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L'Orient à feu et à sang

L'Orient à feu et à sang

Titel: L'Orient à feu et à sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harry Sidebottom
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avant-bras, il se demandait s’il n’avait pas mal jugé le jeune noble.
    Il sourit dans l’obscurité. Non, il ne s’était pas trompé sur son compte. Le patricien était bien un petit merdeux. Il sentait l’hilarité le gagner en pensant à la réunion du consilium. Lorsque Ballista était entré, Acilius Glabrio l’avait abordé, tout bouffi de morgue patricienne. « J’ai un mot à vous dire, Dux Ripæ. » Ballista avait lentement posé sur lui ses yeux bleus perçants de Barbare, comme s’il le voyait pour la première fois, et sur un ton empreint d’une civilité des plus glaciales avait répondu : « Avec plaisir, Tribunus Laticlavus, dans un petit moment. » Il avait fait signe à Antigonus, son nouveau porte-étendard, de s’approcher et s’était entretenu avec lui dans le coin le plus éloigné de la pièce, à voix basse mais énergique. Antigonus l’avait alors salué avant de s’en aller. Revenant au centre de la pièce, Ballista arborait un visage franc et ouvert. « De quoi vouliez-vous me parler, Tribunius Laticlavius ? » Désarçonné et furieux, le jeune patricien avait murmuré que cela pouvait attendre.
    Des bruits étouffés dans le passage derrière Turpio annoncèrent l’arrivée du Dux Ripæ. Dans la pénombre, la haute et forte stature du Barbare du Nord, l’étrange crête en forme d’oiseau sur son casque se distinguaient à peine. Il semblait n’avoir aucune odeur. Turpio, les sens exacerbés par l’imminence de la bataille, se demanda l’espace d’un instant, si cela équivalait à ne pas avoir d’ombre.
    — Tout est prêt. Il est temps d’y aller.
    — Nous ferons ce qui nous est ordonné et nous nous tenons prêts.
    Ils se serrèrent la main. Ballista, qui s’était à moitié retourné, éleva légèrement la voix.
    — Tâche de ne pas envoyer trop de gars au massacre.
    Les soldats les plus proches gloussèrent. Revenant vers Turpio, Ballista lui dit à voix basse :
    — Souviens-toi, Turpio, aussitôt entrés, aussitôt sortis. Si vous parvenez à atteindre la tente de Shapur, très bien, sinon, tant pis. Évite le combat à tout prix. Tu n’as que deux petites centaines d’hommes. Ils en ont cinquante mille. Si vous le pouvez, profitez de l’effet de surprise, tuez-en quelques-uns, brûlez quelques tentes, secouez-les. Mais ensuite, repartez très vite. Ne vous laissez pas encercler. Au premier signe de résistance organisée, rebroussez chemin.
    Ils se serrèrent à nouveau la main. Ballista s’écarta du passage, se tenant juste au-dessous de la pâle silhouette de la Tyché. À voix basse, il exhorta les soldats qui attendaient.
    — Il est temps, les gars. C’est l’heure de commencer les venationes , les chasses aux fauves.
    Malgré l’huile de myrrhe, les deux battants grincèrent de façon alarmante tandis qu’ils s’ouvraient pesamment.
    Par chance, c’était la veille de la nouvelle lune. Pourtant, même à la lueur des étoiles, la plaine semblait lumineuse après la pénombre de la porte. La route traçait une éclatante ligne blanche devant eux. Les lumières tremblotantes des feux de camp des Perses paraissaient être à une distance infinie.
    Pendant un moment, Turpio s’efforça simplement de marcher vite. Sa respiration retrouva bientôt un rythme plus lent. Sous ses pieds, la route lui semblait lisse, mais d’une dureté anormale. Derrière lui, les cent quarante légionnaires de Legio IIII marchaient aussi silencieusement que des soldats romains pouvaient le faire. Ils ne parlaient pas et faisaient attention à ce que leurs armes et leurs armures ne s’entrechoquassent pas. Certains avaient même noué des chiffons autour de leurs bottes militaires pour amortir le bruit de leurs semelles cloutées. Pourtant, un cliquetis continuel se faisait entendre : rien ne pouvait convaincre un soldat romain de la nécessité de retirer les amulettes qui pendaient à sa ceinture.
    Turpio compta deux cents pas et s’écarta sur le côté pour faire le point. En rang par dix et en colonne par quatorze, la colonne de légionnaires paraissait minuscule dans l’immensité de la plaine. Il se retourna vers la ville. Fidèle à sa parole, Ballista avait réussi à convaincre les prêtres d’organiser une cérémonie religieuse au temple de Bel. Destinée à attirer le regard et l’oreille de tout Sassanide encore éveillé, une grande procession s’acheminait lentement vers l’extrémité nord de la muraille de la ville,

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