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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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matériel d’écriture ici,
dehors, dans cette petite cour près du canal que nous appelons le jardin. Il
est planté de chrysanthèmes, la fleur de Manzi, de plants que j’ai rapportés de
là-bas, et leurs couleurs d’or, de feu et de bronze font fière figure au soleil
velouté de septembre. Les gondoles qui passent sur le canal barrent tout près,
aussi leurs occupants peuvent-ils admirer mes fleurs exotiques, car tous les
autres massifs ou garnitures de fenêtres à Venise sont plantés de fleurs d’été
qui ont bruni, à cette époque de l’année, et se sont flétries. Je me suis
installé sur ce banc, doucement, pour ne pas relancer le bas de mon dos, et
j’ai écrit la conversation que nous venons de conclure. Cela fait un moment
maintenant que je reste là, pris dans mes pensées.
    Il y a un mot, asolare, qui a été inventé ici,
à Venise, mais s’est à présent étendu, je pense, à toute la péninsule
italienne. C’est un mot joli et utile, asolare.. . Il veut dire s’asseoir
au soleil, prendre l’air et ne rien faire, absolument rien. Je ne pensais pas
que ce mot puisse jamais me correspondre. Durant une bonne partie de ma vie,
Dieu sait que j’en ai été loin. Mais maintenant, quand j’y repense... toutes
ces années si tumultueuses, les voyages qui n’en finissaient pas, ces
kilomètres qui se sont succédé, et ces li , ces farsakh, les amis,
les ennemis et ceux que j’aimais qui ont voyagé un temps avec moi et se sont
perdus en route... il me revient une règle que m’avait transmise mon père il y
a bien longtemps, lorsque je faisais mes premiers pas de voyageur. Il me
disait : « Si tu viens à être perdu en pleine nature, Marco, marche
toujours à flanc de colline, et tu finiras par tomber sur un ruisseau. Là où il
y a de l’eau, tu trouveras toujours de quoi faire paître ta monture, un peu
d’ombre et de la compagnie. Cela peut te prendre du temps, mais maintiens-toi
toujours à flanc de colline et tu parviendras à un moment ou à un autre dans un
endroit sûr, où tu seras au chaud et en sécurité. »
    J’ai parcouru un long, long chemin, et voilà enfin le
bas de la colline, et me voici : un vieil homme qui se dore aux derniers
rayons du soleil de l’après-midi, au déclin d’un mois de la saison où tombent
les feuilles.
    Je me souviens, lorsque je chevauchais avec l’armée
mongole, avoir remarqué un jour un cheval de guerre qui galopait avec nous,
toujours dans le pas et au rythme de la troupe, magnifiquement caparaçonné de
son armure de cuir, avec son épée et sa lance dans son fourreau... mais la
selle du cheval était vide. Le vieux Bayan me raconta : « C’était le
coursier d’un vaillant guerrier nommé Jangar. Il l’a porté lors de nombreuses
batailles où il s’est bravement battu, et il le portait encore au moment de nombreux
combats, celle où il est mort. Le cheval de Jangar continuera à nous
accompagner, tout en armes, aussi longtemps que son cœur l’appellera à la
guerre. »
    Les Mongols savaient bien que même un cheval préfère
tomber au combat ou courir jusqu’à ce que le cœur lui manque plutôt que se
retirer dans une riche pâture où il sera inutile et n’aura plus rien à faire
qu’attendre, et attendre encore.
    Je repense à tout ce que j’ai relaté ici, à tout ce
qui a été écrit dans le premier livre, et je me demande si je n’aurais pas pu
tout dire en sept petits mots : « Je suis parti et je suis
revenu. » Mais non, ce ne serait pas tout à fait vrai. Ce n’est jamais le
même homme qui rentre chez lui, qu’il revienne d’une journée de travail sur ses
livres de comptes ou d’années de voyage vers les terres lointaines, après ces
longues traversées, ces espaces bleus, sur ces terres où la magie n’est pas un
mystère mais une réalité de tous les jours, dans des cités dignes de se voir
dédier des poèmes :
    Le paradis est loin de nous
    Mais il existe Hang et Su !
    Quand je suis rentré au pays (avant de retomber dans
l’anonymat et d’y être oublié), j’ai été pendant un temps, raillé et tourné en
ridicule ; on m’a pris pour un menteur, un vantard, un affabulateur. Mais
ceux qui se moquaient avaient tort. Je suis rentré avec moins de mensonges,
sans doute, que je n’en emportais en partant. J’ai quitté Venise les yeux
brillants d’espoir à l’idée de trouver ces pays de Cocagne décrits par les
premiers croisés, les biographes d’Alexandre et tous ces faiseurs

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