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Mademoiselle

Mademoiselle

Titel: Mademoiselle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacqueline Duchêne
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quel'on avait trouvées en fouillant chez lui par ordre du roi. Cécile de Montglas m'en avait dit quelques mots autrefois. Que j'étais aveuglée alors par mon amour !
    En réalité, la nymphe de la Seine et ses chants plaintifs mentaient. L'homme que j'attendais avec tant d'impatience n'était pas un héros.
     
    Il faut croire que, devant mon obstination à donner à Lauzun le comté d'Eu, la Montespan décida de presser les choses. Ou plutôt le roi, car c'est lui qui était à l'origine des manigances de sa favorite.
    Pas question que je dilapide mes richesses. Vieille fille et hors d'état d'avoir des enfants à moi, il fallait que mes biens revinssent à ma famille. Donc à Louis, et sinon à ses enfants légitimes, du moins à ses bâtards, à Louis-Auguste de préférence.
    D'ailleurs, grâce à une astuce juridique qui escamotait le nom de la mère, le petit boiteux avait été légitimé, reconnu par son père et nommé duc du Maine. Il ne lui manquait plus que d'obtenir mon argent et mes domaines. Les deux rivales, la Montespan et la Maintenon, ses deux mères comme on les appelait, entichées toutes deux de l'enfant, durent pour une fois s'entendre et poussèrent sans relâche le roi à me dépouiller.
    La pression pour me circonvenir s'accentuait. Louis n'y participait pas ouvertement. C'est la Montespan qui montait au créneau.
    Avec toujours de nouvelle exigences. Le roi était content que je fasse du petit Maine mon héritier. Il le serait encore plus si je lui accordais quelque donation. « Que voulez-vous, Mademoiselle ? Il faut payer l'élargissement de Lauzun. Si vous ne le faites pas, on le laissera jusqu'à la fin de sa vie à Pignerol ou à la Bastille. »
    J'étais harcelée sans cesse, bouleversée. Enfin, à bout de résistance, j'acceptai de donner à l'enfant ma principauté des Dombes. La Montespan prit soin de me rassurer. Lauzun avait rendu les Dombes. Un envoyé du roi à Pignerol avait recueilli sa renonciation librement écrite. Quelle mascarade !
    Et, puisque j'avais décidé de me dépouiller du comté d'Eu et de n'en garder que l'usufruit, le roi préférait que je le cède à son petit duc. Pour le plus grand bien de Lauzun, évidemment, dont il ne pourrait alors refuser l'élargissement.
    — Ni, précisai-je, son mariage avec moi.
    En prévision de son retour, j'achetai un superbe domaine à Choisy, sur les bords de Seine. Je ferais la surprise à Lauzun de l'accueillir là. Je fis venir Le Nôtre pour qu'il me donne son avis. Il proposa d'abattre les bois qui s'étendaient devant la maison. Moi qui aime tant à me promener sous leur ombrage, je refusai. Il se moqua de moi et dit au roi que j'avais choisi la plus vilaine situation du monde. On ne voyait la Seine que comme par une lucarne.
    Je pris alors l'architecte Gabriel qui accommoda château et jardin à ma mode. Terrasses, fontaines, parterres, bois n'empêchaient pas que l'on eût de toute la maison la vue la plus agréable. De mon lit je voyais passer les bateaux sur la rivière. Je fis placer les portraits de ma famille dans la pièce où je mangeais et dans la salle du billard, puis les batailles du roi par Van der Meulen dans un petit cabinet fort commode. J'étais heureuse en pensant que Lauzun verrait tout cela et en jouirait avec moi.
    Je devais signer la donation au petit duc à Saint-Germain, le château de mes rares bonheurs. Cela me parut de bon augure. Louis avait de sa main écrit une procuration à Mme de Montespan. En son nom, elle recueillerait lesbiens que je laissais au duc du Maine. Maintenant que j'avais accepté le marché, je signai sans regret.
    Bientôt Lauzun reviendrait. Grâce à moi, grâce à ma générosité. Il m'en serait éternellement reconnaissant. Il approchait de la cinquantaine. La différence d'âge entre nous s'estompait. L'avenir n'était plus fermé. La tendresse, les douceurs dont j'avais tant rêvé...
    Une fois l'affaire ccnclue, Mme de Montespan m'étourdit de compliments. Elle tournait autour de moi, rapide malgré son embonpoint, me répétant sa satisfaction.
    Je rentrai chez moi, au Luxembourg, pleine d'espoir. Une fois dans ma chambre, je voulus me regarder dans un miroir. Je ne l'osais plus depuis longtemps. Était-ce l'émotion de penser à Lauzun qui allait bientôt me revoir ? La stupéfaction de me voir si laide, le nez busqué comme Condé, livide, les traits tirés, les lèvres horriblement gonflées ? Toujours est-il que je lâchai mon miroir, d'un

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