Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
Vom Netzwerk:
derniers survivants à venir nous rejoindre, ayant dû descendre sur toute
leur hauteur les pentes ravagées. Ils affichaient un air de fierté légitime,
contents de ce qu’ils avaient accompli, mais semblaient également un peu
choqués, d’aucuns parce qu’ils avaient échappé de bien peu à la mort, d’autres
parce qu’ils ne prenaient que maintenant la mesure du cataclysme qu’ils avaient
déclenché. Mais je les complimentai avec la même chaleur, leur expliquant que
je n’aurais pas fait mieux qu’eux, et relevai leurs noms afin de faire leur
éloge au khakhan. Il me faut remarquer, toutefois, que je ne récoltai que onze
noms ; douze hommes étaient partis dans les montagnes, et douze boules
avaient effectué ce qu’on attendait d’elles, mais nous ne sûmes jamais ce qui
était arrivé à celui qui n’était pas revenu.
    Ce n’est qu’au milieu de la nuit que le capitaine Toba
rentra, à la tête de l’avant-garde de notre véritable armée mongole. J’étais
encore réveillé et fus très heureux de les voir. Une partie du sang dont
j’étais couvert était le mien, et j’en perdais encore un peu, car je n’étais
pas sorti indemne de mon combat singulier avec le guerrier Yi. Ce dernier avait
réussi à me taillader en plusieurs endroits les mains et les avant-bras, ce
dont je ne m’étais pas aperçu dans un premier temps. Ces blessures étaient
devenues douloureuses. Le devoir immédiat de la troupe fut d’édifier une tente
destinée à servir d’infirmerie, et Bayan veilla à ce que je fusse le premier à
y recevoir les soins des chamans qui faisaient ici autant office de médecins
que de prêtres et de sorciers.
    Ils nettoyèrent mes plaies, les oignirent d’un baume
végétal et les bandèrent, précautions qui m’eussent à titre personnel largement
suffi. Mais ils jugèrent bon de procéder ensuite à des pratiques de sorcellerie
afin de vérifier si je n’avais pas subi de lésions internes. Le chef chaman
brandit devant moi un bouquet d’herbes sèches qu’il appelait chutgur, ou
« démon des fièvres », et lut à voix haute dans un livre
d’incantations, tandis que ses assistants faisaient du tapage avec des
clochettes, des tambours et des trompettes en cornes de mouflon. Après quoi, le
maître des cérémonies jeta sur les braises qui crépitaient au milieu de la
tente une omoplate de mouton, qu’il récupéra une fois carbonisée pour y lire
dans les fissures produites sur l’os par la chaleur. Enfin, il décida que
j’étais indemne à l’intérieur, ce que j’aurais pu lui dire en évitant
l’essentiel de ces simagrées, et consentit à me laisser quitter la tente qui
servait d’hôpital. Le premier à y être admis à ma suite fut le wang Ukuruji,
dont il fallait suturer les blessures afin de le rendre présentable pour les
funérailles du lendemain.
    Dehors, l’obscurité de la nuit était trouée par la
clarté d’un grand nombre de feux de camp. Tout autour, les troupes se livraient
à leurs traditionnelles danses de victoire rythmées de tapes du pied, de sauts
et de battements de jambes frénétiques, et généreusement ponctuées de
« Ha ! » et de « Hui ! » lâchés à pleins poumons
par les danseurs qui ne manquaient pas d’arroser copieusement les spectateurs
de l’arkhi et du kumis contenus dans leurs coupes, au gré de
leurs gesticulations. Ils ne tardèrent pas à atteindre un solide état
d’ébriété.
    Je trouvai Bayan entouré de deux sardar fraîchement
arrivés, encore sobres pour leur part, qui m’avaient attendu pour m’offrir un
cadeau. Au cours de sa marche vers le sud en venant de Ba-Tang, me
déclarèrent-ils, l’armée avait chargé ses éclaireurs d’explorer chaque ville et
village isolé pour arrêter toute personne suspectée d’être un espion Yi
essayant de se fondre dans la masse des civils pour susciter derrière l’armée
mongole de meurtrières actions de francs-tireurs de la guérilla. Or, dans un
caravansérail qui avait été détruit au bord d’une route de traverse, on avait
trouvé un homme incapable d’expliquer qui il était. Ils l’introduisirent devant
moi avec un luxe de cérémonie, comme s’ils me faisaient là un insigne présent,
alors que, pour être franc, le ladre ne ressemblait pas à grand-chose. Ce
n’était rien qu’un de ces trapas Bho crasseux et malodorants, le crâne tondu et
le visage barbouillé de la pommade médicinale brune habituelle chez eux.
    — Non, non,

Weitere Kostenlose Bücher