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Madame Thérèse ou Les Volontaires de 92 - Pourquoi Hunebourg ne fut pas rendu

Madame Thérèse ou Les Volontaires de 92 - Pourquoi Hunebourg ne fut pas rendu

Titel: Madame Thérèse ou Les Volontaires de 92 - Pourquoi Hunebourg ne fut pas rendu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Erckmann-Chatrian
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courage et de son bon sens
naturel.
    – Allons, s’écria le mauser en se levant,
arrive maintenant, Fritzel, arrive ! Il est temps que je te
donne ce que tu veux. Je vous salue, monsieur Richter ; vous
avez un fameux chien. Grédel, vous marquerez deux bouteilles sur
l’ardoise.
    Schmitt et Koffel s’étaient aussi levés, et
nous sortîmes tous ensemble, riant comme des bienheureux. Scipio
nous suivait de près, sachant qu’il n’avait rien de bon à espérer
quand nous serions sortis.
    Au bas de l’escalier, Schmitt et Koffel
tournèrent à droite pour descendre la grand-route ; le mauser
et moi nous traversâmes la place, à gauche, pour entrer dans la
ruelle des Orties.
    Le mauser marchait devant, le dos rond, une
épaule un peu plus haute que l’autre, selon son habitude, lançant
de grosses bouffées de tabac coup sur coup, et riant tout bas, sans
doute à cause de la déconfiture de Richter.
    Nous arrivâmes bientôt à sa petite porte
enfoncée sous terre ; alors il descendit les marches et me
dit :
    – Arrive, Fritzel, arrive ; laisse
le chien dehors, il n’y a pas trop de place dans le trou.
    Il avait bien raison d’appeler sa baraque un
trou, car elle n’avait que deux petites fenêtres à fleur de terre
donnant sur la ruelle. À l’intérieur, tout était sombre : le
grand lit et l’escalier de bois au fond, les vieux escabeaux, la
table couverte de scies, de pointes, de pincettes, l’armoire ornée
de deux citrouilles, le plafond traversé de perches, où la vieille
Berbel, la mère du mauser, suspendait le chanvre qu’elle
filait ; les attrapes de toutes sortes placées sur le vieux
baldaquin, dans un enfoncement tout gris de poussière et de toiles
d’araignée ; les centaines de peaux de martres, de fouines, de
belettes accrochées aux murs, les unes retournées, les autres
encore fraîches et bourrées de paille pour les faire sécher, tout
cela vous laissait à peine assez de place pour se retourner, et
tout cela me rappelle le bon temps de la jeunesse, car je l’ai vu
cent fois, été comme hiver, qu’il fît du soleil ou de la pluie, que
les petites fenêtres fussent ouvertes ou fermées.
    C’est là-dedans que je me représente toujours
le mauser, assis devant la table très basse, montant ses attrapes,
la joue tirée, les lèvres serrées, et la vieille Berbel,
– toute jaune, le bonnet de crin sur la nuque, ses petites
mains sèches, aux ongles noirs, sillonnées de grosses veines
bleuâtres, – filant du matin au soir à côté du poêle. De temps
en temps, elle levait sa petite tête, froncée de rides
innombrables, et regardait son fils d’un air de satisfaction.
    Mais ce jour-là, Berbel n’était pas de bonne
humeur, car à peine fûmes-nous entrés qu’elle se mit à quereller le
mauser d’une voix aigre, disant qu’il passait sa vie au cabaret,
qu’il ne songeait qu’à boire, sans se soucier du lendemain, toutes
choses très fausses auxquelles le mauser ne répondit pas, sachant
qu’il faut tout entendre de sa mère sans se plaindre.
    Il ouvrit tranquillement l’armoire, tandis que
la vieille Berbel criait, et prit sur le plus haut rayon une large
écuelle de terre vernissée, où le miel couleur d’or, dans des
rayons blancs comme la neige, s’élevait par couches régulières. Il
la déposa sur la table, et plaça deux beaux rayons dans une
assiette très propre, en me disant :
    – Tiens, Fritzel, voilà du beau miel pour
la dame française. Le miel en rayon est tout ce qu’on peut
souhaiter de mieux pour des malades ; c’est d’abord plus
appétissant, et puis c’est plus frais et plus sain.
    J’avais déjà posé l’argent au bord de la
table, et Berbel étendait la main d’un air content pour le
prendre ; mais le mauser me le rendit :
    – Non, fit-il, non, je ne veux pas être
payé de cela ; mets cet argent dans ta poche, Fritzel, et
prends l’assiette. Laisse ton écuelle ici ; je vous la
rapporterai ce soir ou demain matin.
    Et comme la vieille semblait fâchée, il
ajouta :
    – Tu diras à la dame française, Fritzel,
que c’est le mauser qui lui fait présent de ce miel, avec plaisir,
entends-tu… de bien bon cœur… car c’est une femme respectable…
N’oublie pas de dire « respectable » tu
m’entends ?
    – Oui, mauser, je dirai ça. Bonjour,
Berbel, dis-je en ouvrant la porte.
    Elle me répondit en inclinant la tête
brusquement ; cette vieille avare ne voulait rien dire, à
cause de l’oncle

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