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Madame Catherine

Madame Catherine

Titel: Madame Catherine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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de l’Horloge quand, plus morte que vive, elle se laissa tomber dans les bras de son oncle.
    — Je ne vais pas trop bien...
    Elle prononça ces mots du ton le plus inhabituel, au point de préoccuper Simon.

 
    Château d’Amboise.
    L’odeur du sang, ferreuse, écoeurante, enivre certains hommes, presque aussi sûrement que les vapeurs de l’alcool. Les Guises en furent l’objet, prisonniers de la terreur rouge où ils se complurent, se vautrèrent, se souillèrent à jamais. Pendant plusieurs jours, les exécutions capitales se succédèrent sur l’échafaud devenu visqueux à force d’hémorragie. Le sang des conjurés teinta ruisseaux et rigoles jusque dans la ville, au bas du coteau. Et les corps martyrisés, entassés sur des charrettes, firent écho à ceux pendus aux arbres, cloués aux pieux, fichés aux portes de la cité... Jamais la Rome des Césars elle-même, n’avait offert un tel tableau.
    En dépit de la pestilence infâme, le cardinal de Lorraine respirait à pleins poumons. La frayeur qu’il avait conçue d’abord, et si mal cachée, faisait place, à présent, à son indécente gloriole ; tout lui paraissait drôle, dérisoire même ; et les critiques affreuses qui pleuvaient sur les siens l’amusaient comme autant de satires.
    — Oh, gloussait-il, celle-là est forte ! Oh, oh !
    Un pamphlet, publié à Strasbourg, venait de lui parvenir, intitulé L’Épître envoyée au Tigre de France. Un plumitif huguenot l’y dépeignait sous les traits d’un fauve assoiffé de sang. Loin de s’en offusquer, Charles paraissait se repaître d’une telle prose. « Tigre enragé, vipère venimeuse, sépulcre d’abomination, spectacle de malheur, jusqu’à quand abuseras-tu de la jeunesse du roi ? Tu fais profession de prêcher la sainteté, toi qui ne connais Dieu que de parole, et fais de la religion chrétienne un masque pour te déguiser... Qui ne vois rien de saint que tu ne souilles, rien de chaste que tu ne violes, rien de bon que tu ne gâtes... »
    — « Sépulcre d’abomination », jubilait-il.
    C’était trop amusant, il fallait que son frère en profitât. Il entra chez le duc par une porte dérobée, et le trouva en pleine audience. Un envoyé du gouverneur de Picardie était venu, de la part de son maître, s’enquérir de sa santé.
    — Elle est fort bonne, répondit François. Dites-le à votre maître.
    L’émissaire, choqué par le spectacle sanglant de tous les cadavres exposés, osa demander s’il mangeait encore de bon appétit.
    — Et comment ! Tenez, je vais vous montrer de quelle viande je me nourris.
    Le duc sonna. Bientôt une porte s’ouvrit, et l’on amena un prisonnier de belle prestance.
    — Qu’on le pende comme les autres, ordonna François.
    Les gardiens passèrent une corde au cou du captif qui se laissa faire noblement. Ils en nouèrent l’extrémité aux barreaux de la fenêtre, et poussèrent l’homme dans le vide. L’émissaire ferma les yeux d’horreur. Le cardinal, lui, battait des mains.
    — Viande excellente, dit-il. Excellente.
    — J’en tuerai, conclut le duc, tant qu’il en restera.
    Chaque jour après dîner, la famille royale venait voir exécuter les conjurés. Mais on avait dressé la tribune trop près de l’échafaud, de sorte qu’à plusieurs reprises, le sang d’une tête, en voletant, vint tacher les soies et les velours brochés d’or.
    La reine mère feignait de trouver cela normal. Elle donnait au roi son fils, à sa belle-fille Marie Stuart, à ses autres enfants, l’exemple parfait de la dignité impassible. Puisqu’il fallait que s’opère le châtiment, il leur appartenait, disait-elle, d’honorer de leur présence la fin de ces pauvres hères. Privilège du rang.
    Le cardinal de Lorraine était moins digne, assurément, qui plaisantait avec les dames, leur faisait remarquer d’insignifiants détails et s’amusait à ridiculiser les condamnés. Il jouait aussi des peurs et des fragilités de François n, pour l’exciter à se réjouir du sang versé.
    — Voyez, sire, comme ces gens-là sont fiers ; même l’imminence du supplice ne suffit pas à flétrir leur orgueil. Imaginez quel sort ils eussent réservé à Votre Majesté, si nous les avions laissés faire.
    — Tous ont affirmé vouloir servir le roi, contesta Catherine.
    — Oui, en mettant le siège à sa demeure !
    De temps en temps, la jeune reine Marie soupirait ; elle baissait la tête et se mettait les mains sur les

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