Marcel Tessier racontre notre histoire
d’État, mais on a peut-être oublié qu’il pouvait aussi être chanteur, conteur et danseur à ses heures. Bref, que c’était un bon vivant.
Ceux qui l’ont côtoyé nous le décrivent comme un homme assez fortement constitué, mais plutôt osseux et pas très grand. Sa démarche et ses mouvements sont nerveux, vifs et légers. Il a le visage ouvert; le front, les pommettes et la mâchoire sont larges, et le regard est mobile, plein de feu et d’intelligence.
C’est à Saint-Antoine-sur-Richelieu qu’il naît, en 1814. Il étudie au collège de Montréal, travaille chez Édouard Rodier, patriote puissant, et est admis au barreau en 1835. Encore étudiant il prend part, en 1834, à la fondation de la Société Saint-Jean-Baptiste. C’est au cours du banquet de lancement de l’organisme qu’il chante sa célèbre composition – qui fera le tour des maisons canadiennes –, Ô Canada, mon pays, mes amours .
Rapidement, le jeune avocat va se mêler aux Patriotes et en même temps que Thomas Chevalier de Lorimier devenir secrétaire des Fils de la Liberté. Il participe à la bataille de Saint-Denis et sa tête est mise à prix. Il gagne les États-Unis pour se mettre à l’abri, mais peut revenir à Montréal quelque temps après, en août 1838. Il se joint au parti de Louis-Hippolyte La Fontaine et se présente aux élections de 1843 contre Denis-Benjamin Viger, qui a changé son fusil d’épaule en s’associant au gouverneur Metcalfe. Il est battu. Mais en 1848 il est élu député dans le comté de Verchères. Durant ce temps, son chef occupe la place centrale en politique. George-Étienne Cartier se fait tout petit et apprend dans l’ombre le métier d’homme d’État.
Rapidement, il tisse des liens avec des politiciens de son parti et des hommes d’affaires qui s’intéressent surtout à la rentabilité de l’industrie ferroviaire… C’est là que le rôle de Cartier dans l’histoire est moins séduisant qu’on a voulu nous le laisser voir.
POLITIQUE ET FINANCIER
Léandre Bergeron insiste sur le fait que Cartier père est l’un des fondateurs de la Bank of Montreal et du chemin de fer Saint-Laurent-Lac Champlain, et que déjà le grand-père était engagé dans le commerce du sel, du blé et du poisson. George-Étienne vient donc d’une famille très à l’aise, bien implantée dans le monde des affaires. Et comme à cette époque c’est avec les Anglais que se font les affaires, Cartier a aussi ses entrées chez eux. Actif en politique, il est de plus au bon endroit pour exercer les pressions nécessaires… Et tout comme plusieurs marchands anglais de l’époque, Hincks, Galt et Merrit, par exemple, il joue sur les deux tableaux, politique et financier. C’est ainsi qu’il obtiendra l’aide de l’État pour la compagnie St. Lawrence and Atlantic Railway dans laquelle sa famille a des intérêts. Plus tard, il deviendra même l’avocat attitré de la compagnie de chemin de fer Grand Tronc.
Une fois La Fontaine retiré de la vie politique, Cartier prend du galon. Secrétaire provincial, procureur général, il devient chef du Parti libéral-conservateur. Il s’associe à Macdonald en 1858 et forme trois ministères de 1858 à 1867.
Les deux hommes participent à la décision de former une confédération. Le rôle de Cartier consiste aussi à faire accepter ce projet politique aux Canadiens français avec l’aide du haut clergé, sur qui il peut s’appuyer. Il prend part aux trois conférences qui préparent la naissance du Canada.
En 1867, il devient le plus puissant politicien du Québec à Ottawa quand il est nommé ministre de la Défense, poste qu’il occupe alors que le scandale du Canadian Pacific Railway (C.P.R.) lui enlève son siège de Montréal-Est au profit de Louis Jetté. (Je vous parle de ce scandale dans le chapitre suivant.) Il soufflera le siège de Louis Riel dans Provencher, au Manitoba, mais ira mourir à Londres le 20 mai 1873.
Sa dépouille rapatriée, on lui fait des funérailles civiques à l’église Notre-Dame de Montréal. Les éléments conservateurs de l’époque, politiciens, haut clergé et capitalistes ont réussi à imposer une constitution au peuple sans référendum. Cartier en était l’un des instigateurs…
55 LE SCANDALE DU CANADIAN PACIFIC RAILWAY
E n 1873, un scandale éclabousse Macdonald, Cartier et tout le Parti conservateur. Il obligera le premier ministre à démissionner et à laisser les rênes du pouvoir,
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