Louis XIV - Tome 1 - Le Roi soleil
qu’ils aperçoivent son cortège de mousquetaires, de gardes du corps, des maréchaux de camp, Turenne, Condé, Luxembourg. Et ce Vauban, avec qui il aime s’entretenir et que la passion de la guerre de siège habite.
Et la forteresse de Maëstricht, avec ses trois rangées de bastions, ses remparts, ses redoutes, paraît imprenable.
Mais, précisément parce que depuis le XVI e siècle cette enclave hollandaise, comme un éperon enfoncé entre le pays de Liège et de Juliers, n’a jamais été conquise, il faut qu’elle tombe aux mains de Louis le Grand.
De l’aube à la nuit, Louis parcourt les tranchées, ordonne les attaques et souvent les conduit, malgré les réticences des maréchaux. Un roi de France ne doit pas s’exposer de telle manière, disent-ils.
Il ne répond pas, il s’élance. Il veut que tous le voient.
Il se tourne pour s’assurer que Charles Le Brun, le peintre qu’il a demandé à Colbert de lui adjoindre, est bien là, à quelques pas, crayonnant sur ses carnets.
Le temps de ce mois de mai est radieux. Les explosions des mines, qui font s’ébouler des pans de rempart, couronnent les forteresses de petits nuages blancs que le vent dissipe, laissant place au ciel immaculé d’un printemps glorieux.
Il veut cette victoire, quel qu’en soit le prix. Les sept mille assiégés résistent, mais que peuvent-ils contre plus de cinquante canons qui tirent sans discontinuer, et contre trente mille hommes, commandés par le plus grand des rois ? Car désormais, c’est lui qui décide.
Il a choisi Maëstricht, car sa chute étonnera toutes les nations d’Europe. Il écoute Vauban, mais il commande. Il est comptable des morts. Et il salue la dépouille du chef de ses mousquetaires, d’Artagnan, en qui il avait toute confiance et qu’un boulet hollandais a tué.
Mort pour la gloire de son roi.
Louis déclenche aussitôt une nouvelle attaque.
Il y aura quelque chose de beau à voir, dit-il au peintre Charles Le Brun.
En effet, après treize jours, alors que Vauban n’a pu encore creuser toutes les mines afin de faire exploser les fortifications, Maëstricht capitule.
Louis entre dans la ville, alors que sonnent déjà les cloches d’un Te Deum et que s’y mêlent les roulements de tambour et les notes aigres des fifres.
Il veut que dans toutes les églises du royaume, on célèbre sa victoire. Que les graveurs, les poètes, les peintres retracent les épisodes du siège et montrent le roi, à cheval, au premier rang de ses troupes, valeureux et glorieux.
Maintenant il peut quitter Maëstricht, retrouver à Tournai la Cour et ses dames qui l’y attendent.
Elles sont là, Athénaïs de Montespan, Louise de La Vallière et la reine Marie-Thérèse. Elles ont fait le voyage dans le même carrosse. Et il l’a voulu ainsi.
Il apprend qu’Athénaïs de Montespan a accouché, dans la forteresse de Tournai, le 1 er juin, d’une petite fille, Louise-Françoise, qu’il a l’intention de légitimer, comme tous les enfants nés de sa semence, et qui se nommera Mlle de Nantes.
Elle a déjà été confiée à Françoise d’Aubigné, veuve Scarron, dont l’attitude le trouble et l’irrite.
Françoise le regarde avec une sorte d’admiration apitoyée, comme si elle voulait le séduire, comme n’importe quelle femme, et le mettre en garde comme le ferait un confesseur, et ce mélange, ce défi qu’elle lui lance, cette réserve et cette provocation l’attirent.
Mais elle est aimée, adorée même, des enfants dont elle a la charge. Il est touché par l’affection qu’elle semble porter au duc du Maine, le premier fils qu’il a eu avec Athénaïs de Montespan.
Il l’observe, devine qu’elle veut lui faire comprendre qu’elle est plus qu’une gouvernante, mieux qu’une mère, que cette Athénaïs de Montespan – qu’elle sert, à laquelle elle est fidèle – se désintéresse des enfants du roi, ne suit pas ses conseils avisés.
Peut-être a-t-elle raison ?
Il décide que Françoise d’Aubigné et les enfants – duc du Maine, Mlle de Nantes, bâtards légitimés – logeront avec elle, au château de Saint-Germain.
Il pense à ce retour, aux fêtes qu’il va organiser pour célébrer les victoires, mais il faut d’abord faire face à cette grande alliance de La Haye, que les Hollandais ont nouée avec les Espagnols, le duc de Lorraine, l’empereur germanique.
Il chevauche à la tête des régiments qui entrent en Alsace.
Il l’écrit à
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