Marcel Tessier racontre notre histoire
économies et empruntent une importante somme pour leur permettre de loger et de nourrir les pauvres. Mais la vie n’est pas simple. Bigot, l’«intendant maudit», trouve qu’il y a trop de communautés religieuses et n’en veut pas de nouvelles. On proteste en vain. L’hôpital est à vendre. Ville-Marie s’émeut. On signe des requêtes. Les sulpiciens s’en mêlent; en prouvant que le terrain leur appartient, ils font reculer Bigot. Il doit retourner les meubles déjà arrivés à Québec. L’hôpital est sauvé. En 1753, par lettre patente, le roi confirme la directrice dans ses fonctions et reconnaît officiellement la nouvelle communauté des Sœurs grises ou Sœurs de la Charité. Marguerite recueille de plus en plus de pauvres et de déshérités: vieillards, handicapés mentaux, prostituées… Elle prie l’évêque d’accepter les règles de la communauté de même que le costume: «ample robe grise que retient une étroite ceinture en drap noir; capote noire formant bonnet et pèlerine qui cachent les servantes des pauvres au regard d’un monde indiscret.»
Saviez-vous que…
Ce n’est qu’en 1735, après un incendie qui détruisit 46 maisons, que Montréal mit sur pied son premier corps de sapeurs-pompiers. Formé de volontaires parmi les ouvriers du bâtiment, le corps disposait de 80 seaux de cuir, 200 seaux de bois, 100 haches, 100 pelles, 24 gaffes, 12 échelles et 12 béliers.
TOUTE UNE FEMME D’AFFAIRES!
La communauté des Sœurs grises est fondée. L’Hôpital général de la rue Saint-Pierre renaît. Marguerite d’Youville est une femme d’affaires remarquable. Les sœurs ne refusent aucun contrat; elles confectionnent des habits pour les soldats, des chapeaux, des tentes, des objets de fantaisie, des ornements d’église, des hosties, des cierges. En 1754, on entoure l’hôpital d’un mur de 3000 pieds de circonférence. Les religieuses transportent elles-mêmes les pierres. Pour ramasser des fonds, elles sèment du tabac et exploitent de grandes carrières sur leur propriété. Elles transforment les arbres en bois de construction. Elles louent les champs inexploités pour les pacages. En août 1760, Amherst s’emparera de la ville, mais protégera l’hôpital. Cinq ans plus tard, le feu le réduira en cendres. En Angleterre, on s’émouvra. On organise une souscription. L’Hôpital général renaît. Les sœurs ayant acheté la seigneurie de Châteauguay au lendemain de la Conquête, sœur D’Youville y élève un second moulin, une grange, une boulangerie, une vaste écurie et une résidence de deux étages.
Le 23 décembre 1771, Marguerite d’Youville a une attaque de paralysie; elle reçoit les derniers sacrements et s’éteint lentement, entourée de ses religieuses. En 1871, les Sœurs grises quittent l’ancien édifice des frères Charon. Elles s’installent dans le vaste établissement de la rue Guy, à Montréal. Les Sœurs grises ont essaimé partout, au Québec et dans le Canada tout entier, jusqu’à l’océan Arctique. Voilà l’œuvre d’une veuve d’ici, pauvre mais remplie d’amour pour autrui, de dévouement, de courage, de don de soi et d’humilité. Marguerite d’Youville a été béatifiée en 1959 et canonisée le 9 décembre 1990 par le pape Jean-Paul II. C’est la première sainte québécoise.
24 LE TRAGIQUE DESTIN DE L’ACADIE
O n pense généralement que les Acadiens ont de tout temps habité le Nouveau-Brunswick, puisque c’est dans cette province que se trouve le plus gros noyau de cette population. On se trompe. C’est plutôt en Nouvelle-Écosse que les premiers postes acadiens furent fondés.
C’est Jean Cabot qui découvre cette région en 1497, mais ce sont des colons français qui l’explorent, l’habitent et la baptisent Acadie. En 1604, Pierre de Quast, sieur de Monts, et le navigateur et cartographe Samuel de Champlain s’installent à Port-Royal (aujourd’hui Annapolis Royal) et fondent le premier établissement français. C’est un endroit stratégique dans la région nord de l’Atlantique, et rapidement les Anglais de la Nouvelle-Angleterre veulent s’en emparer. La colonie naissante ne peut résister aux attaques constantes de ces prédateurs. En 1621, le roi Jacques I er d’Angleterre la cède à William Alexander, un poète écossais, tuteur des enfants royaux; elle prend alors le nom de Nova Scotia, Nouvelle-Écosse.
UNE COLONIE BALLOTTÉE…
En 1632, le traité de Saint-Germain-en-Laye
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