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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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autre femme pour conduire mon ik. Il rit, et le vent porta son rire au-dessus de la mer. Peut-être lui donneraient-ils Kiin.
    56
    Kiin leva les yeux de son ouvrage. Qakan repoussa le rideau de séparation et se posta, bras croisés sur la poitrine, le regard balayant les murs de l'ulaq. Kiin tissait une natte à la manière des femmes Morses, sur les genoux, deux brins d'herbe tordus en travers d'une longue frange d'herbe de chaîne, les fils de trame se tordant sur chaque brin de chaîne pour constituer une natte bien serrée et bien solide.
    Qakan avait perdu du poids au cours de l'hiver, les os de son visage étaient plus saillants, ses yeux plus profonds dans leur orbite.
    — Je t'ai do-donné tout ce que j'ai à do-donner, déclara Kiin. Les autres pa-paniers et les autres na-nattes sont pour l'ulaq de mon mari et je n'ai pas fait de s-sculptures depuis la naissance des bébés.
    — Je n'ai pas besoin de tes nattes, cracha Qakan avec dédain. Qu'est-ce qu'un commerçant peut attendre de bon d'un travail de femme?
    — Alors, tu-tu n'as pas besoin de mes sculptures? repartit Kiin d'une voix monocorde sans quitter son tissage des yeux. Rends-les-moi. Peut-être que m-mon mari en a besoin.
    Elle ne regarda pas son frère mais sut qu'il se renfrognait.
    — Tu as faim? s'enquit-elle.
    Parfois, lorsque Cheveux Jaunes était fâchée plusieurs jours de suite, Qakan venait chercher du poisson ou passer la nuit.
    — Non.
    Kiin soupira.
    — Pourquoi es-tu ici?
    — Tu devrais venir avec moi sur la plage, dit-il. J'ai à te parler.
    Kiin le regarda cette fois, rétrécissant les yeux.
    — Tu t'en vas b-bientôt. Pour co-commercer.
    — Oui.
    — Est-ce que Cheveux Jaunes va par-partir avec toi?
    — Non.
    — Tu veux que je pa-pagaie ton ik ?
    — Non.
    — Ne ra-ramène pas Cheveux Jaunes chez notre peuple.
    — Je t'ai dit qu'elle refuse de m'accompagner.
    Kiin sentit le coin de sa bouche se contracter. Au
    village, tout le monde riait à propos de Qakan et Cheveux Jaunes; tout le monde connaissait leurs querelles ; tout le monde savait que Cheveux Jaunes chassait souvent Qakan de son lit à coups de pied. A deux reprises, Kiin avait trouvé le Corbeau avec Cheveux Jaunes sur leur lit. Trois fois, Queue de Lemming les avait vus et, si Kiin était indifférente à ce que le Corbeau faisait avec d'autres femmes, Queue de Lemming réagissait très mal.
    Ce serait ainsi quand le Corbeau finirait par prendre Kiin dans son lit, elle le savait. Chaque nuit, Queue de Lemming surveillait le Corbeau, et chaque fois qu'il regardait Kiin, Queue de Lemming allait à lui, le distrayait en le caressant, le taquinant et riant. Alors, le Corbeau n'avait pas encore pris Kiin.
    — Viens avec moi à la plage..., supplia Qakan en retrouvant le ton plaintif et geignard de leur enfance.
    Elle posa son ouvrage et se leva sur la pointe des pieds pour jeter un œil sur les berceaux de ses fils. Tous deux dormaient. Le fils de Samig suçait son poing, le fils d'Amgigh fermait les yeux très fort dans son sommeil, sa bouche agitée par un rêve.
    Kiin enfila son suk et marcha d'un pas décidé vers le coin aux armes où elle prit un couteau de pierre à longue lame.
    Elle se tourna vers Qakan et vit qu'il écarquillait les yeux.
    — C'est à m-moi. M-mon mari me l'a do-donné pour protéger nos f-fils.
    Elle suivit Qakan au-dehors dans la pluie grise et brumeuse du jour.
    — A la plage, ordonna Qakan.
    — N-non, ici, répliqua-t-elle. Tu ne-ne te rappelles pas que grand-mère et tante ont dit qu'un des bébés devrait mou-mourir?
    Qakan plissa les yeux.
    — Pourquoi penses-tu que je veuille te parler? J'ai eu vent de leurs plans. Le Corbeau a parlé à tous les hommes.
    — Le Corbeau?
    — Tu crois qu'il veut protéger les bébés ?
    — Il m'a donné ça, répondit Kiin en montrant son couteau.
    Qakan se balança d'un pied sur l'autre.
    — Je ne sais pas, mais quelque chose l'a fait changer d'avis. Il a décidé que grand-mère avait raison. Il pense qu'il faut tuer un des bébés. Il a conçu un plan.
    — Alors, pour-pourquoi me le dire, Qakan? Qu'y gagnes-tu ?
    — Tu es ma sœur.
    Kiin émit un rire.
    Qakan rougit.
    — Je suis le père des bébés, balbutia-t-il enfin. Ce sont mes fils.
    Kiin vit la blancheur sur son visage, la vérité dans ses yeux. Kiin avait pris soin de ne pas lui laisser voir les bébés. Il ne savait pas combien ils ressemblaient à leurs véritables pères. Elle ferma les yeux

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