourna le regard.
    — Tu dois avoir raison.
    Il regarda le ciel.
    — Plus qu’un peu plus d’une heure avant la tombée de la nuit. Rentrons et parlons aux autres. Nous avons beaucoup de choses à organiser en vue de la mauvaise surprise qui attend le Roi des Rois cette nuit.

XIII
    Il faisait sombre sous la haute arche de la porte de la Palmyrène. Le portail extérieur était encore fermé et, bien que la porte intérieure fût ouverte, très peu de lumière y pénétrait. La représentation plus grande que nature de la Tyché d’Arété peinte sur le mur nord n’était qu’une forme floue pour Turpio et il ne distinguait aucun des graffitis inscrits dessous la remerciant d’avoir permis des voyages sans encombre.
    Turpio avait toujours eu un sens de l’odorat particulièrement développé. L’odeur dominante était celle de la poussière froide, peut-être humide, qui s’était déposée à l’ombre de la porte et que le soleil n’atteignait jamais. Il percevait aussi l’odeur de bois du grand portail devant lui et, totalement déplacée à cet endroit, celle forte et capiteuse du parfum : de l’huile de myrrhe. On en enduisait les gonds du portail pour éviter qu’il ne grinçât.
    Turpio était tendu mais content d’être là, à attendre dans le noir : il devait diriger le raid. Il avait dû plaider sa cause longtemps devant le consilium. Acilius Glabrio avait fait remarquer que deux centuries de ses légionnaires représentaient cent quarante hommes tandis que deux turmes des auxiliaires de Turpio n’en comptaient que soixante-douze et qu’il serait donc juste qu’Acilius Glabrio lui-même prît le commandement. Turpio avait dû en appeler à Ballista et arguer que le Dux ne pouvait risquer de perdre le commandant patricien des légionnaires de sa garnison tandis qu’un ex-centurion dirigeant des auxiliaires était infiniment plus « sacrifiable ». Le Dux Ripæ avait fini par donner son accord.
    Turpio était conscient que tous les membres du consilium savaient bien pourquoi il tenait tant à diriger le raid : il lui fallait montrer sa valeur et laver son honneur entaché par Scribonius Mucianus. Pendant tout l’hiver, il avait soumis la Cohors XX à un solide entraînement. La corruption y avait été totalement éradiquée, c’était une unité efficace dont on pouvait s’enorgueillir. Mais si Turpio devait réussir ici à Arété, gagner la confiance de Ballista et faire son chemin, il lui fallait en faire plus. Il avait besoin qu’on lui donne la chance de faire ses preuves au combat. Et quoi de mieux qu’une simple et périlleuse incursion nocturne au cœur du camp ennemi ? Bien sûr, les risques étaient énormes mais la gloire qu’il pouvait en retirer aussi. « Coupe la tête du serpent perse. Vise la grande tente violette au centre du camp sassanide. Surprends le Roi des Rois dans son sommeil ou avec son pantalon bouffant sur les chevilles. Apporte-moi sa tête. Ton nom ne sera jamais oublié. » Il n’avait pas été le seul à être stimulé par les paroles de Ballista.
    Turpio perçut une autre odeur – de clou de girofle ou peut-être d’œillet ; une odeur fraîche et agréable. Cela ne pouvait être qu’Acilius Glabrio. Le jeune patricien s’avançait lentement, précautionneusement, dans le passage. Turpio l’appela à voix basse et lui tendit la main. Acilius Glabrio la serra, lui donna un morceau de liège brûlé, lui souhaita bonne chance et s’en alla. Tandis que Turpio noircissait son visage et ses

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