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Madame Thérèse ou Les Volontaires de 92 - Pourquoi Hunebourg ne fut pas rendu

Madame Thérèse ou Les Volontaires de 92 - Pourquoi Hunebourg ne fut pas rendu

Titel: Madame Thérèse ou Les Volontaires de 92 - Pourquoi Hunebourg ne fut pas rendu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Erckmann-Chatrian
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les haies couvertes de givre.
    – Tiens ! c’est toi, Fritzel !
me dit Hans Aden ; tu t’en vas ?
    – Oui, je viens de glisser, et l’oncle
Jacob ne veut pas que je glisse ; j’aime mieux m’en aller.
    – Moi, dit Frantz Sépel, j’ai fendu mon
sabot sur la glace ce matin, et mon père l’a raccommodé. Voyez un
peu.
    Il défit son sabot et nous le montra. Le père
Frantz Sépel avait mis une bande de tôle en travers avec quatre
gros clous à tête pointue. Cela nous fit rire, et Frantz Sépel
s’écria :
    – Ça, ce n’est pas commode pour
glisser ! Écoutez, allons plutôt en traîneau ; nous
monterons sur l’Altenberg, et nous descendrons comme le vent.
    L’idée d’aller en traîneau me parut alors si
magnifique, que je me voyais déjà dessus, descendant la côte en
trépignant des talons et criant d’une voix qui montait jusqu’aux
nuages : « 
Himmelsfarth !
Himmelsfarth ! 
»
    J’en avais des éblouissements.
    – Oui, dit Hans Aden ; mais comment avoir
un traîneau ?
    – Laissez-moi faire, répondit Frantz
Sépel, le plus malin de nous tous. Mon père en avait un l’année
dernière, mais il était tout vermoulu, la grand-mère en a fait du
feu. C’est égal, arrivez toujours.
    Nous le suivîmes pleins de doute et
d’espérance. Tout en descendant la grande rue, devant chaque hangar
nous faisions halte, le nez en l’air, et nous regardions d’un œil
d’envie les
schlittes
[5] pendues aux
poutres.
    – Ça, disait l’un, c’est une belle
schlitte
, nous pourrions tous y tenir sans gêne.
    – Oui, répondait un autre, mais elle serait
trop lourde à traîner sur la côte : elle est en bois vert.
    – Eh ! faisait Hans Aden, nous la
prendrions tout de même, si le père Gitzig voulait nous la
prêter ; mais c’est un avare : il garde sa
schlitte
pour lui seul, comme si les
schlittes
pouvaient s’user.
    – Arrivez donc ! s’écriait Frantz
Sépel qui marchait en avant.
    Et toute la troupe se remettait en route. De
temps en temps on regardait Scipio, qui marchait près de moi.
    – Vous avez un beau chien, faisait Hans
Aden, c’est un chien français ; ils ont de la laine comme les
moutons et se laissent tondre sans rien dire.
    Frantz Sépel soutenait qu’il avait vu l’année
précédente, à la foire de Kaiserslautern, un chien français avec
des lunettes et qui comptait sur un tambour jusqu’à cent. Il
devinait aussi toutes sortes de choses, et la grand-mère Anne
pensait que ce devait être un sorcier.
    Scipio, pendant ces discours, s’arrêtait et
nous regardait. J’étais tout fier de lui. Le petit Karl, le fils du
tisserand, disait que si c’était un sorcier, il pourrait nous faire
avoir une
schlitte
, mais qu’il faudrait lui donner son âme
en échange, et pas un de nous ne voulait lui donner son âme.
    Nous allions donc ainsi, de maison en maison,
et deux heures sonnaient à l’église, lorsque M. Richter passa
sur son traîneau, en criant à sa grande bique décharnée :
    – Allez, Charlotte, allez !
    La pauvre bête allongeait ses hanches, et
M. Richter contre son ordinaire, paraissait tout joyeux. En
passant devant la maison du boucher Sépel, il cria :
    – Bonne nouvelle, Sépel, bonne
nouvelle !
    Il faisait claquer son fouet, et Hans Aden
dit :
    – M. Richter est un peu gris ;
il aura trouvé quelque part du vin qui ne lui coûtait rien.
    Alors toute la bande rit de bon cœur, car tout
le village savait que Richter était un avare.
    Nous étions arrivés au bout de la grand-rue,
devant la maison du père Adam Schmitt, un vieux soldat de Frédéric
II, qui recevait une petite pension pour acheter son pain et son
tabac, et de temps en temps du
schnaps
[6] .
    Adam Schmitt avait fait la guerre de Sept ans
et toutes les campagnes de Silésie et de Poméranie. Maintenant il
était tout vieux, et depuis la mort de sa sœur Roesel, il vivait
seul dans la dernière maison du village, une petite maison couverte
de chaume, n’ayant qu’une seule pièce en bas, une au-dessus et le
toit avec ses deux lucarnes. Elle avait aussi son hangar sur le
côté, derrière un réduit à porcs, et vers le village, un petit
jardin entouré de haies vives, que le père Schmitt cultivait avec
soin.
    L’oncle Jacob aimait ce vieux soldat ;
quelquefois, en le voyant passer, il frappait à la vitre et lui
criait : « Adam, entrez donc ! »
    Aussitôt l’autre entrait, sachant que l’oncle
avait du véritable cognac de France dans

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