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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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rempli de
ses testicules gigantesques qui avaient l’apparence du cuir et étaient aussi
ridés qu’une peau d’éléphant. Leur taille dépassait celle d’une tête humaine.
Leur simple vue fit se rétracter les miens d’une douloureuse contraction de
sympathie mêlée de dégoût.
    — Regardez sous son dhotì, vous remarquerez qu’il
a aussi les jambes épaisses d’un éléphant et la peau de cet animal. Mais ne
soyez pas désolé pour lui, Marco -wallah. Ce n’est qu’un paria affecté de
la Honte de Santomè, ce saint chrétien que vous nommez Thomas.
    L’explication était encore plus ahurissante que la vue
du pitoyable homme éléphant. Incrédule, je demandai :
    — Qu’est-ce que cette terre de ténèbres peut bien
connaître de saint Thomas ?
    — Il est enterré quelque part par là, c’est du
moins ce qu’on dit. Il a été le tout premier missionnaire chrétien à visiter
l’Inde, mais n’a pas été bien reçu parce qu’il a tenté d’enseigner sa parole
aux réprouvés que sont les intouchables, ce qui a bien sûr révulsé et offensé
les bons citoyens des castes. Ils ont donc payé sa propre congrégation de
parias de Santomè pour le tuer, et...
    — Sa propre congrégation ? Et ils l’ont
fait ?
    — Les parias feraient n’importe quoi pour une
pièce de cuivre. Le sale boulot, c’est leur travail. En tout cas, Santomè doit
avoir été un homme puissamment saint, quoique païen. Les hommes qui le tuèrent,
ainsi que tous leurs descendants parias, ont été frappés de la Honte de
Santomè.
    Nous nous dirigeâmes vers le centre de la ville où
s’élevait le palais du rajah. Pour y accéder, nous dûmes traverser une
spacieuse place du marché, bondée comme elles le sont toutes, mais sans nul
commerce, en ce jour. Il s’y déroulait une sorte de fête que nous observâmes sans
nous presser, curieux que j’étais de découvrir la façon dont les Hindous
célébraient une joyeuse occasion. Leur attitude me parut plus studieuse que
joyeuse, à la vérité, car je ne pus voir une seule face réjouie parmi eux.
Leurs visages, en fait, en plus de la très habituelle trace de peinture
ornementale sur leur front, étaient maculés de ce qui ressemblait à de la boue,
mais sentait bien plus mauvais.
    — De la bouse de vache sacrée, précisa Tofaa. Ils
se lavent d’abord la face dans de l’urine de cette vache, puis étalent sa bouse
sur leurs yeux, leurs joues et leur poitrine.
    Je refrénai tout commentaire, demandant
seulement :
    — Pourquoi ?
    — Ce festival est donné en l’honneur de Krishna,
le dieu des nombreuses maîtresses et des amants. Quand Krishna n’était qu’un
enfant, voyez-vous, il n’était qu’un petit gardien de vaches : c’est à
l’ombre des vaches qu’il a opéré ses premières séductions des trayeuses locales
et des femmes de ses collègues, vachers comme lui. Aussi cette fête, en plus de
célébrer avec allégresse l’élévation spirituelle de l’acte d’amour, honore avec
solennité cet autre aspect de Krishna, à travers les vaches sacrées. Et cette
musique que l’on joue là-bas, vous l’entendez ?
    — J’entends, oui. J’ignorais que c’était de la
musique.
    Les musiciens étaient groupés au centre de la place,
arrachant des sons à toutes sortes d’ustensiles : flûtes de bambou,
tambourins, fifres de bois et divers instruments à cordes. Dans ce concert,
étrange mélange de sons nasillards et de hurlements rauques et perçants, les
seules notes douces provenaient d’un instrument en forme de luth, au cou très
allongé et à la caisse taillée dans une calebasse, dont le joueur effleurait
trois cordes métalliques d’un médiator fixé à l’index. L’auditoire suant des
Hindous massés autour assistait au spectacle d’un air aussi morose et avec
autant d’entrain que celui qu’il m’inspirait.
    — Ce que jouent les musiciens, indiqua Tofaa,
c’est le kudakuttu, la danse du pot de Krishna, le chant que les vachers
chantent depuis toujours à leurs vaches pendant qu’ils les traient.
    — Ah, oui. Si vous m’en aviez laissé le temps,
j’aurais probablement deviné quelque chose de ce genre.
    — Voici venir une jolie danseuse du ventre.
Admirons un peu sa danse du pot de Krishna.
    Une femelle brun foncé, sans doute conforme à l’idéal
que m’avait complaisamment décrit Tofaa et aux mamelles fort bien adaptées à la
célébration bovine du jour, grimpa laborieusement sur la

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