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Madame Thérèse ou Les Volontaires de 92 - Pourquoi Hunebourg ne fut pas rendu

Madame Thérèse ou Les Volontaires de 92 - Pourquoi Hunebourg ne fut pas rendu

Titel: Madame Thérèse ou Les Volontaires de 92 - Pourquoi Hunebourg ne fut pas rendu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Erckmann-Chatrian
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s’envolent à la fois ; c’est un
bruit à la ferme… c’est le garçon Yéri avec ses gros sabots, qui
vient de crier dans l’écurie à l’un de ses chevaux :
« Allons, te retourneras-tu, Foux ? » Quel
malheur ! Si seulement tous les chevaux étaient crevés, et
Yéri avec !… Enfin, il faut attendre encore… les moineaux sont
partis bien loin. Tout à coup un d’eux se remet à crier, ils
reviennent sur les toits… Ah ! Seigneur Dieu ! pourvu que
Yéri ne crie plus… pourvu que tout se taise… S’il n’y avait
seulement pas de gens dans cette ferme ni sur la route !
Quelles transes ! Enfin, en voilà un qui redescend… Hans Aden
me tire par le pan de ma veste… Nous ne respirons plus… nous sommes
comme muets d’espérance et de crainte !
    Tout cela, je le voyais d’avance, je ne me
tenais plus en place.
    – Mais, au nom du ciel, qu’as-tu
donc ? me disait Lisbeth ; tu vas, tu cours comme une âme
en peine… tiens-toi donc tranquille.
    Je n’entendais plus ; le nez aplati
contre la vitre je pensais :
    « Viendra-t-il ou ne viendra-t-il
pas ? Il est peut-être déjà là-bas… il en aura emmené un
autre ! »
    Cette idée me paraissait terrible.
    J’allais partir, quand enfin Hans Aden
traversa la place ; il regardait vers notre maison, épiant du
coin de l’œil ; mais il n’eut pas besoin d’épier
longtemps : j’étais déjà dans l’allée et j’ouvrais la porte,
sans prévenir Scipio cette fois. Puis je courus le long du mur, de
crainte d’une commission ou de tout autre empêchement : il
peut vous arriver tant de malheurs dans ce bas monde ! Et ce
n’est que bien loin de là, dans la ruelle des Orties, que Hans Aden
et moi nous fîmes halte pour reprendre haleine.
    – Tu as du blé, Hans Aden ?
    – Oui.
    – Et ton couteau ?
    – Sois donc tranquille, le voilà. Mais
écoute, Fritzel, je ne peux pas tout porter ; il faut que tu
prennes les briques et moi les tuiles.
    – Oui ; allons.
    Et nous repartîmes à travers champs, derrière
le village, ayant de la neige jusqu’aux hanches. Le mauser, Koffel,
l’oncle lui-même nous auraient appelés alors, que nous nous serions
sauvés comme des voleurs, sans tourner la tête.
    Nous arrivâmes bientôt à la vieille tuilerie
abandonnée, car on cuit rarement en hiver, et nous prîmes notre
charge de briques. Puis remontant la prairie, nous traversâmes les
haies du
Postthâl
toutes couvertes de givre, juste en face
des grands fumiers carrés, derrière les écuries et le hangar. Déjà
de loin, nous voyions les moineaux alignés au bord du toit.
    – Je te le disais bien, faisait Hans
Aden ; écoute… écoute !…
    Deux minutes après nous posions nos attrapes
entre les fumiers, en déblayant la neige au fond. Hans Aden tailla
les petites fourches, plaça les tuiles avec délicatesse, puis il
sema le blé tout autour. Les moineaux nous contemplaient du haut
des toits, en tournant légèrement la tête sans rien dire. Hans Aden
se releva, s’essuyant le nez du revers de la manche, et clignant de
l’œil pour observer les moineaux.
    – Arrive, fit-il tout bas ; ils vont
tous descendre.
    Nous entrâmes sous le hangar, pleins de bonnes
espérances, et dans le même instant toute la bande disparut. Nous
pensions qu’ils reviendraient ; mais jusque vers quatre heures
nous restâmes blottis derrière les bottes de paille, sans entendre
un cri de moineau. Ils avaient compris ce que nous faisions, et
s’en étaient allés bien loin, à l’autre bout du village.
    Qu’on juge de notre désespoir ! Hans
Aden, malgré son bon caractère, éprouvait une indignation terrible,
et moi-même je faisais les plus tristes réflexions, pensant qu’il
n’y a rien de plus bête au monde que de vouloir prendre des
moineaux en hiver, lorsqu’ils n’ont que la peau et les os, et qu’il
en faudrait quatre pour faire une bouchée.
    Enfin, las d’attendre et voyant le jour
baisser, nous revînmes au village, en suivant la grande route,
grelottant, les mains dans les poches, le nez humide et le bonnet
tiré sur la nuque d’un air piteux.
    Lorsque j’arrivai chez nous, il faisait nuit.
Lisbeth préparait le souper ; mais comme j’éprouvais une sorte
de honte à lui raconter la façon dont les moineaux s’étaient moqués
de nous, au lieu de courir à la cuisine, selon mon habitude,
j’ouvris tout doucement la porte de la salle obscure, et j’allai
m’asseoir sans bruit derrière le

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