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Ma mère la terre - Mon père le ciel

Ma mère la terre - Mon père le ciel

Titel: Ma mère la terre - Mon père le ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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était un soulagement car, à part son poids, elle se retrouvait enfin seule.
    Son nez saignait encore et elle chercha son tablier pour essuyer le sang qui commençait à former une croûte sur son visage. Elle bougea les mains et ne trouva rien. Finalement, elle saisit le bord de la couverture d'herbe et l'attira vers elle. En même temps, elle sentit quelque chose émerger du sol, tâtonna et sentit une épaisseur de la longueur d'une main. Il y avait quelque chose en dessous. Puis vint un chuchotement, peut-être la voix de sa mère ou de sa grand-mère qui soufflait : « Shuganan a caché un couteau. »
    Chagak fouilla la terre du bout des doigts. Elle devait étirer son bras et sa main se fatigua rapidement. Elle essaya de s'approcher plus près, mais Homme-Qui-Tue grogna et la retint plus étroitement contre lui, et Chagak dut creuser avec le bout de ses ongles, mais elle le fit assez profondément pour saisir le manche d'un couteau qu'elle tira vers elle. Il n'était pas grand, mais c'était un couteau de chasse à lame bien affûtée. Tout d'abord il lui parut étrange dans sa main. C'était une arme d'homme qu'elle n'aurait pas dû avoir, mais elle se rappela la nuit où son village avait brûlé, elle se souvint de sa mère et de sa sœur périssant dans les flammes, elle revit le corps de Traqueur de Phoques, la plaie béante de son ventre, et à ces souvenirs le couteau devint peu à peu une partie d'elle-même.
    Elle voulait le tenir d'une main ferme mais elle savait qu'elle devait d'abord calculer l'endroit où elle devait frapper.
    Elle leva sa main gauche et effleura son cou, laissa sa main reposer et retint sa respiration, sans bouger, jusqu'à ce qu'elle sente enfin la lente pulsation de la veine jugulaire. Elle se mit à trembler comme si tout son esprit s'était rassemblé au bout de ses doigts.
    Elle porta, alors, sa main à son amulette et son esprit s'adressa à Aka, aux loutres de mer et aux esprits de son peuple :
    « Ne me laissez pas échouer. Il tuera encore si je ne le tue pas. Guidez ma main. Laissez-moi le tuer! »
    Elle baissa la main et saisit le couteau comme si l'esprit du couteau se tendait vers son propre esprit et elle utilisa son petit doigt pour sentir la pulsation; alors, serrant les dents, elle leva son couteau et frappa Homme-Qui-Tue à la gorge.
    Pendant un moment il ne se passa rien. Il n'y eut pas de sang, pas de mouvement, et un esprit chuchota :
    « Tu n'as pas frappé assez fort. »
    Mais tout à coup les mains d'Homme-Qui-Tue se nouèrent autour du cou de Chagak jusqu'à ce qu'elle ait l'impression d'étouffer.
    Elle le frappa encore avec son couteau, le blessant aux bras et aux épaules, et puis brusquement il y eut quelqu'un d'autre dans la pièce. D'abord Chagak pensa que c'était un esprit, celui de son père ou peut-être celui de Traqueur de Phoques venu pour l'aider, pour l'emmener dans le monde des esprits, puis elle reconnut Shuganan.
    Il tenait un couteau. Chagak vit le vieil homme se redresser sur les genoux et le vit planter son couteau au milieu du dos d'Homme-Qui-Tue. Elle sentit la force de l'arme que Shuganan enfonçait dans les côtes de l'homme tandis qu'il s'appuyait sur lui pour la faire pénétrer plus profondément. Et soudain les mains qui enserraient le cou de Chagak se relâchèrent pour entourer la taille de Shuganan, le soulever et le jeter par terre avec force.
    Le vieillard resta immobile et Homme-Qui-Tue se redressa sur ses genoux, vomissant du sang en se tenant la gorge à deux mains.
    Shuganan ne pouvait pas bouger. La douleur à son côté était si intense qu'il n'avait pas la force de serrer les dents pour les empêcher de claquer, mais ce n'était pas la douleur qui remplissait son esprit.
    Homme-Qui-Tue était à genoux, un couteau dans le dos, le sang coulant de la blessure à sa gorge. Shuganan regarda jusqu'à ce que le sang cessât de couler, jusqu'à ce que l'homme restât immobile, son visage pressé contre le sol. Alors, Shuganan ferma les yeux. L'obscurité le séparait de ce mort et il ne ressentait plus rien, n'entendait plus rien, jusqu'à ce que la longue plainte de Chagak l'oblige à ouvrir les yeux.
    La jeune fille était pelotonnée sur le sol à côté de lui, ses longs cheveux noirs tombant sur sa poitrine comme un rideau sombre. Même dans la faible lumière de l'ulaq, Shuganan distinguait les marques de coups rougissant ses bras et ses jambes. Mais il n'avait pas la force de la soutenir, de la

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