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Mademoiselle

Mademoiselle

Titel: Mademoiselle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacqueline Duchêne
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du matin, on frappa à sa porte. Sur ordre de son père, elle devait rejoindre la reine au Cours. L'agitation, les violences grandissantes dans la capitale déterminaient Mazarin à faire partir à nouveau de Paris le petit Louis et ses proches. Cette fois en cachette, et à Saint-Germain.
    La lune brillait encore. Il gelait à pierre fendre. Comme les carrosses de Mademoiselle n'étaient pas prêts, un de ses écuyers la conduisit jusqu'à la voiture de la reine.
    — Je crains le froid et veux être au fond du carrosse auprès de vous, s'empressa-t-elle de dire.
    — Impossible, ma nièce, répliqua sèchement Anne d'Autriche.
    La place était prise par la douairière de Condé.
    — Bien, répondit insolemment Anne-Louise. Les jeunes doivent céder aux vieilles.
    Son mécontentement s'accrut à l'arrivée. En cette saison, à Saint-Germain comme dans tous les châteaux inoccupés, les pièces étaient entièrement démeublées. Il fallait se résigner à une installation de fortune. Anne-Louise dut se coucher dans une grande chambre, peinte et dorée, mais aux vitres cassées. Son matelas posé à même le sol, elle le partageait avec l'une de ses jeunes demi-sœurs.
    L'enfant, agitée par le voyage et la nouveauté du lieu, s'éveillait sans cesse, en criant qu'elle voyait une bête. Sa nourrice chantait pour la rendormir. Anne-Louise ne put fermer l'œil deux nuits durait, et s'en plaignit.
    Son père lui donna sa chambre. De grand matin, elle fut réveillée par les gardes de Monsieur, qui ne la savaient pas là. De les voir ainsi, tout équipés, jusqu'à leur collet de buffle attaché, la gêna et la mécontenta. Elle était en chemise de jour...
    Elle n'en avait d'ailleurs pas de nuit. Pas de rechange, pas de domestiques pour la coiffer ni l'habiller. Seulement Perrette, une jeune Normande qui ne la quittait jamais et avec laquelle elle partageait fous rires, lectures et promenades.
    Et la neige qui tombait, et la nourriture détestable. Et les cavalcades des rats qui, dérangés dans leur hivernage, couraient au-dessus de sa tête, dans les greniers. Encore heureux qu'ils ne se risquent pas dans les couloirs... Elle en frémissait.
    Mais, quand elle vit combien sa belle-mère était ridicule avec ses plaintes infinies, elle décida de surmonter ces bagatelles et de se taire.
    Dix jours plus tard, un de ses chariots, renfermant vêtements, couvertures, confitures et même un lit, franchit les barrages des insurgés. Alors que les Parisiens retenaient les bagages de la reine et de Mazarin, ils étaient en revanche disposés à mille honnêtetés pour Mademoisellequi avait eu à souffrir du cardinal. Ils servaient avec soin son commissionnaire, un petit page qu'elle surnomma « l'ambassadeur ».
    La reine finit par demander à sa nièce de faire passer dans ses chariots ses propres hardes.
    — Avec joie, Madame. Et celles du petit roi. Mais sachez que l'on visite nos bagages et que des bourgeois, ouvrant une caisse de gants d'Espagne, se mirent à éternuer plusieurs fois. Ils ne s'attendaient pas aux parfums violents, de gingembre et de girofle, dont ils étaient imprégnés. Ils n'en ont jamais porté !
    Anne-Louise triomphait. La cour manquait de tout. Paris la ménageait. Sa gouvernante et Mme de Frontenac obtinrent des passeports pour sortir de la capitale et la rejoindre. Néanmoins, privée de fêtes, de bals, souffrant d'un entourage mécontent et inquiet, elle maudissait le cardinal.
    — Quel traître ! Il a fait demander à l'archiduc d'Au-triche l'assistance de ses troupes contre le Parlement et la ville de Paris. Il ne peut le nier. On a vu la réponse, datée de Bruxelles. Quelle audace ! Dire qu'il a fait arrêter Saujon et l'a menacé de mort parce qu'il avait songé à me marier avec l'archiduc...
    — Et ce blocus ! renchérit Claire de Frontenac. L'Italien affame des milliers de Parisiens par un hiver glacial. Il interdit le passage du blé, de la viande, dans la capitale. Sans le prince de Condé à la tête des troupes royales pour protéger le petit roi et les siens, que pourrait-il, le cardinal ?
    — Ici, nous ne mangeons guère mieux, constata la gouvernante. Du moins sommes-nous à l'abri. Il paraît qu'à Charenton le combat a été très meurtrier. Le duc de Châtillon, que Condé aimait fort, y a péri.
    — C'est l'horreur des guerres civiles, murmuraAnne-Louise. Les familles même sont divisées. Condé soutient le roi tandis que son frère Conti et sa sœur Longueville

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