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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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noyée.
    — Je suis vivante. Je ne suis pas un esprit. Qakan m'a prise et m'a vendue aux Chasseurs de Morses. J'essayais de revenir à toi... à Amgigh.
    Samig était tout près, maintenant, assez près pour voir qu'elle portait un nouveau suk, fait de fourrures de loutre et de phoque. Il remarqua une fine cicatrice pâle à son front, presque dissimulée sous ses cheveux noirs.
    — Nous sommes tous là, reprit Samig.
    Et il lui tendit la main.
    — Amgigh, ta mère et ton père, Kayugh et Chagak, Nez Crochu... nous tous.
    Elle tendit la main à son tour, ferme et chaude dans celle de Samig. Elle était bien réelle. Puis Amgigh fut à côté d'eux, et Kayugh, et les femmes. Samig lâcha la main qu'il n'avait nul droit de revendiquer et se détourna.
    « C'est un rêve », murmura un esprit.
    Alors je ne veux pas me réveiller, songea Samig.
    65
    Waxtal repoussa son ikyak loin du rivage, loin du ressac. Kiin. Comment était-ce possible? Qakan manquait-il de bon sens pour penser qu'il la vendrait à une tribu visitant cette plage? Et comment Qakan pouvait-il savoir qu'Aka se changerait en feu, que les esprits de la montagne enverraient de la cendre et des tremblements qui chasseraient les Premiers Hommes de chez eux?
    D'ailleurs, il pouvait prétendre ne rien connaître du plan de Qakan. C'était un plan insensé. Il le lui avait dit.
    Il laissa les vagues le conduire au bord, glissa l'ikyak sur le sable, puis dénoua la jupe et descendit. Les femmes étaient sur la plage, toutes agglutinées autour de Kiin. Les hommes se tenaient en arrière; Amgigh et Samig l'un à côté de l'autre — c'était la première fois que Waxtal les voyait se parler depuis le début du voyage.
    Coquille Bleue était affalée sur le sol, comme un tas de fourrures en loques, Kiin était penchée sur elle. Coquille Bleue était une sotte. Kiin n'était qu'une fille. C'était pour Qakan qu'elle devrait réagir ainsi. Qui pouvait dire où il était, s'il était sain et sauf? Pourquoi les pensées de Coquille Bleue n'étaient-elles pas pour son fils ?
    Waxtal se dirigea vers son épouse et se posta derrière elle.
    — Femme, relève-toi, dit-il en prenant garde de ne regarder aucune femme sauf Coquille Bleue, prenant garde aussi que ses yeux ne croisent pas ceux de Kiin. Nous devons dresser un campement. Il y a du bois flotté sur cette plage. Nous pouvons faire un feu.
    Il tendit la main et hissa violemment Coquille Bleue sur ses pieds. Mais Kiin s'approcha de lui et le repoussa.
    — Laisse-la tranquille, grogna-t-elle. Tu as bien de la chance que je t'autorise à rester sur cette plage. Si tu touches à ma mère, je te tue.
    Waxtal ouvrit la bouche pour répliquer, mais ne trouva rien à dire. Il remarqua soudain que sa fille tenait une lance, pointe dressée, dans une main, comme un homme porte un bâton de marche; il remarqua aussi que son suk bougeait, comme un suk bouge quand une femme porte un bébé.
    Il jeta un regard aux hommes derrière lui et vit que les yeux d'Amgigh étaient plantés dans les siens, que Samig se tenait à côté de son frère; tous deux l'observaient. Le visage d'Amgigh était sombre de rage.
    Ainsi, Kiin pensait avoir plus de pouvoir que Waxtal, son père, un sculpteur de bois et d'ivoire, un chasseur qui avait pris de nombreux phoques, un guerrier qui avait combattu les Petits Hommes. Ce n'était qu'une sotte.
    — Est-ce ainsi que tu me parles, à moi, ton père ? cria Waxtal d'une voix aussi forte qu'il put, tremblant de colère. Que dis-tu à ton mari, alors ? ajouta-t-il en se tournant vers Amgigh. Tu as abandonné ton mari et maintenant tu portes un enfant. L'enfant de qui? Voici plus d'un an que tu n'es plus avec nous. Tu trahis ton propre époux et tu portes l'enfant d'un autre homme.
    Il s'attendait à voir Kiin reculer, baisser la tête, tomber à genoux comme au temps où elle vivait dans son ulaq. Mais elle s'avança, passa à côté de lui et se planta entre Samig et Amgigh. Puis elle releva son suk et Waxtal vit dans un sursaut qu'elle portait deux bébés.
    — Mon mari est Amgigh, déclara Kiin. Mes fils sont les fils d'Amgigh.
    Kiin extirpa les bébés de leurs bandoulières. Aucun doute, songea Waxtal en voyant le premier enfant. C'est le fils d'Amgigh. Le bébé avait les yeux d'Amgigh, son menton, son nez droit et aplati. Elle tendit l'enfant à Amgigh. Amgigh entoura le bébé de ses bras afin que le vent n'attrape pas le souffle du petit. Puis Kiin sortit le second

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