Louis XIV - Tome 1 - Le Roi soleil
sent libéré lorsqu’elle cesse.
Louis quitte l’appartement de Son Éminence, descend à l’étage inférieur, salue la reine, puis s’en va près du Vieux Louvre, à l’hôtel de Bourbon, monter à cheval, jusqu’à ce que la reine y arrive. Il l’accompagne dans la chapelle, suit la messe agenouillé près d’elle.
Il rentre avec elle.
Il aime ainsi la voir plusieurs fois par jour.
Il monte chez lui et dans la grande chambre il change d’habits. Ce sont les vêtements simples et amples, les hautes bottes pour la chasse, ou bien d’autres plus apprêtés, pour le dîner avec la reine, chaque jour, et les audiences qu’après ce repas il accorde aux ambassadeurs.
Il les écoute. Il questionne.
Et c’est déjà la fin de l’après-midi. Il a hâte d’aller se promener au bord de la Seine, menant son cheval au pas sur le Cours pavé. Il aime répondre aux saluts qu’on lui adresse.
Puis il rentre au Louvre, où souvent, plusieurs fois par semaine, se tient le Conseil qu’il préside, avec la reine et Son Éminence.
Après, il y a comédie.
Il se rend dans la salle des gardes, où une scène a été aménagée, des sièges disposés. On y joue une tragédie, Nicomède, de ce Corneille, auteur du Cid, dont Louis se souvient. Puis, la représentation achevée, le maître de la troupe s’avance.
Il propose de jouer une farce, Le Docteur amoureux. Louis accepte et, après les premières répliques, les rires se déchaînent.
On applaudit et le roi, d’un hochement de tête, salue ce comédien, Molière, qui l’a diverti.
Louis s’éloigne en compagnie de sa mère, avec laquelle il va souper.
Mais comme chaque soir, il ira se regarder dans les yeux des femmes.
14.
Il séduit. Il danse. Les jeunes femmes se pâment dans ses bras. Et il se moque de cet Isaac de Benserade qui a rimé :
Quoi faut-il qu’un si grand monarque
Devienne un si grand débauché ?
Il sait que tout n’est pas Plaisirs et Délices , qu’il faut affronter ces parlementaires qui refusent les édits établissant une taxe sur le papier timbré.
Il a dû entendre Bignon, l’avocat général du Parlement de Paris, menacer à mots à peine couverts Son Éminence Mazarin, en affirmant :
— Celui qui a osé donner l’avis de mettre la main dans le sanctuaire de la Justice, en voulant imposer un droit honteux et inouï sur les actes les plus légitimes et les plus nécessaires à la sûreté publique, est digne du dernier supplice.
Louis sent la colère l’emporter. Serait-ce que ce Parlement veut que renaisse le temps des Frondes ?
Et il n’a que mépris pour ce Bignon qui le flatte et a tenté de le séparer de Mazarin en ajoutant :
— La France espérait que Sa Majesté, à l’exemple de son aïeul, ce grand et incomparable monarque Henri IV, prendrait un jour elle-même le soin de ses affaires et apporterait un tempérament si doux et si convenable aux maux de son État que son nom et son règne en seraient à jamais en vénération très particulière dans toute l’étendue de son empire.
Il se sent humilié et blessé par ces propos qui rappellent qu’il ne gouverne pas encore, qu’il est soumis à Mazarin. Ils vont voir s’il ne sait pas agir seul.
Le 13 avril, alors qu’il chasse dans la forêt de Vincennes, il apprend que le Parlement se réunit à nouveau.
Il convoque les capitaines des gardes : qu’ils avertissent les parlementaires qu’il va tenir un lit de justice.
Il s’y rend sans quitter ses vêtements de chasse, grosses bottes, justaucorps rouge, chapeau gris. Il veut imposer l’enregistrement de ces édits sur le papier timbré. Il faut que ce Parlement se soumette.
Avant d’entrer dans la grand-chambre, il va prier à la Sainte-Chapelle, comme c’est la coutume, et il se fait précéder par le grand maître des cérémonies, le chancelier, les princes et les ducs.
Il veut que les parlementaires comprennent que le roi n’est plus un enfant contre lequel ils se sont rebellés, mais un souverain sacré à Reims, incarnant la volonté de Dieu et le royaume.
Il les regarde, méprisant et sévère.
Il s’assoit. Il parle d’une voix forte et dure.
— Messieurs, chacun sait combien vos assemblées ont excité les troubles dans mon État et combien de malheurs elles ont produits. J’ai appris que vous prétendiez encore les continuer, sous prétexte de délibérer sur les édits qui ont été lus et publiés en ma présence. Je suis venu ici exprès
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