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L'Orient à feu et à sang

L'Orient à feu et à sang

Titel: L'Orient à feu et à sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harry Sidebottom
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dispositions qu’il avait prises pour la défense de la ville lui donnaient maintenant bien du souci. Comme se devait de le faire tout général romain, il avait convoqué son consilium , écouté les opinions, pris conseil. Mais au bout du compte, les décisions n’appartenaient qu’à lui et à lui seul. Il avait arrêté ses plans – utilisant au mieux les pitoyables ressources en hommes dont il disposait – et il pouvait maintenant les dévoiler à ses hommes et les mettre à exécution. Pourtant, le sentiment d’être passé à côté d’une évidence, d’une terrible lacune logique, le taraudait. C’était ridicule, mais la perspective que cette omission causât la prise de la ville, menât à la ruine et à la destruction le tourmentait moins que celle de la voir découverte immédiatement par un de ses officiers, celle d’être exposé aux moqueries d’Acilius Glabrio. Il était resté ce jeune Barbare de seize printemps catapulté dans l’ imperium des Romains. Le ridicule lui faisait toujours plus peur que tout.
    Ballista finit par se lever de son bureau et sortit sur la terrasse du palais. Le ciel était d’un bleu parfait, le bleu de la Mésopotamie. C’était l’hiver, le 6 décembre, dix jours avant les ides du mois. Le soleil avait dissipé les brumes matinales, le temps était celui d’une radieuse journée de printemps dans son pays du Nord. Il s’adossa au mur de la terrasse. Du fleuve, loin en contrebas, lui parvenaient les bruits des porteurs d’eau et du marché aux poissons, désormais sous contrôle militaire. Plus près de lui, à sa gauche, de l’autre côté du mur transversal séparant la terrasse des remparts, il entendait des enfants jouer. Se retournant pour regarder, il vit quatre petits gamins qui se lançaient une balle. L’un d’entre eux escalada le mur et se tint en équilibre sur un créneau. Inconsciemment, Ballista se précipita vers lui. Il n’avait fait que quelques pas lorsqu’une femme vêtue de la djellaba des bédouins attrapa l’enfant et le fit descendre. L’air vif résonna de ses réprimandes.
    Ballista pensait à son fils. Il l’avait nommé Marcus Clodius Isangrim. Personne ne pouvait trouver à redire aux deux premiers noms : rien de plus naturel qu’un premier-né prît les praenomen et nomen bien romains de son père. Julia, cependant, s’était opposée bec et ongles, comme seule une femme italienne savait le faire, à ce que son fils portât un cognomen barbare.
    Ballista savait que seules leurs exquises bonnes manières, le produit de générations de haute naissance sénatoriale, avaient empêché la famille de Julia de ricaner lors de la cérémonie de nomination. Mais Ballista y tenait. Il avait beau craindre le ridicule, il lui importait que son fils grandît en ayant conscience de ses racines nordiques. Comme il avait tenté de l’expliquer à Julia, ce choix n’était pas purement sentimental. L’ imperium utilisait les otages diplomatiques comme outils de politique extérieure. Les empereurs pouvaient à tout moment, s’ils devenaient mécontents du père de Ballista, le renvoyer lui, sans aucune hésitation, avec armes et bagages, dans le Nord et l’introniser nouveau Dux des Angles, avec l’appui des forces et des finances romaines. Si Ballista venait à mourir, ils enverraient son fils. Une stratégie qui ne produisait que rarement les effets souhaités, mais ni Ballista ni son fils n’auraient leur mot à dire. Le garçon fut donc nommé Isangrim, du nom de son grand-père, et apprenait la langue natale de son père.
    Et eux-mêmes l’appelaient Isangrim. Il était très beau, ses cheveux, une masse de boucles blondes, ses yeux, le bleu-vert de la mer. Il avait trois ans, et il jouait à des centaines de milles, à des semaines de route.
    Et qu’en était-il de sa familia ici ? Bagoas s’était fait salement rossé et resterait alité pendant quelque temps encore. Calgacus avait eu raison de dire qu’il fallait suivre le garçon. Il semblait bien que, à sa manière puérile, il eût joué à l’espion. Une chance que Maximus se trouvât là. Calgacus était certes coriace mais il était peu probable que le vieux Calédonien eût eu raison de quatre légionnaires à lui tout seul.
    Deux aspects de l’incident lui semblaient particulièrement préoccupants. D’abord, les légionnaires avaient été encouragés par Acilius Glabrio, du moins indirectement. Ensuite, les deux equites singulares avaient regardé

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