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Madame Thérèse ou Les Volontaires de 92 - Pourquoi Hunebourg ne fut pas rendu

Madame Thérèse ou Les Volontaires de 92 - Pourquoi Hunebourg ne fut pas rendu

Titel: Madame Thérèse ou Les Volontaires de 92 - Pourquoi Hunebourg ne fut pas rendu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Erckmann-Chatrian
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Une…
deusse
 !
    Et Scipio marchait avec une mine grave
étonnante, ses longues oreilles sur les épaules et la queue en
trompette.
    C’était merveilleux ; mon cœur
sautait.
    Tous les autres, dehors, paraissaient
confondus d’admiration.
    – Halte ! s’écria Schmitt, et Scipio
s’arrêta.
    Alors je ne pensais plus à la
schlitte
 ; j’étais tellement fier des talents de
Scipio, que j’aurais voulu courir à la maison, et crier à
l’oncle : « Nous avons un chien qui fait
l’exercice ! »
    Mais Hans Aden, Frantz Sépel et tous les
autres, encouragés par la bonne humeur du vieux soldat, étaient
entrés, et se tenaient en extase, le dos à la porte et le bonnet
sous le bras.
    – En place, repos ! dit le père
Schmitt, et Scipio retomba sur ses quatre pattes, en secouant la
tête et se grattant la nuque avec une patte de derrière, comme pour
dire : « Depuis deux minutes une puce me démange ;
mais on n’ose pas se gratter sous les armes ! »
    J’étais devenu muet de joie en voyant ces
choses, et je n’osais appeler Scipio, de peur de lui faire
honte ; mais il vint se ranger de lui-même près de moi,
modestement, ce qui me combla de satisfaction ; je me
considérais en quelque sorte comme un feld-maréchal à la tête de
ses armées ; tous les autres me portaient envie.
    Le père Schmitt regardait Scipio d’un air
attendri ; on voyait qu’il lui rappelait le bon temps de son
régiment.
    – Oui, fit-il au bout de quelques
instants, c’est un vrai chien de soldat. Mais reste à savoir s’il
connaît la politique, car beaucoup de chiens ne savent pas la
politique.
    En même temps, il prit un bâton derrière la
porte et le mit en travers, en criant :
    – Attention au mot d’ordre !
    Scipio se tenait déjà prêt.
    – Saute pour la République ! cria le
vieux soldat.
    Et Scipio sauta par-dessus le bâton, comme un
cerf.
    – Saute pour le général Hoche !
Scipio sauta.
    – Saute pour le roi de Prusse !
    Mais alors Scipio s’assit sur sa queue d’un
air très ferme, et le vieux bonhomme se mit à sourire tout bas, les
yeux plissés, en disant :
    – Oui, il connaît la politique… hé !
hé ! hé ! Allons… arrive !
    Il lui passa la main sur la tête, et Scipio
parut très content.
    – Fritzel, me dit alors le père Schmitt,
vous avez un chien qui vaut son pesant d’or ; c’est un vrai
chien de soldat.
    Et, nous regardant tous, il ajouta :
    – Puisque vous avez un si bon chien, je
vais vous prêter ma
schlitte
 ; mais vous me la
ramènerez à cinq heures, et prenez garde de vous casser le cou.
    Il sortit avec nous et décrocha son traîneau
du hangar.
    Mon esprit se partageait alors entre le désir
d’aller annoncer à l’oncle les talents extraordinaires de Scipio,
ou de descendre l’Altenberg sur notre
schlitte
. Mais quand
je vis Hans Aden, Frantz Sépel, tous les camarades, les uns devant,
les autres derrière, pousser et tirer en galopant comme des
bienheureux, je ne pus résister au plaisir de me joindre à la
bande.
    Schmitt nous regardait de sa porte.
    – Prenez garde de rouler ! nous
dit-il encore.
    Puis il rentra, pendant que nous filions dans
la neige. Scipio sautait à côté de nous. Je vous laisse à penser
notre joie, nos cris et nos éclats de rire jusqu’au sommet de la
côte.
    Et quand nous fûmes en haut, Hans Aden devant,
les deux mains cramponnées aux patins recourbés, nous autres
derrière, assis trois à trois, Scipio au milieu, et que tout à coup
la
schlitte
partit, ondulant dans les ornières et filant
par-dessus les rampes : quel enthousiasme !
    Ah ! l’on n’est jeune qu’une
fois !
    Scipio, à peine le traîneau parti, avait passé
d’un bond par-dessus nos têtes. Il aimait mieux courir, sauter,
aboyer, se rouler dans la neige comme un véritable enfant, que
d’aller en
schlitte
. Mais tout cela ne nous empêchait pas
de conserver un grand respect pour ses talents ; chaque fois
que nous remontions et qu’il marchait près de nous plein de
dignité, l’un ou l’autre se retournait, et, tout en poussant,
disait :
    – Vous êtes bien heureux, Fritzel,
d’avoir un chien pareil ; Schmitt Adam dit qu’il vaut son
pesant d’or.
    – Oui, mais il n’est pas à eux, criait un
autre, il est à la femme.
    Cette idée que le chien était à la femme me
rendait tout inquiet, et je pensais : « Pourvu qu’ils
restent tous les deux à la maison ! »
    Nous continuâmes à monter et à descendre

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