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Louis Napoléon le Grand

Louis Napoléon le Grand

Titel: Louis Napoléon le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Séguin
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duquel aucune souffrance, aucune humiliation ne lui sera épargnée.
    Spectacle pitoyable que celui d'un empereur rongé par la souffrance et errant comme une âme en peine ; d'un empereur qui encombre, qui dérange et n'a plus de prise sur rien; d'un empereur abandonné, qu'on observe furtivement avec quelque pitié et parfois même avec une pointe de mépris. Que peut-il faire, entre un gouvernement qui veut qu'on le sache aux armées et des chefs militaires qui ont d'autant moins envie de l'entendre que, s'il parle, c'est pour constater leurs erreurs... C'est en vain que son secrétaire particulier, Franceschini Pietri, adresse à Eugénie une dépêche confidentielle, implorant son rapatriement sanitaire.
    Le 14, il quitte Metz. L'impératrice lui a fait dire à nouveau que « s'il revenait à Paris, on lui jetterait à la face plus que de la boue ».
    Le 17, bagage inutile et encombrant, il est à Mourmelon. Napoléon Jérôme est là, qui lui lancera avec une certaine cruauté, et peut-être le secret espoir de le voir se ressaisir, car la régence n'a rien pour lui plaire:
    « Vous ne commandez plus l'armée, vous ne gouvernez plus, que faites-vous ici? (...) »
    — C'est vrai, lui répond Louis Napoléon, j'ai l'air d'avoir abdiqué. »
    Le voilà qui, brusquement, semble prendre des résolutions : Trochu est à Châlons. Louis Napoléon veut lui confier Paris et y faire retour avec lui. Plutôt que ne penser qu'à Metz, il faut couvrir la capitale : telle est sa conviction.
    Eugénie ne veut pas en entendre parler ; elle ne craint pas seulement la fin de sa régence, mais une insurrection : « L'Empereur ne doit pas rentrer, il ne rentrera pas... en tout cas pas vivant. » Et elle le lui fait savoir, cette fois, sans aucun ménagement : « Ne pensez pas à revenir à Paris si vous ne voulez pas déchaîner une épouvantable révolution... On dirait que vous quittez l'armée parce que vous fuyez le danger. »
    Et Cousin-Montauban de doubler cet avertissement par une dépêche plus officielle : « L'Impératrice me communique la lettre par laquelle l'Empereur annonce qu'il veut ramener l'armée de Châlons sur Paris. Je supplie l'Empereur de renoncer à cette idée qui paraîtrait l'abandon de l'Armée de Metz. »
    Meurtri et découragé, Louis Napoléon télégraphie en retour: « Je me rends à votre opinion. » Autour de lui, il confie : « La vérité, c'est qu'on me chasse. On ne veut plus de moi à l'Armée, on ne veut plus de moi à Paris. »
    Cependant, Mac-Mahon est assez bon pour accepter sa présence. Alors, il reste auprès de lui, et tente, une dernière fois, d'éviter le pire.
    De toute évidence, le gouvernement veut lancer Mac-Mahon et l'armée de Châlons au secours de Bazaine dont on feint de croire qu'il déborde d'activité et qu'il attire ainsi à lui le maximum de forces ennemies. En fait, la position que, par paresse, a choisie Bazaine est rien moins que favorable. Stratégiquement, c'est une erreur. Lui porter secours présente désormais beaucoup trop de risques.
    Quand Mac-Mahon commence à faire mouvement, Louis Napoléon obtient que Reims soit sa première étape : de là, on peut aller tout aussi bien vers Metz que vers Paris. Et quand Rouher vient auprès d'eux plaider la solution gouvernementale, Louis Napoléon retrouve assez de force pour argumenter et le convaincre de la nécessité du retour de l'armée sur Paris. Mais, bien que gagné à cette idée, Rouher ne réussira pas à imposer son nouveau point de vue.
    Bazaine ayant fait connaître qu'il a l'intention de faire mouvement vers Montmédy, Mac-Mahon décide de s'y rendre. Le mot d'ordre est simple: « Sauver Bazaine ».
    Louis Napoléon continue de suivre, et se traîne, sans conviction, sans espoir, harcelé par la douleur, abruti par l'opium : « Je suis à bout, dit-il, ah! si je pouvais mourir! »
    Il a cependant la force d'écrire au maréchal: « Pour moi, qu'aucune préoccupation politique ne domine autre que celle du salut de notre patrie, je veux être votre premier soldat, combattre et vaincre ou mourir à côté de vous, au milieu de mes soldats. »
    Et le voici à Sedan, où Mac-Mahon se retrouve bientôt enfermé. Louis Napoléon ne veut pas en partir. Il va chercher la mort à défaut de la victoire. Au plus fort de l'affrontement, il se déplace d'un endroit à l'autre, sans but, au pas de son cheval.
    Spectacle cruel, shakespearien. Encore Richard III, quand il erre sur le champ de bataille a-t-il pu

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