L'ultime prophétie
pas.
Jenah avança à son tour et regarda droit dans les yeux ses
compatriotes anaris.
— Cela vaut pour nous aussi. Nous devons nous faire de nouveaux
alliés et non des ennemis. Nous sommes tous face à un danger bien plus grand
que les problèmes que nous avons eus par le passé. Cette menace concerne le
monde entier, comme le Seigneur Annuvil pourra vous le dire.
— Annuvil..., chuchotèrent ceux parmi les Bozandari qui
ignoraient encore la véritable identité d'Archer.
Les Anari, qui le savaient depuis longtemps, restèrent
impassibles. Archer ne dit rien. Debout, les bras croisés, il se contenta de
baisser la tête, les yeux fixés sur le sol.
— Où est la dame ? C'est à elle que nous avons juré
fidélité, finit par crier quelqu'un.
Archer leva la tête.
— Elle est au temple, dit-il d'une voix grave. L'Ennemi
s'est attaqué à elle. Ses sœurs ilduins montent la garde à ses côtés, ainsi que
les mères de clan.
Un silence pesant suivit ces paroles et les hommes
s'agitèrent nerveusement.
Archer pencha la tête sur le côté et parcourut les visages
devant lui de son regard gris.
— Je regrette, dit-il, que les choses aient tourné ainsi.
Et pourtant, aussi noires que soient les heures à venir, aucun d'entre vous ne
serait jamais venu au monde si nous, Premiers Nés, n'avions commis autant
d'erreurs. Tirez les leçons de nos péchés. Ne les répétez pas.
Après quelques murmures, le calme revint et Tuzza s'exprima
de nouveau.
— D'après les étendards que nos éclaireurs ont observés,
il s'agit des hommes de mon cousin Alezzi. C'est un homme bon et je l'aime
beaucoup. Si ce n'était que pour cette raison, il nous faudrait nous efforcer
d'éviter un affrontement. Je lui parlerai.
Un officier bozandari s'adressa à lui.
— Etes-vous certain de pouvoir le convaincre de se rallier
à nous, commandant ?
— Je le dois, répondit simplement Tuzza. Je le dois. Il ne
nous reste que demain pour achever notre entraînement et encore, pas toute la
journée. Nous ne voulons pas nous battre mais il le faudra lorsque nous tomberons
sur les troupes d'Ardred, si ce n'est avant. Les Anari et les Bozandari doivent
être capables de combattre côte à côte ou sinon son armée nous écrasera.
— Et ce ne sera pas évident, continua Jenah — comme il
avait été convenu qu'il le ferait. Nous autres Anari préférons agir de nuit.
Cela a semé la confusion parmi vous, ce qui a compensé notre infériorité
numérique.
— Les Anari n'ont jamais disposé d'une légion, même contre
nous. Et la colonne qui nous a harcelés durant notre marche comptait moins de
mille hommes, ajouta Tuzza.
Des murmures surpris s'élevèrent parmi les officiers
bozandari mais Tuzza les fit taire d'un geste de la main.
— C'est la vérité. La colonne nous a attirés vers ce
défilé, là où nous ne pouvions pas déployer tout à fait nos forces et où nous
étions obligés d'attaquer frontalement une défense bien préparée.
Le souvenir de cette débâcle amère assombrit les visages.
Archer vit ce que cette réaction pouvait rapidement provoquer : la rancœur
envers les Anari qui les avaient battus et le commandant qui les avait menés à
la défaite.
— Rappelez-vous que les Anari bénéficiaient de nombreux
avantages sur vous au cours de cette campagne, dit Archer.
— En effet, renchérit Jenah. Les Ilduins nous aidaient à
communiquer et nous combattions sur notre propre terrain, au milieu des
collines et montagnes rocheuses. Il ne nous était pas difficile de trouver un
terrain favorable, alors que les choix du commandant Tuzza étaient limités
quant à son itinéraire. Bien que nous ayons encore des Ilduins avec nous,
l'Ennemi aussi. Et nous ne nous battrons plus sur les terres anari mais dans
les vastes plaines du désert de Deder. Ce que nous avons réussi à faire avant
ne sera pas possible une deuxième fois.
Ces mots parurent radoucir quelque peu les Bozandari.
— Notre stratégie est également différente, poursuivit
Tuzza. L'approche des Anari est mieux adaptée à l'attaque. Ils manœuvrent plus
vite que nous mais se fatiguent également plus vite. Notre tactique est plus
stable quand il s'agit de se défendre et même si nous sommes moins mobiles en
attaque, nous pouvons tenir plus longtemps.
— Ainsi, dit Jenah, nos exercices viseront à tirer profit
de nos différences. Nous travaillerons ensemble, comme le marteau et
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