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Marcel Tessier racontre notre histoire

Marcel Tessier racontre notre histoire

Titel: Marcel Tessier racontre notre histoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marcel Tessier
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taxes, subventions, etc. En outre, elle aura la haute main dans plusieurs domaines que la Loi constitutionnelle de 1867 laissera aux provinces le soin de gérer. Ignace Bourget, qui succède à M gr Lartigue comme évêque de Montréal, prône la domination de l’Église sur le pouvoir civil. C’est l’ultramontanisme. S’associant aux conservateurs (les bleus), il combat toutes les idées nouvelles. En plus de s’opposer à la séparation de l’Église et de l’État, ces nouveaux chefs combattent ardemment le vote des femmes, la liberté de presse et, surtout, les idées libérales. L’étau se resserre autour des libertés. Les hommes politiques subissent des pressions, les journaux sont contrôlés, les menaces de censure et d’excommunication pèsent sur ceux qui veulent lancer le débat.
    C’est à ce moment de notre histoire que l’Église met en place, pour les 100 ans à venir, le système d’éducation. Tout sera religieux et catholique, de l’école de rang à l’Université Laval (1852), en passant, bien sûr, par les collèges classiques. Un surintendant, qui obéit au Comité catholique composé pour moitié d’évêques, va tenir en laisse le système. Le clergé s’oppose même à la création d’un ministère de l’Éducation. Les politiciens plus libéraux devront s’écraser face au clergé tout-puissant. La proportion d’enseignants religieux passera de 10 à 44% de 1853 à 1896. Dans le domaine social, c’est encore l’Église qui dirige les hôpitaux, les hospices, les orphelinats. Même le domaine de la charité publique, à défaut de «bien-être social», lui échoit. Le curé est l’homme le plus influent et le plus important de la paroisse. Les vocations religieuses foisonnent: de 1850 à 1890, le rapport prêtre/fidèles passe de 1 pour 1080 à 1 pour 510. Les religieuses deviennent omniprésentes, leur nombre grimpe de 650 à 6628. Qu’advient-il de ceux et celles qui essaient de changer les choses?
    Après l’échec révolutionnaire, les chefs politiques qui restent se font silencieux. Le peuple se sent trahi. Il se tait. C’est lui surtout qui a payé les pots cassés. Quelques leaders ont été pendus, certes, mais presque tous sont sortis indemnes des rébellions; certains ont été condamnés à l’exil, d’autres se sont réfugiés aux États-Unis. Ceux qui restent, assagis de force, devront se faire tout petits et laisser à l’Église toute la place. Le clergé, bien sûr, s’empressera d’établir sa domination sur ce peuple. Le parti rouge, avec les Dorion en tête, va essayer de garder la lampe allumée, mais le clergé s’emploiera vite à l’éteindre. Ce parti, loin du peuple, réunissant des intellectuels de moins en moins radicaux, n’a plus la cote auprès de la population. Des journaux comme L’Avenir, Le Pays, Le Défricheur se battront contre le rapport Durham, contre l’Union, contre les réformistes, contre la Confédération. L’Institut canadien de Montréal, une association littéraire et scientifique fondée en 1844, s’est vite imposé comme le centre de rassemblement de jeunes intellectuels francophones, qui sont toujours sans université laïque française (les Anglais de Montréal ont déjà l’Université McGill depuis 1821). Les jeunes rouges lisent Voltaire, Lamartine, Pascal, et d’autres, au grand dam du clergé qui les menace d’excommunication. Les 700 membres de l’Institut ne peuvent accepter l’Index, le catalogue des livres dont Rome interdit la lecture. En 1869, M gr Bourget réussit à faire mettre l’annuaire de l’Institut à l’Index. Le clergé pousse encore plus fort, crée des instituts qu’il encourage. Ainsi naissent L’Œuvre des bons livres et le Cabinet de lecture paroissial. Le nœud se resserre encore. Même les rouges pâlissent.
    Un autre exemple nous démontre clairement l’emprise qu’exerce l’Église sur les intellectuels du temps. En 1845, François-Xavier Garneau publie le premier volume de son Histoire du Canada . Bien vite, le clergé lui reproche de ne pas faire ressortir le caractère religieux de la colonisation. En 1859, la troisième édition sera soumise à la censure du clergé, qui coupera des paragraphes entiers et demandera même à l’auteur de récrire certaines pages. Notre «historien national» s’y soumettra. Voilà un exemple éloquent. L’Église veut donc s’emparer du nationalisme du peuple; elle veut le diriger, même dans son patriotisme. On peut

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