Marcel Tessier racontre notre histoire
déclarait: «Louis Riel, qui est mort inutilement, devrait être innocenté par le gouvernement et déclaré victime d’un méfait.» À cette époque, elle était députée dans l’opposition. Quelques années plus tard, elle votait contre le projet de loi visant à annuler la déclaration de culpabilité de Riel…
Comme quoi, même aujourd’hui, plus de 100 ans après sa pendaison, le 16 novembre 1885, il est encore politiquement dangereux de réhabiliter un héros de culture française, pourtant fondateur d’une province canadienne, un homme qui a combattu le racisme en exigeant le suffrage universel et le respect des droits de la personne. Il est impossible dans un si court espace d’analyser et d’expliquer toute cette histoire, celle du peuple métis, français et catholique, qui aurait pu établir une deuxième province française à l’ouest de l’Ontario. Mais pour les fédéraux, il fallait annihiler à jamais la volonté de regroupement de ce peuple, le massacrer et y installer des colons anglais qui feraient du Manitoba une province anglaise. Mais essayons de résumer…
En 1868, les Métis du Manitoba vivent tranquilles sous le régime de la Compagnie de la Baie d’Hudson qui exploite les territoires du Nord-Ouest, richissimes en fourrures, et qui exploite aussi bien sûr les Amérindiens, les Métis et les trappeurs canadiens-français, sous l’œil bienveillant du gouverneur McTavish.
À cette époque, le gouvernement de la Confédération entre en pourparlers avec la compagnie pour acheter ses terres. Le long de la rivière Rouge et de ses affluents vivent, d’un côté, 10 000 Métis et quelques milliers de Canadiens français établis selon le modèle québécois des seigneuries, et de l’autre, des agriculteurs écossais venus avec Lord Selkirk en 1812.
Avant même que le contrat ne soit signé, le gouvernement du Canada envoie des arpenteurs démarquer les terres en lots carrés, défaisant ainsi tout l’arrangement primitif. «Les Métis protestent auprès du premier ministre Macdonald qui, pour toute réponse, les traite de halfcastes, de dégénérés» (Léandre Bergeron).
LA PREMIÈRE INSURRECTION (1869)
Le gouvernement fédéral nomme McDougall lieutenant-gouverneur de ces territoires en attendant leur entrée officielle dans la Confédération. La Compagnie de la Baie d’Hudson cesse tout acte d’administration le 1 er décembre 1869. Il y a donc un moment où les territoires n’ont pas d’autorité effective. Les Métis en profitent pour constituer un gouvernement provisoire, dont Louis Riel est l’âme dirigeante. Les arpenteurs et autres employés du gouvernement voient cela d’un fort mauvais œil. Le major Boulton, le D r Schultz et d’autres lèvent un corps de volontaires pour attaquer les Métis. On en vient aux coups…
L’un de ces combattants, un nommé Thomas Scott, violent et intraitable, est condamné à être fusillé sur l’ordre de Riel. C’est un Ontarien orangiste qui deviendra le héros des anglophones. La tête de Riel est mise à prix par le gouvernement de l’Ontario.
Le 5 décembre, le chef métis produit sa Liste des droits, laquelle exige que la population métisse soit consultée sur sa volonté d’être intégrée dans le Canada. Le fédéral n’est pas d’accord, naturellement. Il fait donc appel à M gr Alexandre Taché, évêque de Saint-Boniface, qui réussit avec beaucoup de peine à apaiser les Métis. Après un mois de négociations entre Macdonald et le gouvernement provisoire, la province du Manitoba est créée le 15 juillet 1870. L’entente se fait moyennant de bonnes garanties en faveur des Métis, mais le gouvernement fédéral se réserve la propriété des terres publiques. Les Métis ont gagné leur cause: le Manitoba est une province bien définie, et non un agrandissement de l’Ontario.
Mais ce n’est que partie remise, car les Anglais vont chasser les Métis, modifier leurs lois sur les écoles et faire du Manitoba une province anglaise.
LA DEUXIÈME INSURRECTION (1885)
Dès 1870, des militaires sont arrivés au Manitoba sous le commandement du lieutenant-gouverneur Archibald. Les Métis ne comprennent pas, puisque pour eux la question est réglée, nous dit Léandre Bergeron. Cependant, la répression commence. Des immigrants arrivent par milliers et chassent les Métis. C’est même la persécution. Assez pour que le gouverneur Archibald écrive au premier ministre Macdonald: «Les nouveaux venus
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