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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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plus vieux et plus sage que moi. Que penses-tu ?
    La tête inclinée, les yeux sur la baguette de bois flotté qu'il utilisait pour marquer le gravier nu sur le sol, Kayugh répondit :
    — Oiseau Gris parle avec sagesse. Nous devons interrompre notre course, construire des ulas, chasser avant l'hiver.
    Il releva la tête.
    — Oiseau Gris, cette plage est-elle encore loin?
    — Deux jours, trois tout au plus.
    Kayugh regarda Samig sans rien ajouter.
    Du coin de l'œil, Samig vit le ricanement sur le visage d'Amgigh.
    — Si la plage est telle que tu nous la décris, Oiseau Gris, dit Samig, nous y construirons notre village. Et puisque c'est un endroit où les commerçants viennent chaque été, Qakan nous y trouvera peut-être et nous aidera à négocier ce qu'il nous faut pour l'hiver.
    Longues Dents sourit et Premier Flocon pouffa. Bientôt, chacun parlait et même Coquille Bleue avait l'air heureuse. Seul Amgigh ne pipait mot, ne riait pas, et ses yeux, croisant ceux de Samig à la lumière des lampes à huile, portaient toujours un éclair de colère.
    Le troisième jour, comme le soleil approchait de son plus haut point dans le ciel, Samig remarqua un changement dans la mer, une nuance subtile de couleur.
    Il guida son ikyak le long de la pente herbeuse d'une colline qui piquait dans la mer, sans plage ni falaise pour séparer l'herbe de l'eau et aperçut le cercle gris d'une plage de sable dans une grande crique. Il s'assura que les autres hommes le suivaient, les iks des femmes dans leur sillage.
    Trois Poissons était debout dans son bateau et Samig resta bouche bée devant tant de bêtise. Il finit par hurler :
    — Assieds-toi!
    Sa colère s'apaisa vite quand il vit son épouse se rasseoir en hâte, mais elle continua de jacasser et il tourna son ikyak pour faire face à sa femme. Trois Poissons se cachait timidement le visage dans les mains, ne dévoilant que ses yeux entre ses doigts bruns et épais.
    — Femme! lança-t-il avec sévérité. Es-tu une enfant pour te mettre debout dans ton ik ?
    Il n'attendait pas de réponse, et fut surpris d'entendre Trois Poissons expliquer :
    — Oiseau Gris dit que c'est la plage.
    Oiseau Gris approcha son ikyak de celui de Samig.
    — Oui, confirma-t-il en désignant l'île du doigt. Là. Tu vois où les saules sont plus grands? Nous avons campé juste un peu plus haut en remontant le courant.
    Samig tourna son ikyak et pagaya vers Kayugh.
    — J'ai entendu, dit Kayugh, le sourire aux lèvres. Alors, nous arrêtons-nous ici?
    — C'est une bonne plage, concéda Samig.
    Amgigh avança son ikyak entre l'embarcation de
    Samig et celle de son père.
    — Quand Waxtal a-t-il jamais eu raison ? Tu crois ce qu'il te dit?
    Soudain furieux après son frère, lassé des jours de silence, des airs renfrognés, des réponses agressives chaque fois qu'il essayait de faire participer Amgigh aux décisions ou aux conversations, Samig rétorqua :
    — Tu l'as cru lorsqu'il t'a parlé de l'homme qui était mon père.
    Amgigh, la bouche mince comme une lame de couteau, les narines dilatées, siffla :
    — Fais ce que tu veux. Si Aka ou une autre montagne veut nous tuer, nous mourrons de toute façon.
    Sur quoi, il pagaya en direction du rivage. Samig le regarda s'éloigner, regarda ses longs coups de rame qui le conduisirent bientôt sur le sable. Puis lui et Kayugh le suivirent.
    Samig tirait son ikyak hors de l'eau lorsqu'il entendit Kayugh réprimer un cri et Amgigh hurler. Samig pivota sur lui-même tout en arrachant son harpon à ses liens. Mais, bientôt, lui aussi criait.
    Debout en haut de la plage, se tenait Kiin.
    64
    Un esprit, c'est sûrement un esprit, songea Samig.
    « Ne t'approche pas trop », chuchota quelque esprit. Mais ce fut plus fort que lui. Abandonnant son ikyak, ignorant les autres, il grimpa comme un fou la petite pente qui menait jusqu'à Kiin.
    Alors, il vit qu'elle pleurait. Elle se tenait droite, une lance dans la main, mais elle pleurait. Les esprits pleuraient-ils? Elle passa une main sur son visage et il s'aperçut que son poignet était zébré de cicatrices. Les esprits avaient-ils des cicatrices?
    — Dis-moi que tu es réel, murmura Kiin.
    Samig s'aperçut que sa voix était pleine, sans
    interruption, sans bégaiements. Kiin ne parlait jamais aussi clairement. Peut-être était-ce quand même un esprit.
    — Je suis réel, répondit Samig. Nous sommes réels. Mais ton père a dit qu'il avait trouvé ton ik, que tu t'étais

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