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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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attraper le vent du bout des doigts. Elle se mit à rire et se retourna afin d'apercevoir Tugix, la grande montagne qui protégeait leur village.
    — Tiens-toi tranquille, ordonna sa mère. Tu es une femme, maintenant, plus une enfant.
    — Je ne-ne-n'ai jamais é-é-été une en-enfant, repartit la fille de Coquille Bleue.
    Sa mère détourna les yeux et la fille baissa les paupières, regrettant un instant ses paroles. Mais alors elle sentit la colère monter dans sa poitrine, au souvenir des nombreuses fois où sa mère s'était tue devant les mauvais traitements que Oiseau Gris avait infligés à sa fille.
    Coquille Bleue repoussa les mèches de cheveux qui l'aveuglaient et dit :
    — J'ai quelque chose pour toi.
    Suivie de sa fille, elle se dirigea vers un monticule non loin de la plage et s'accroupit dans le vent. Elle fouilla dans son suk et en sortit un paquet enveloppé de peau de phoque et noué de lanières de cuir.
    — C'est pour toi, ajouta-t-elle en défaisant les nœuds.
    Elle déplia la peau de phoque et dévoila un petit panier. Il était tissé avec l'ivraie qui poussait près de la plage et le couvercle qui s'adaptait était attaché par une tresse de nerfs.
    Elle souleva le couvercle. Le panier contenait un dé en peau de phoque, des aiguilles d'os d'oiseau et un poinçon d'ivoire.
    — Tu en auras besoin, dit sa mère.
    — Oui.
    — Ce n'est pas un présent aussi grandiose que celui que Chagak t'a fait, remarqua Coquille Bleue.
    Elle posa les yeux sur la plage, puis à nouveau sur sa fille.
    — T-t-t-tu m'as t-t-tressé le... p-p-panier? demanda la fille, les mots venant lentement.
    Coquille Bleue hocha la tête.
    — Il est... il est...
    La fille de Coquille Bleue voulait dire qu'elle le trouvait beau, remercier sa mère, mais les mots restaient bloqués et elle ne put rien ajouter. Elle attendit dans l'espoir que sa mère verrait la gratitude dans ses yeux, mais celle-ci ne la regardait pas. La fille de Coquille Bleue essaya de se rappeler si sa mère l'avait jamais regardée, avait jamais permis que leurs yeux se rencontrent. Non, non, mais c'était peut-être pour éviter de voir le vide dans le cœur de sa fille sans âme.
    Pendant un moment, Coquille Bleue se tut, puis elle se leva, dos à la mer, le vent soulevant ses cheveux sur sa nuque.
    — Deux cérémonies te seront consacrées cette nuit, dit-elle. La cérémonie de nouvelle femme et la cérémonie d'attribution du nom. Ton père a choisi un nom pour toi.
    La fille entendit les mots, émit un petit bruit étouffé, un rire mêlé de larmes. Un nom. Un nom! Cette fois, elle chercha avec audace les yeux de sa mère, attendit, sans ciller, que sa mère la regarde.
    — Je suis heureuse que tu sois devenue une femme, ajouta sa mère.
    Les mots étaient tranquilles, presque perdus dans le cri des guillemots et des mouettes.
    Le vent tourbillonna soudain autour d'elles, enroulant les cheveux sur leur tête. Toutes deux repoussèrent les mèches de leur visage ; un bref instant, leurs mains s'effleurèrent, mais bien vite elles reculèrent pour remettre leurs cheveux en place.
    La fille se tenait près de l'ulaq de son père. Elle apercevait la plage. Quelqu'un avait allumé un feu de bruyère et d'os de phoques, et le vent portait l'odeur de la graisse brûlée et de la camarine. Tous les habitants du village étaient rassemblés : son père, le plus petit des hommes, sa mère, menue et qui, à en croire Nez Crochu, avait été belle; Longues Dents et ses deux épouses, Nez Crochu et Petit Canard, et le fils de Petit Canard. Et naturellement Kayugh, un chasseur dont la famille n'avait jamais faim. Chagak, portant leur fille Mésange, se tenait à son côté; leur fille aînée, Baie Rouge, et Premier Flocon, l'époux de Baie Rouge, suivaient dans le cercle, enfin Samig et Amgigh.
    Comme la fille de Coquille Bleue avait détesté cette plage ! L'étendue plate de schiste et de gravier gris foncé avec quelques rares roches lisses qui ne permettaient pas de se cacher de son père ou de Qakan.
    Mais ce soir, c'était un lieu de joie.
    Sa mère lui avait dit de guetter le signal de Kayugh — sa main levée, pointant en direction du soleil. Elle attendait avec angoisse et impatience. Son inquiétude gagnait tout son corps.
    Elle passa la main dans ses cheveux. Elle les avait coiffés avec un bâton à encoches et les avait frottés d'huile de phoque. Ils tombaient, longs et lisses, jusqu'à sa taille.
    — Tu es belle, avait

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