Marcel Tessier racontre notre histoire
exécutif. En 1837, il participe à une tournée d’assemblées populaires avec Papineau. Quand les événements commencent à se précipiter, il se déclare contre toute action armée et tente de convaincre le gouverneur Gosford, à Québec, de convoquer l’Assemblée. Mais Gosford refuse et La Fontaine, qui craint d’être arrêté, se réfugie en Angleterre, puis en France.
En 1838, il revient au Canada où Colborne le fait emprisonner à la prison de Montréal durant un mois. Il est libéré après avoir insisté pour qu’on lui fasse un procès équitable. En 1840, c’est l’Acte d’Union. Tout en s’opposant à cette Constitution inique, La Fontaine croit que les Canadiens n’ont pas le choix et qu’ils doivent lutter pour en tirer le meilleur parti. C’est à ce moment de l’histoire qu’il devient le chef de file de ses compatriotes.
Il revient en politique et s’attaque directement à Sydenham, le nouveau gouverneur qui ne recule devant rien pour annihiler le peuple canadien et mettre en application le rapport Durham. Une alliance politique importante se réalise alors entre Baldwin, le chef réformiste du Haut-Canada, et La Fontaine. Les deux hommes deviennent les figures dominantes de la politique canadienne.
À la session de 1842, La Fontaine, malgré l’interdiction du français à l’Assemblée, prononce son premier discours en français. On veut l’interrompre. Il s’écrie: «Je fais mon premier discours dans la langue de mes compatriotes canadiens-français pour protester solennellement contre cette cruelle injustice de l’Acte d’Union…» En 1848, après des années de batailles et grâce à l’appui du comte d’Elgin, nouveau gouverneur du Canada, les réformistes triomphent aux élections dans le Bas et dans le Haut-Canada, et obtiennent enfin le gouvernement responsable qu’ils réclamaient depuis si longtemps. Dorénavant, c’est le chef du parti majoritaire qui devient le premier ministre et le chef réel du pouvoir exécutif.
Au cours de la session de 1849, le Parlement adopte 190 projets de lois, dont celui du bill d’indemnité qui soulève les passions populaires. C’est que huit ans plus tôt, en 1841, le gouvernement avait indemnisé les citoyens du Haut-Canada pour les pertes subies lors des soulèvements de 1837-1838. La Fontaine a simplement voulu que les citoyens du Bas-Canada bénéficient du même avantage. La réaction des tories est excessive. Débats, déchaînement inouï de violence verbale! La Montreal Gazette lance une édition spéciale qui contient ni plus ni moins qu’un appel à l’émeute. Manifestations sur le Champ-de-Mars, discours virulents, actes de vandalisme. On met le feu à l’édifice du Parlement. La maison de La Fontaine est pillée, le premier ministre passe près d’être assassiné… Mais le gouverneur et son premier ministre se tiennent debout, consacrant ainsi la responsabilité ministérielle.
L’ampleur de ses tâches, une santé précaire, le dégoût des divisions et des intrigues incitent Louis-Hippolyte La Fontaine à renoncer à la politique le 26 septembre 1851. «La politique use et use vite», déclare-t-il. Nommé juge en chef de la Cour du Banc de la Reine en 1853, il est nommé baronnet en 1854. Il meurt à Montréal en 1864.
50 JAMES BRUCE (LORD ELGIN)
C e grand gouverneur arrive dans la colonie le 1 er octobre 1846. Nous sommes au début de l’Acte d’Union, cette «deuxième Conquête», comme l’a appelée le chanoine historien Lionel Groulx. Rappelons-nous que la nouvelle constitution réunit en un seul Parlement le Bas et le Haut-Canada, à qui on a accordé chacun le même nombre de députés (42), même si le Bas-Canada compte 200 000 habitants de plus que le Haut-Canada. La Chambre d’Assemblée n’a pas obtenu la responsabilité ministérielle tant demandée par les réformistes des deux côtés. Sydenham, gouverneur en poste en 1840, a tout fait pour réaliser le contenu de l’Acte d’Union. Il a été remplacé par Bagot. Mais conciliant et diplomate, Bagot a été attaqué de toutes parts par la presse anglaise tory et les loyalistes qui le trouvaient trop mou envers les Canadiens français, et le traitaient de tous les noms: traître, vendu, mollasson… Bagot est mort en 1843. Son successeur, Charles Metcalfe, est revenu à la ligne dure. Il est parti en guerre contre la Chambre d’Assemblée, appuyé par les orangistes fanatiques. Il a nommé des employés publics à des postes
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