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Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi

Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi

Titel: Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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Versailles. Et il est prêt à se soumettre aux règles de l’Église qui ne sont pour lui qu’une étiquette particulière. Il écoute le cardinal de Noailles, archevêque de Paris, qui veut que l’on retranche « trois jours gras » aux mascarades et aux bals.
    Le cardinal puis Mme de Maintenon insistent :
    — Ces trois jours-là retrancheraient bien des péchés, dit Mme de Maintenon.
    Il accepte mais il ne comprend pas cette exigence. Faut-il se punir et cesser de rire ? Une part de lui résiste encore.
    Il questionne :
    — Un roi doit-il s’humilier ? Un roi doit-il se couvrir du sac et de la cendre pour obtenir le pardon de Dieu, ou la paix ?
     
    Il rentre à Versailles.
    Il va recevoir l’ambassadeur du Maroc, Abdalla Bin Aycha.
    Il veut, dit-il au baron de Breteuil, chargé d’introduire les ambassadeurs et les princes étrangers, qu’on montre à cet ambassadeur la force de la garde du roi.
    On rassemblera les gardes-françaises et les Suisses dans la première cour du château. Ils déposeront à terre leurs armes et leurs tambours, et les étendards seront ployés.
    L’ambassadeur sera introduit dans la chambre royale, mais s’arrêtera au bord du tapis, au-dessous et tout contre la marche de l’estrade.
    Il le reçoit assis, et se découvre un bref instant, puis écoute les compliments de l’émissaire du souverain du Maroc.
    Cela suffit.
    Un roi doit toujours se tenir à son rang. Et celui de Louis le Grand est le premier.
     
    Il a cela en tête quand, le 9 novembre 1700, un valet lui remet la dépêche qu’un courrier vient, à bride abattue, d’apporter de Madrid.
     

QUATRIÈME PARTIE
1700-1704
     

21.
     
     
    Il pose la dépêche devant lui, au centre de la table.
    Est-ce enfin, ce matin du 9 novembre 1700, la mort de Charles II qu’elle annonce et les dispositions testamentaires arrêtées par le roi d’Espagne ?
    Il croise les bras comme pour s’emprisonner, s’empêcher de briser aussitôt les sceaux, de connaître la réponse à cette question qui depuis des mois le hante.
    Et c’est pour cela, pour fuir cette incertitude, qu’il a voulu qu’à Marly ou à Versailles, presque chaque jour, on danse, on tire un feu d’artifice, on joue la comédie, on se déguise.
    Mais chaque jour aussi, il a pensé à ce moment, quand il saura si Charles II a choisi un héritier pour son empire, et qu’il faudra décider d’accepter son testament ou bien d’appliquer les clauses de cet accord de partage de la succession d’Espagne conclu avec l’Angleterre et les Provinces-Unies.
     
    Il n’est pas impatient.
    Tant de dépêches sont arrivées déjà depuis le début de cette année 1700. Et il a si souvent cru que l’instant était venu de trancher, de faire le choix sans doute le plus grave qu’il ait eu à accomplir, celui qui pourrait ouvrir, en ce début du nouveau siècle, à nouveau les portes de la guerre.
    Il y a quelques semaines, le 17 septembre, il a fait duc le marquis Henri d’Harcourt, parce que son ambassadeur à Madrid a agi avec efficacité et discrétion, versant de l’or à qui il fallait, s’entretenant plusieurs fois par jour avec le Premier ministre du roi, le cardinal Portocarrero, combattant l’influence du clan allemand, qui tente d’imposer pour héritier l’archiduc Charles de Habsbourg, le fils cadet de l’empereur germanique, Léopold I er .
    Il regarde l’un après l’autre les membres du Conseil des finances, réunis autour de lui.
    Il fixe un instant Michel Chamillart, qu’il vient de nommer contrôleur général des Finances, ministre d’État, sur l’insistance de Mme de Maintenon.
    Que pense-t-elle de la décision qu’il faudra prendre si d’Harcourt annonce la mort de Charles II ?
    Il sait que Françoise de Maintenon est, comme toute dévote, sensible aux choix de l’Église. Et d’Harcourt a écrit, il y a quelques semaines, que le cardinal Portocarrero avait consulté le pape Innocent XII, et que celui-ci s’était prononcé pour la décision de Charles II de ne pas accepter le démembrement de son empire, et de choisir pour successeur un Bourbon, ou à défaut un Habsbourg, mais d’abord le Bourbon de France. Et peut-être l’arrivée à Paris d’un nouvel ambassadeur d’Espagne, Castel Dos Rios, qui s’est montré si déférent, si français, annonce-t-elle ce choix.
     
    Il ouvre les bras, place ses mains de part et d’autre de la dépêche, fixe un long moment cette mer enveloppée de brume

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