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Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi

Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi

Titel: Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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troupes a commencé. Il l’a contemplé à cheval, ou installé dans un fauteuil placé sur une éminence.
    Les dames sont restées dans leur carrosse ou bien se sont assises autour du fauteuil, cependant que les troupes défilaient, donnaient l’assaut, creusaient des tranchées, se livraient à des simulacres de bataille, de siège ou de combat de corps à corps.
    Il observe les ambassadeurs, il écoute leurs éloges.
    Ils ont compris que le roi de France n’a pas conclu la paix par faiblesse. Que son armée reste la plus puissante. Que ses finances lui permettent de dépenser pour ces manœuvres de vingt-cinq jours près de quinze millions de livres. Et que rien, sinon sa propre décision, ne peut le faire céder.
    Il a ainsi reconnu Guillaume III comme roi d’Angleterre, mais Jacques II est toujours son hôte, il ne l’abandonnera jamais.
    On ne peut faire plier Louis le Grand.
     
    Il faut qu’on le sache et il a voulu cette parade pour qu’on s’en persuade dans toutes les cours d’Europe.
    Car il sait que le grand jeu dont l’issue décidera du sort du royaume d’Espagne va commencer.
     
    Il lit les dépêches de son ambassadeur à Madrid, le marquis Henri d’Harcourt.
    Celui-ci lui a fait parvenir un portrait du roi Charles II qui, dans son palais de l’Escorial, vit à trente-sept ans comme un vieillard accablé par la maladie, et qui sait qu’autour de son trône les souverains d’Europe attendent sa mort pour s’emparer ou se partager ses vingt-trois couronnes puisqu’il est sans héritier.
    Louis a longuement regardé le visage émacié du roi d’Espagne.
    Il a des droits sur ce royaume. La reine Marie-Thérèse était la demi-sœur de Charles II. Elle n’avait renoncé à ses droits que « moyennant » une dot qui n’a jamais été versée.
    Il pense à cette succession, presque chaque jour. Il jauge ses petits-fils, les enfants du Grand Dauphin. Le duc de Bourgogne est destiné au trône de France. Mais l’un de ses frères, le duc d’Anjou ou le duc de Berry, pourrait régner à Madrid.
    Il doit préparer cette succession, pour empêcher qu’à la mort de Charles II ce ne soit l’un des fils de l’empereur germanique Léopold, veuf de l’une des sœurs de Charles II, qui accède au trône. Et que, autour de Léopold, ne se reconstitue une ligue contre la France.
    Il ne veut pas de la guerre. Il le dit à ceux qui, comme la princesse Palatine, s’inquiètent.
    « Il ne faut pas être prophète pour deviner que si le roi d’Espagne meurt sans enfant, dit-elle, il s’élèvera une terrible guerre ; toutes les puissances prétendent à sa succession ; aucune d’elles ne voudra céder à une autre et il n’y aura que la guerre qui pourra décider. »
    Il sait que la guerre est le grand juge, qu’il ne devra pas s’y dérober si la grandeur du royaume et la gloire du roi sont remises en question.
    Mais il répète à la princesse Palatine ou à Mme de Maintenon qu’il ne veut pas de l’affrontement.
    Les sujets du royaume souffrent déjà. La misère les tenaille. Le froid intense, une nouvelle fois, comme si Dieu s’obstinait, réduit ou détruit les récoltes. Les augmentations du prix du grain, et donc du pain, serrent les plus pauvres à la gorge.
    La guerre apporterait de nouvelles souffrances.
    Il est donc prêt à négocier.
    Il reçoit le comte de Portland, l’envoyé de Guillaume III d’Orange et d’Angleterre. Il comble d’honneurs et de cadeaux ce Bentick qui fut le favori du souverain. Il l’admet à la cérémonie du coucher, lui confie le bougeoir, distinction suprême.
     
    Il s’endort avec peine et le sommeil, quand il le trouve, est vite brisé par des cauchemars, une sensation d’étouffement.
    Il se lève. Il va jusqu’à la table où les valets ont déposé viandes, fruits et biscuits.
    Il mange jusqu’à avoir la sensation que son ventre va se déchirer.
    Il s’installe sur sa chaise percée.
    Il a soixante ans. Cette affaire de la succession d’Espagne est sans doute la dernière grande affaire de son règne. L’un de ses descendants peut gouverner des Amériques à la Sicile. Ou bien ce peut être un héritier de Léopold de Habsbourg, et se reconstituerait alors ce que les rois de France n’ont jamais accepté : l’empire de Charles Quint.
    La guerre s’imposerait. Et il veut l’éviter. Alors pourquoi pas le partage de la succession auquel est favorable, selon le comte de Portland, Guillaume III ?
    Il le propose.

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