Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'Orient à feu et à sang

L'Orient à feu et à sang

Titel: L'Orient à feu et à sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harry Sidebottom
Vom Netzwerk:
l’Arbre de vie, le flanc percé par une lance. Il avait enduré les pires souffrances sur l’Arbre pour apprendre les secrets des morts. Ballista sourit. La romanitas du Dux Ripæ en prenait un coup.
    Toute la férocité des Sassanides se concentrait sur le draco blanc claquant dans la brise. Au-dessus de la porte de la Palmyrène, l’air était saturé de projectiles. Ballista se recroquevillait derrière le parapet, protégé par un mur improvisé de boucliers. Il lui était difficile de voir ou d’entendre quelque chose. C’est alors que, couvrant l’horrible fracas de l’orage d’acier et de pierres, des acclamations s’élevèrent. Ténu, à moitié étouffé par le tumulte de la bataille, mais triomphant, un chant retentit : «  Ro-ma ! Ro-ma ! »
    Ballista approcha la tête du côté du créneau pour regarder. Il la rejeta bien vite en arrière lorsqu’une flèche rebondit contre la muraille. Il regarda encore. Un grand nuage de poussière en forme de champignon enveloppait la moitié nord de la plaine. Ne voulant pas tenter le sort, il se remit à l’abri, derrière le parapet, et attendit quelques instants. Lorsqu’il se risqua à regarder à nouveau, la poussière s’était légèrement dissipée. Il put voir pourquoi ses hommes exultaient. La grande tour de siège au nord était sur le point de s’écrouler. Il n’en restait plus qu’une armature tordue de poutres et de poutrelles. Un homme se jeta dans le vide du haut du dernier étage avec, bizarrement, l’élégance d’un danseur de pantomime. Deux ou trois autres l’imitèrent, se précipitant vers une mort certaine. Puis, lentement et inéluctablement, les restes de la tour s’affaissèrent.
    Un silence étrange planait sur le champ de bataille. Le combat perdit de son intensité tandis que les hommes des deux camps prenaient conscience de l’énormité de ce qui s’était passé. La tour de siège s’était dirigée droit sur une tour abritant l’une des plus grosses pièces d’artillerie. Les impacts répétés des boulets de vingt livres, mus par une force prodigieuse, devaient l’avoir littéralement démantelée sur place.
    Demetrius regardait autour de lui. La plate-forme de combat de la tour de la Palmyrène était jonchée, presque tapissée, de flèches. La bataille s’apaisait peu à peu et les soldats s’affalaient contre les murs ou contre les deux énormes balistes. Bien qu’il s’efforçât de n’en rien faire, le jeune Grec ne pouvait s’empêcher de lancer des regards furtifs vers les deux cadavres qui gisaient dans un coin. Une épaisse mare de leur sang mêlé se formait sous eux. Demetrius aurait voulu tout à la fois connaître leur identité et n’en rien savoir.
    Les combats étaient-ils terminés ? « Zeus, Apollon, Athéna et Artémis, faites qu’ils le soient, au moins pour aujourd’hui ! »
    Des esclaves portant des paquets et des cruches émergeaient de la trappe. Ils se déplaçaient courbés en deux car quelques flèches continuaient à siffler autour d’eux. L’espace d’un instant, Demetrius se demanda ce qu’ils faisaient là. Puis, il se rendit compte en regardant le ciel que la quatrième heure du jour s’était écoulée ; c’était l’heure à laquelle le kyrios avait ordonné que fût servi le repas des troupes. Il lui semblait tantôt que le temps avait passé vite, tantôt que la terreur et les hurlements avaient duré des jours entiers. Il pensa à la manière dont Zeus, dans l’immortelle poésie d’Homère, avait suspendu le temps pour permettre à Ulysse et Pénélope de s’aimer et de dormir. Il n’en allait pas ainsi aujourd’hui. Arété n’avait rien à voir avec Ithaque.
    Plus tôt, lorsque Ballista avait demandé à ce qu’on apportât un en-cas, Demetrius s’était montré incapable de manger : il n’avait plus une goutte de salive dans la bouche. Maintenant, alors que les combats semblaient s’apaiser, il était affamé. Il prit du pain, du fromage et un oignon et se mit à les dévorer à belles dents.
    Le kyrios mâchait machinalement, assis par terre, adossé au mur sud, encadré par Maximus et Antigonus. Ils avaient engagé une conversation technique intermittente sur les limites de dépression des pièces d’artillerie. Demetrius les contemplait avec étonnement. Comment la répétition pouvait-elle à ce point émousser les sens d’un homme et faire que cette matinée d’horreur, cette confrontation avec la mort parût aussi

Weitere Kostenlose Bücher